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𝟔

Mathieu.

La première information que mon cerveau m'envoie, c'est la douleur des rayons du soleil qui me crament la rétine dès que j'essaie d'ouvrir les yeux. Ensuite, il lui faut plusieurs secondes pour me rappeler chez qui le me trouve, et un peu plus temps pour que je puisse m'asseoir non sans soupirer. J'ai rarement dormi dans un canapé aussi confortable que celui d'Anna. Je ne me souviens même pas m'être endormi avant de me faire réveiller par mes fringues qui me gênaient. Quand ma vision s'est faite à la lumière du jour, je chope mon téléphone et voit qu'il va être 15h. J'ai de nouveau l'impression d'être un adolescent qui aurait bien besoin d'une bonne dizaine d'heures de sommeil en plus. Au loin, je reconnais la voix de Marianna, et c'est juste pour voir ce qu'elle fait que je trouve le courage de me lever. Après avoir renfiler mon jean, je me dirige vers les petits bruits que j'entends.

Dans la cuisine, le fil de ses écouteurs me fait comprendre qu'elle chante et qu'elle ne m'entend pas arriver. Ses cheveux sont tressés, elle a un short de sport moulant et un débardeur à grosses bretelles. C'est les paroles de Travis Scott qu'elle semble débiter pendant qu'elle s'affaire devant la gazinière. Alors je ne réfléchis pas et m'assieds sur un des hauts tabourets de la cuisine, pile dans son dos. Un sourire de connard naît sur mon visage et je nous vois d'un œil extérieur, clichés comme jamais, et vois bien que lorsqu'elle se trouve dans son monde, on ne peut pas la déranger. D'un coup, elle lève les mains en l'air, une cuillère en bois dans la gauche et je me retiens d'exploser de rire. Mais elle est si belle de dos que je suis curieux de savoir ce qu'elle fait. Mes phalanges tapent durement sur son comptoir, le bruit résonne dans toute la pièce et elle sursaute dans un cri.

- Putain mais t'es con ! J'ai eu super peur, dit-elle une main sur le cœur en retirant ses écouteurs. T'es là depuis quand ?

- Je suis réveillé depuis cinq minutes et j'ai entendu que ça chantait ici.

- J'ai vraiment eu peur, elle récupère sa cuillère tombée par tête pour la rincer dans l'évier. T'as faim ?

- Carrément, qu'est-ce que tu fais ?

- Le meilleur remède à la gueule de bois, s'exclame-t-elle fièrement. Pâtes carbonara.

- Ça fait un bail que j'en ai pas mangé ! j'annonce.

- Fait maison ! Fallait que je m'occupe, je suis debout depuis une bonne heure.

- Je vais squatter plus souvent si tu fais les repas tous les jours, je souris.

- T'as bien dormi ?

- Ouais, super confortable ton canapé, d'ailleurs. Toi ?

- Je n'avais pas été aussi fatiguée depuis longtemps mais c'était vraiment cool hier, me dit-elle en posant une tasse à café devant moi.

Je hoche la tête pour la remercier et la regarde se remettre aux fourneaux. Même au réveil, elle est belle. Elle est même mille fois plus jolie au naturel. Bien-sûr, je ne lui dirai pas.

- Tu veux un coup de main ? je lui demande.

- Prends les assiettes dans le placard là, elle pointe la porte au-dessus du four, et les couverts sont dans le tiroir à côté du frigo.

Quand j'ai tout installé sur le comptoir, elle pose la casserole pleine puis disparais en me demandant de me servir. Je nous sers tous les deux et, quelques secondes plus tard, de la musique se déclenche en fond.

- Je ne supporte pas le silence, elle m'indique en revenant.

- C'est super bon, j'annonce après une première bouchée.

- Comme t'as prévu de revenir, t'aime les zapiekanka ?

- Tu sais faire des plats typiques polonais ?