14. Le feu et la glace

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Dans notre vie, il y a tout un tas de chose qu'on ne pense jamais expérimenter. On rêve d'aventures, on s'invente des vies imaginaires le soir suite au dernier film d'action ou d'amour qu'on vient de voir, mais au fond de nous, on sait très bien que tout ceci ne nous arrivera jamais. Mais je me souviens très bien que lorsque j'étais petite et que mon père me répétait sans cesse que tout ce que je pouvais voir à la télé ou lire dans les livres n'était pas réel, je lui répondais toujours que dans toute histoire il y a forcément une part de vrai. Et aujourd'hui, je me dis que j'aurais préféré avoir tort. J'aurais voulu que la fiction reste de la fiction.

Cette douleur que je commence à connaître par cœur, j'aurais aimé ne jamais la connaître. Mon bras me lance, me brûle et me donne envie de me frapper la tête contre un mur. J'essaye de bouger le moins possible, de faire abstraction à la douleur mais c'est comme si elle m'avait envahie toute entière et je ne vois plus qu'elle. Malgré tout, le sentiment qui me domine n'est pas la peur ou la douleur mais la rage, la rage de faire ravaler à Rodriguez son sourire hautain. Je serre les dents et tente de lui montrer le moins possible à quel point j'ai mal, je refuse de lui faire ce plaisir et cette pensée arrive à éloigner légèrement de mon esprit la douleur.

_ Es..pèce de connard...lui crachais-je difficilement mais en essayant de lui transmettre toute ma rage.

_ Je t'en devenais une princesa déclare-t-il en s'agenouillant face à moi. Tu m'as tiré dessus et je t'avais prévenue qu'il y aurait des représailles. Estime toi heureuse, maintenant on peut dire que nous sommes quittes.

Son comportement m'insupporte. Il agit comme si tout ceci n'était qu'un jeu, que rien n'avait de conséquence et ça me révulse. La vie a donc si peu d'importance pour lui ? Je bous à l'intérieur et je rêve de lui mettre mon poing dans la face à ce moment là.

_ Toi et moi, nous ne serons jamais quittes ! Tu as détruit ma vie, tu m'as séquestrée, tu m'as torturée et tirée dessus. Rien de ce que je pourrais te faire ne sera jamais à la hauteur de ce que tu m'as fais, si ce n'est te tuer lentement et douloureusement. Retiens bien ça !

Je suis incapable de déterminer si mes paroles l'ont atteint ou non, son masque froid et distant m'en empêchant. J'ai l'impression de parler à un mur et son silence est presque flippant.

_ Bien, puisque tu le prends ainsi que le meilleur gagne à la fin princesa...me murmure-t-il, le visage toujours fermé, avant de se relever et de partir, me laissant là, seule, avec une balle dans le bras, comme si de rien n'était.

J'ai envie de l'insulter une nouvelle fois mais je me retiens, n'ayant pas envie d'envenimer la situation. Qu'est-ce que je venais de déclencher ? Je n'en ai pas la moindre idée, tout ce que je sais c'est qu'à la fin, il n'en restera qu'un...

Je prends une longue inspiration puis appuie sur mon bras valide pour me relever. Je grimace de douleur mais y fait abstraction pour pouvoir rejoindre les autres. Sur le chemin, je croise plusieurs cadavres, que je suis incapable d'identifier comme allié ou ennemi, et les hauts le coeur reviennent vitesse grand V. Même en détournant le regard, l'odeur assez forte ainsi que les taches de sang un peu partout, nous rappellent la mort omniprésente autour de nous. Malgré cela, je continue d'avancer jusqu'à la salle à manger où Rodriguez et ses hommes sont réunis. Vu ses traits tirés, sa mâchoire crispée et ses poings serrés, j'en déduis que les nouvelles ne sont pas bonnes, alors je me fais toute petite dans un coin de la pièce, pour ne pas être repérée. Je reconnais rapidement Valerio à sa droite qui lui parle de l'attaque que l'on a subit et des hommes qui n'ont pas survécu, puis à sa gauche Santiago qui lui fait un rapport de l'embuscade dans l'autre ville où les résultats n'ont pas été meilleurs. Je comprends alors que trop d'hommes de Rodriguez ont été tués, qu'il y a eu aussi beaucoup de dommages collatéraux lors de la fusillade et que tout cela affecte sévèrement son business. Il ne dit rien durant toutes leurs explication et si de façade il parait ne rien écouter, je peux voir dans ses yeux qu'il réfléchit à vive allure à la bonne marche à suivre. Lui qui a d'habitude un coup d'avance sur les autres s'est fait berner et ça m'étonnerait qu'il en reste là.

MEXICOOù les histoires vivent. Découvrez maintenant