Les Sources Originelles - II [TERMINE]

Chapitre 2 ~ Dhara

Je me réveille en sursaut, et en sueur. Assise sur le canapé, je me prends la tête dans les mains, et tente de calmer les pulsations de mon coeur ainsi que ma respiration.

Depuis trois jours, je ne dors pratiquement plus alors que j'en ai grandement besoin. Mais dès que je ferme les yeux, je vois toujours la même scène horrible qui se joue devant moi, alors que je suis totalement impuissante. C'est comme un cauchemar qui se répète en boucle... si seulement s'en était un....

Un souvenir serait plus juste.

Une fois calme, je regarde l'heure. 6h45. Il est encore tôt mais je n'arriverai pas me rendormir. Je décide de me lever pour aller faire couleur du café. Tout doucement, je me dirige vers la cuisine. Comme je peux avec mon bras gauche, je réussis à préparer la cafetière et la mets en route. Je m'adosse au plan de travail et laisse mon regard cerné faire le tour du petit appartement.

Celui d'Aydan.

J'espère que lui et Neven vont bien.

Après l'explosion, j'ai perdu connaissance. Quand je me suis réveillée, un bout de plafond bloquait mon épaule gauche. J'ai réussi tant bien que mal à me dégager, et j'ai cherché les autres dans les décombres. La première, et malheureusement la seule que j'ai retrouvé, fut Bulle. Encore inconsciente, je l'ai sorti comme je pouvais de là où elle était pour la déposer dans un coin plus sûr, et je suis retourné faire des recherches. Mais même après un temps fou, je n'ai trouvé personne d'autre. A bout de force, j'ai rejoins Bulle, qui commençait doucement à émerger. Après avoir vérifié qu'elle pouvait tenir sur ses deux jambes et qu'elle n'ait pas de blessures mortelles, j'ai pris la décision d'aller chez Aydan. C'était le seul endroit dans lequel on pouvait se reposer tranquillement, sans inquiéter qui que ce soit. Et puis, avec un peu de chance, on tomberait sur les deux garçons.

Mais ce ne fut pas le cas.

Une fois devant la porte, deux choix s'offraient à moi : crocheter la serrure, ou défoncer la porte. Pour le premier choix, je ne savais vraiment pas du tout comment faire, c'est pour cela que je me préparais au deuxième. Bulle me surprit en sortant le double des clefs de derrière la plante du palier. Je l'ai remercié d'un regard parce que je n'aurais pas eu la force de la défoncer et j'ai ouvert la porte puis l'ai refermée derrière nous. Je me suis vite rendu qu'il n'y avait personne à l'intérieur. Mais j'avais d'autres choses en tête pour le moment, comme nos blessures à Bulle et moi. J'ai donc installé mon amie dans le lit d'Aydan, me disant qu'elle aurait besoin de plus de repos que moi à la vue de son état.

Je suis sortie de mes pensées par Bulle qui rentre dans la cuisine, et s'assoit sur une des chaises.

- Hey Bulle, tu as bien dormi ?
- Pas vraiment, et toi ?
- Moi non plus à vrai dire, je soupire. Et tu te sens comment ?
- Un peu mieux, me reposer depuis trois jours m'a fait du bien, même si mon corps me fait encore mal. Et ton épaule ?
- La douleur est un peu moins vive, mais je ne peux toujours pas bouger mon bras. Je pense que ça doit au moins être fêlé.
- Je suis désolé Dhara....
- Ce n'est pas ta faute Bulle, et tu le sais très bien. On est au bout physiquement et psychologiquement, alors ça doit être normal.
- Si tu le dis....
- Du café ?
- Je veux bien, merci.

