Dès ma plus tendre enfance, j'ai compris la définition du mot survivre. J'ai appris à vivre dans l'ombre des autres, l'ombre de cette famille. Un jour j'ai arrêté de compter les fois où j'avais été marqué au fer rouge parce que cela n'avait plus auc...
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Au réveil, j'avais encore la nette impression de sentir la présence d'Ilyas. J'avais eu envie, plus d'une fois, de quitter ma chambre pour atteindre la sienne et trouver du réconfort dans ses yeux. Mais je ne l'avais pas fait, par peur d'être prise sur le fait et par peur de ce que je commençai à ressentir.
Quelqu'un frappa à la porte et je sus avant même d'ouvrir que c'était Ilyas. Il esquissa un sourire maladroit lorsque j'ouvrais.
- Tu peux me rejoindre derrière la maison dans une heure ? Me demanda-t-il en détaillant mon visage d'une telle façon que je me sentis rétrécir.
J'acquiesçai.
- Alors à tout à l'heure.
Après son départ, je m'engouffrai sous la douche. Une hâte que je ne saurais décrire s'était emparée de moi, et parce que j'allais m'éloigner d'ici, et parce que nous allions récupérer des informations sur ma mère. Partir un jour de semaine n'était peut-être pas la meilleure des idées, James se rendrait compte de mon absence au lycée. Enfin, j'avais déjà loupé pas mal de jours donc, en soi, ce n'était plus si grave.
Le moment venu, j'arpentai les couloirs en direction de l'ouest de la maison, au détour d'un couloir j'aperçus Odile. En pressant un peu le pas, je priai pour qu'elle ne m'ait pas vue. Mes prièrent ne furent pas entendues puisqu'elle me héla de loin. Arrivée à ma hauteur, elle me toisa de son habituel air supérieur, et sa bouche beaucoup trop rouge à mon goût s'étira en un rictus mauvais.
- Tu n'aurais pas vu Ilyas par hasard ?
- Je ne vois pas comment j'aurais pu le croiser, lançai-je sèchement.
Elle roula des yeux comme elle savait si bien le faire en portant sa main à sa taille.
- J'oubliai, il ne vaut mieux pas qu'il te voit, pouffa-t-elle, fière de sa réplique minable.
Intérieurement je riais, si seulement elle savait, je pense qu'elle ne s'en remettrait pas. Pour ne pas m'éterniser, je lui rendis son faux sourire, et sans manquer de la bousculer au passage, je continuai mon chemin vers la sortie arrière de la maison. Une chose me trottait à l'esprit, si elle n'avait pas vu Ilyas c'était qu'il n'était pas descendu manger, alors qu'est-ce qu'il avait fait ?
Sans plus attendre, j'accélérai pour retrouver Ilyas qui m'attendait sagement, adossé contre un mur à l'extérieur. Son attitude évoquait la nonchalance totale, le contraste entre son comportement lorsqu'il était en ma présence et celle des autres était surprenant. En ma présence comme moi en la sienne nous étions d'autres personnes.
- Tu n'es pas allé manger ? le questionnai-je directement.
Il secoua la tête négativement et m'entraîna dans le garage. De nature bien trop curieuse je ne pus m'empêcher de lui demander pourquoi il ne s'était pas rendu au petit-déjeuner. J'avouai que sa réponse m'avait un peu déçue : « des coups de fils à passer ». Mais après avoir embarqué dans sa Mustang, je ne bronchai plus et le paysage qui s'offrait à moi me détendit.
