Les Sources Originelles - II [TERMINE]

Chapitre 20 ~ Neven

Je dors depuis un moment maintenant. Et chose étrange, j'ai conscience que je dors. Pourtant mon sommeil semble être réparateur, ce qui est encore plus bizarre.

Alors que je suis plongé dans une obscurité infinie et apaisante, une aura lumineuse se rapproche tranquillement de moi, éclaircissant en même temps le lieu où je me trouve et en une fraction de seconde, je me retrouve au centre d'un ciel étoilé, illuminé par la douce lueur de la lune et les éclats scintillants des étoiles. Le paysage est à couper le souffle, et pour la première fois depuis un certain temps déjà, je me sens apaisé et serein. C'est comme si j'étais de nouveau complet. De nouveau moi-même.

Perdu dans la contemplation de cette nuit majestueuse, une légère brise vient caresser ma peau et jouer avec mes cheveux, laissant des frissons parcourir mon corps. Je ferme les yeux pour profiter encore plus de cette sensation revigorante de fraicheur, et sans rien contrôler, un petit sourire vient fendre mon visage. Plus je me concentre sur les mouvements de l'air qui m'entour qui prend de plus en plus d'ampleur, plus je m'oublie, faisant taire ma conscience et laissant mon esprit et mon âme se libérer.

Le vent augmente en puissance, mais c'est comme si mon corps n'était pas physique et que je ressentais la force de l'air sans pour autant en subir les conséquences. Petit-à-petit, je capte des murmures, presque inaudibles au début, qui semblent venir du vent. En me concentrant, je parviens à capter des mots, puis des phrases.

Je reconnais cette voix.

Comprenant à qui j'ai affaire, j'ouvre mes yeux qui étaient restés clos jusqu'à présent, et tombe nez-à-nez avec une forme humanoïde entièrement composée de mouvement d'air plus ou moins puissants. Je fais rapidement le lien entre la voix qui résonne dans le ciel et celle qui me fait face.

L'Essence de l'Air.

- Neven ?
- Oui ?
- Il faut que tu te reprennes, tes amis ont besoin de toi. Nous avons besoin de toi.
- A quoi bon ? Ceux que vous appelez "amis" m'ont abandonné.
- Et quelles preuves as-tu ?
- Quelques-unes qui sont très parlantes....
- Neven, n'oublie pas une chose importante. Il n'existe pas de Vérité unique, mais au contraire, une multitude. Ce que tu sais est peut-être vrai, mais tu n'as eu qu'un seul point de vue, et qu'une seule version des faits, n'est-ce pas ?
- Oui, mais-
- Pourquoi est-ce que tu t'entêtes à ne pas ouvrir les yeux ? Tu n'as pas confiance en lui ?

Des larmes commencent à perler à mes yeux. Tout ce que je gardais pour moi, toute cette souffrance qui m'empêchait de réfléchir et d'être réellement ancré dans la réalité.... Je laisse tout s'échapper et éclate en sanglot. L'Essence ne bouge pas d'un millimètre, mais je sens néanmoins une brise m'envelopper, comme une mère viendrait réconforter un de ses enfants, en silence.

Je ne sais pas combien de temps je pleure, mais je finis par me calmer. Mes larmes se tarissent seules et voyant que je suis de nouveau apte à la discussion, Elle me repose sa question.

- Neven, est-ce que tu as toujours confiance en Aydan ?
- Je ne sais pas trop....
- Pourquoi est-ce que tu ne lui demande pas tout simplement ce qu'il s'est passé ?
- J'ai peur.... Peur qu'il n'ait pas d'explications, peur qu'il m'ait bel et bien abandonné là-bas, peur qu'il n'en ait plus rien à faire de nous.
- Et tu le penses vraiment capable de faire cela ? Pourquoi préfères-tu croire notre ennemi plutôt que la personne avec qui tu es complémentaire ?

Sa question me fait l'effet d'un coup de masse, et résonne dans l'entièreté de mon corps.

C'est une très bonne question.

- Je ne peux pas te forcer à redevenir comme avant, et je ne suis pas en mesure de dire si ça arrivera un jour. Mais ne gaspille pas le temps qu'il vous reste. Il est précieux. Chéris-le.

Et sur ce, le vent se disperse, et je fais de nouveau face au ciel nocturne. Mon regard se perd dans ce bleu presque noir, et ces petites perles luisantes éparpillées dans chaque recoin.

Comme si mon esprit en avait la nécessité, je reste là, immobile, profitant de ce calme omniprésent. J'inspire une grande bouffée d'air, comme pour me reconstituer, me réapproprier ce que je suis au fond de moi. Je ne sais pas combien de temps je reste ici, dans cette position et dans ce monde onirique.

Mais une chose est sûre.

Ce qui m'attend au réveil sera loin d'être aussi calme.