Tout en nous servant des tasses, je réfléchis à un autre souci qui nous est tombé dessus peu de temps après l'accident. Depuis que nous sommes arrivés ici, après l'attaque du gymnase, nos pouvoirs sont... défectueux ? Disons qu'ils sont très aléatoires, voir même quasi inutilisables pour le moment. Et Bulle s'en veut de ne pas avoir réussi à soigner mon épaule. De plus, le fait que nous n'ayons aucunes nouvelles d'Aydan et de Neven commence sérieusement à nous inquiéter. Même si Bulle n'en discute pas avec moi de vive-voix, j'ai bien remarqué l'inquiétude dans ses prunelles bleus ternes de fatigue. Enfin, je ne dois pas être mieux de mon côté. En jetant un coup d'oeil à la jeune fille, je remarque qu'elle est aussi plongée dans ses pensées.

- Tu penses que les garçons vont bien ? Me demande-t-elle d'un ton triste.
- Je n'en doute pas, surtout s'ils sont ensemble. Ils se protègent l'un l'autre quoi qu'il arrive, je tente de la rassurer.
- Ce n'est pas faux. Mais tu ne trouves pas ça bizarre que l'on ait aucunes nouvelles ? Même pas un SMS ?
- Ils ont dû perdre ou abimer leurs portables dans l'explosion, nous aussi les nôtres sont morts.
- Hum.... Ce n'est vraiment pas pratique en tout cas.
- Je sais bien Bulle, mais nous sommes encore trop faibles pour tenter quoi que ce soit pour les retrouver.
- On pourrait au moins passez chez Neven ? Peut-être qu'ils y sont vu qu'ils ne sont pas rentrés chez Aydan. En plus la mère de Neven est infirmière il me semble, et-
- Bulle, tu sais très bien ce que j'en pense. Moi aussi je suis inquiète pour eux. Mais s'ils sont là-bas ils ne risquent rien. Et si ce n'est pas le cas, connaissant Aydan, il aurait tout fait pour mettre Neven en sécurité. Je comprends ton sentiment d'impuissance, je ressens le même. Mais nous sommes en situation de crise, et le moindre faux-pas pourrait nous être fatal. Sachant qu'en plus nous n'avons plus de moyens sûrs de défense.

Au fur et à mesure de mon discours, je vois les yeux de Bulle s'imbiber d'eau, et des larmes finissent par couler. Bien que ça me fait de la peine de la voir dans cet état, je suis heureuse qu'elle laisse enfin tout sortir. Depuis trois jours, j'avais l'impression d'être avec une éponge. Elle retenait tout en elle. Et enfin, elle laisse sortir toute la tension qui habite son corps. Pour lui montrer mon soutient, je la prends dans mes bras - mon bras - et frotte son dos doucement avec ma main valide. Sa tête calée dans mon cou, je sens mon haut s'humidifier de larmes.

Des larmes de tristesse, d'inquiétude, d'espoir, de douleur, de fatigue, et d'encore tellement d'autres sentiments mêlés.

Et sans même m'en rendre compte, mes yeux laissent à leurs tours des larmes salées s'échapper.

Tu es aussi humaine Dhara, toi aussi tu as des choses à exprimer.

Je ne sais pas combien de temps nous avons pleuré dans les bras l'une de l'autre, mais une chose est sûre, c'est que nous en avions besoin.

Il est maintenant environ 13 heures, et je me mets au fourneau, histoire d'avoir quelque chose dans le ventre. Notre corps à besoin d'énergie pour se remettre plus vite.

Alors que je suis concentrée sur ce que je suis en train de faire, il me semble entendre une porte s'ouvrir. Etonnée, je regarde Bulle pour vérifier qu'elle soit toujours avec moi, et en effet, c'est le cas. Elle me rend un regard surpris et légèrement inquiet. Mais quand un bruit sourd retenti dans l'entrée, je me précipite dans le hall pour voir ce qui ça peut bien être, suivis de Bulle.

Mais en voyant le corps inconscient à terre, je m'arrête net.

Aydan.

Bulle me sort de ma torpeur en se jetant sur le jeune homme au sol, en hurlant.

- Aydan ?!
- ....
- Aydan réveille-toi !
- ....
- Aydan !