9. Naïve

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Cela va faire deux semaines que je suis là et je suis au bord de la rupture psychologique et physique. J'essaye de rester au maximum dans ma chambre mais je suis bien obligée de descendre, je ne peux pas non rester sans rien manger ni boire. Malheureusement, chaque bouchée, chaque gorgée est suivie de coups qui se font de plus en plus durs à force que les jours passent. Et plus j'y pense, plus je me demande si ce qui fait le plus mal est la douleur physique, les bleus sur mon corps ou plutôt la torture mentale. C'est amusant de voir comment notre façon de voir les choses évolue si facilement en fonction des situations. Il y a un an, le fait que mes parents me privent de sorties étaient une vraie torture, il y a un mois, le fait de voir Nate et Andrea était le nouveau stade de torture maximale. Mais aujourd'hui je me rends compte de ce qu'est vraiment la torture. C'est être continuellement sur le qui vive, c'est avoir peur et vouloir se rebeller mais c'est impossible. Pour me rebeller, je dois me laisser mourir de faim et je doute que ça les intéresse. Alors je n'ai pas d'autre choix que de finir par craquer et aller manger en sachant quel est le prix à payer derrière. Mon corps me fait un mal de chien, le simple fait de me lever est douloureux, pourtant je me force à faire quelques pas dans ma chambre tous les jours dans l'espoir de dégourdir mon corps tendu.

J'observe par la fenêtre les différents allers et venues de mes compagnons et au fond de moi, je prie pour que la voiture de Santiago finisse par apparaitre et qu'il vienne me sortir de là, mais l'espoir se fait de plus en plus petit. Et quand une crampe d'estomac me tord le ventre, je sais que le moment tant redouté est arrivé. Je vais devoir descendre pour manger et rien que d'y penser, j'en ai les mains qui tremblent. Je sens que je ne vais pas pouvoir supporter tout ça encore bien longtemps, qu'il faut que je trouve le moyen d'y mettre un terme, mais je ne vois pas comment. Ce n'est pas moi, du haut de mon 1m60 qui vais mettre à terre une armoire à glace d'1m85. J'ai besoin d'une arme si je veux pouvoir me défendre un minimum mais il n'y a rien d'utile dans ma chambre. Le bruit d'un moteur qui démarre attire de nouveau mon attention par la fenêtre et je remarque que cinq de mes compagnons s'en vont, surement pour une affaire que leur a confié Rodriguez. Cela tombe bien, s'il n'y a qu'un des hommes quand je descends, il sera peut-être moins violent, n'ayant personne à impressionner. J'aurais peut-être une chance de mieux lui tenir tête à un contre un.

Je prends mon courage à deux mains et sors de la chambre pour rejoindre la cuisine en bas. Je me raidis quand Juan me fait face. A force, j'ai finis par connaitre leur prénom et je dois avouer que celui qui me terrifie le plus dans cette maison est Juan. Il n'a aucune morale, aucune pitié et prend un malin plaisir à me battre aussi fort que possible, qu'il y ait ou non des spectateurs. J'ai soudainement envie de faire demi-tour mais il m'a déjà remarquée et cela lui ferait trop plaisir de me voir battre en retraite, apeurée. Je m'avance doucement dans la cuisine, ne le quittant pas des yeux dans l'espoir d'anticiper ses gestes, et il fait comme si je n'existais pas. Il nettoie son arme minutieusement comme s'il s'agissait d'un truc précieux et la recharge. Je tente de me faire toute petite tout en me faufilant vers les placards mais au moment où je tends la main pour attraper un paquet de biscuit, Juan m'agrippe les cheveux. Il me retourne pour que je lui fasse face et me plaque violemment contre le plan de travail.

_ Bah alors comme ça on a faim, on vient se servir dans les placards dit-il en ricanant avec son air mauvais.

Je suis pétrifiée et n'ose pas bouger, attendant que le coup arrive. Mais bizarrement rien ne vient, il glisse sa tête dans mon cou et me renifle comme un chien avant de me chuchoter à l'oreille.

_ Puisque notre cohabitation risque de durer, je ferrais peut-être bien d'en profiter finalement.

Et sur ces mots, sa poigne se fait plus dure autour de mes cheveux et il m'embrasse brutalement. Surprise, horrifiée par ce qui se passe, je lui mords la lèvre jusqu'au sang.

MEXICOOù les histoires vivent. Découvrez maintenant