[ Khadija Selly Diallo ]
- La cravate rouge ou celle bleue ? Demandai-je.
Haby - La rouge !
- Les deux, finis-je par choisir.
On termina donc de faire nos courses et on se posa comme prévu sur la terrasse du restaurant qui se trouvait dans le coeur de la ville. On se retrouva à parler de tout ce que l'une avait raté de l'autre en l'espace de deux semaines. Depuis mon avortement, je n'avais plus osé penser à avoir un bébé. J'avais trop peur pour vouloir réessayer. Et même si Nabil était constamment sur moi pour s'inquiéter pour un rien, intérieurement cela me faisait toujours aussi mal. Comme on l'a si souvent répété, «C'est quand on perd quelque chose qu'on se rend compte de sa valeur». C'était tout à fait vrai. Au début je n'avais pas le courage de devenir maman mais maintenant que je l'avais perdu, tout ce que je voulais c'était poursuivre ma grossesse et être aussi enthousiaste qu'Haby. C'était dommage mais Allah en avait décidé ainsi.
Haby - Comment il est Mohamed avec toi ?
- C'est à dire ?
Haby - Il est calme ? Il te traite bien ? Raconte non ?
- Oui, il est bien. Des fois ça lui arrive d'avoir les nerfs tendus mais en général il est plutôt calme.
Haby - Et j'espère que tu en fais autant avec lui.
- Tu me connais un minimum.
Haby - Justement !
- Bon, d'accord. J'essaie de faire de mon mieux.
Elle rigola rapidement tout en levant les yeux au ciel, la mine exaspérée.
- Quoi ? Soupirai-je.
Haby - Dans la chambre aussi tu essaies de faire de ton mieux ? Demanda-t-elle en roulant des yeux.
- Dans la chambre... Commençai-je à lui demander, n'ayant pas compris. Haby ! Franchement arrête, la regardai-je de travers.
Haby - Je n'arrête pas ! Je veux savoir. Pourtant je te raconte comment il est mon mari.
- Parce que tu n'as aucune pudeur ! Et tu aurais dû remarquer que je ne t'écoute pas vraiment quand tu me racontes tes affaires. En soi, ça ne me concerne pas.
Haby - Au lieu de prendre exemple sur moi, dit-elle exaspérée.
Je levai les yeux au ciel à mon tour, encore plus exaspérée qu'elle. Cette fille était vraiment un cas unique. Elle n'avait pas du tout froid aux yeux, elle te disait ce qu'elle pensait comme elle le pensait et te laissait le plus souvent mal à l'aise.
Je changeai donc de sujet pour lui demander des nouvelles de ses amis avec lesquels je m'entendais plutôt bien. Ça faisait un moment que je ne les avais pas vus et ça, un peu à cause du travail, un peu beaucoup à cause de Mohamed. Il n'aimait pas le fait que je m'entende avec d'autres hommes si ce ne sont pas Tidiane et son cercle d'amis les plus proches. Dès que j'étais la seule à connaître un homme, il pensait que cet homme avait des arrières pensées alors je devais arrêter de le voir. Oui, c'était au delà de la paranoïa, mais je préférais mille fois quand mon mari me parlait avec douceur que quand il me faisait la tête.Haby - Chaque jour ils demandent après toi, si tu savais ! Il faut vraiment qu'on se fasse une sortie tous ensemble, ça fait vraiment longtemps.
- Oui, c'est vrai. Tu sais que ce n'est pas évident avec le travail.
Haby - Pas faux, mais un samedi soir, pour ne serait-ce que deux petites heures !
- On le fera, dis-je tout en sachant que Mohamed n'accepterait pas.