Chapitre 3 : Ma force

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« Frère, arrête de la téma comme aç, elle va finir par prendre peur ! Même moi tu me fous la trouille ! ». La voix inquiète de Ken arracha Tarik de ses pensées.

En réalité, Tarik ne réfléchissait plus. Son corps et son esprit étaient passé en mode automatique. Il ne s'était même pas aperçu qu'il s'était assis et n'avait pas détourné son regard d'elle.

« Alors, t'en penses quoi ? Ça faisait longtemps que je pensais changer de couleur pour une plus vive, plus éclatante. Mais si j'avais su, j'aurais attendu demain... Car les frangins Akrour ont réussi à trouver des motos cross et même trial et je compte bien vous prouver que je vais tout défoncer ! ». Tarik adorait l'entendre parler, surtout parce que lorsqu'elle s'adressait à l'un des gars, elle le regardait toujours.

Or, ce matin-là, Tarik mit un peu de temps à comprendre toutes les informations qu'elle venait de débiter. Puisqu'en réalité, il n'avait qu'une envie, celle de passer ses mains dans ses cheveux. Il se ressaisit enfin quand il lui répondit : « C'est chanmé. J'aime ienb, c'est différent. ». Tarik avait du mal à ne pas l'observer. Elle provoquait sur lui la force d'attraction d'un aimant.

Puis, dix minutes plus tard, Nabil les rejoignit et Tarik vit avec tristesse que son frère fit ce qu'il n'avait pas osé, à savoir prendre délicatement entre ses doigts une des mèches de ses cheveux.

Nabil avait toujours été celui qui était arrivé à serrer le plus de meufs grâce à son tempérament : « C'est quoi le programme de la journée ? Je parie répèt car ce soir c'est l'un des plus gros shows... Je sais aps si je vais réussir à me mettre dans ma bulle avec l'envie des motos... ». La voix de Nabil fit ouvrir à Tarik les yeux. Il ne s'était même pas aperçu qu'il les avait fermés.

Bien sûr, il ne restait que lui et son frère à table. Peu de minutes devaient s'être écoulées car Tarik pouvait entendre sa voix et celle de Ken dans le bus. L'un d'entre eux faisait la vaisselle.

En réalité, ce qui avait naturellement attiré l'attention de tous étaient les motos qu'avaient ramenées les frères Akrour. Ils ne faisaient rien d'illégal, juste des dérapages sur le gravier.

« Les gars, vous êtes prêts à vous prendre la raclée de votre vie ? ». Sa voix arriva de manière audible aux oreilles de Tarik. En effet, elle venait de descendre du bus. Sauf qu'au moment où elle passa devant lui, il put voir qu'elle avait enfilé la tenue du motard. Elle était vêtue d'un casque, de gants, d'une veste, d'un pantalon et des bottes. Bien sûr que cette tenue lui allait bien, mais...

« Attends, stop... Tu vas faire quoi là ? ». Tarik s'était relevé si brusquement de sa chaise qu'il en fut pris éphémèrement d'étourdissements.

« Tu n'as pas écouté ? Je vais reprendre la moto. Ça fait longtemps que je n'en ai pas fait mais je vous le promets : je ne roulerai pas vite. ». Elle prononça la fin de la phrase avec difficulté, car elle venait d'attacher son casque. Tarik ne comprenait rien à ce qu'il se passait car tout la situation se déroulait beaucoup trop vite sous ses yeux. D'ailleurs, elle venait de démarrer la moto trial avec une facilité déconcertante et se tenait debout dessus comme si elle en faisait quotidiennement.

C'était une jeune femme de moins de 25 ans qui était indépendante, écoutait du rap avec son Walkman, avait accepté de faire une soirée avec les artistes qu'elle admirait le plus, avait dormi sans aucune crainte dès la première nuit avec Tarik, semblait être une organisatrice d'évènements hors-paires, était secouriste, chantait et dansait comme si personne ne l'observait, était une excellente cuisinière, avait regardé avec plaisir du foot, avait une culture générale incomparable et s'y connaissait en sport automobiles. En moins d'une minute, Tarik avait réussi à faire un court condensé.

Aux noms des siens - PNLOù les histoires vivent. Découvrez maintenant