Chapitre 2 : Ça va ensemble

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Quatorze février, dernier semestre à deux mois du terme. Tarik envoyait toute son impatience dans les coups vifs et vigoureux du rouleau de peinture. Depuis hier, il s'était lancé dans l'aménagement de la chambre de Noah.

A présent, il peignait une deuxième fois les murs dans les couleurs de la « galaxie PNL » comme Giorgiana aimait si bien le dire. Malgré toutes ses teintes rouges, bleues, violettes et vertes, le résultat était en réalité plutôt pas mal. En effet, elle et lui avaient longuement discuté du projet d'aménagement. Elle s'occuperait de toute la décoration dans les détails tandis que lui réaliserait le plus gros du chantier, à savoir les peintures et le montage des meubles. Ils avaient déjà assemblé la table à langer, la commode, l'armoire, le landau et ne manquait donc plus que le lit. Enfin, le berceau.

Giorgiana venait d'arriver dans la pièce avec deux grands verres d'eau fraîche citronnée qu'elle avait comme toujours concoctée elle-même. Aujourd'hui, elle était habillée d'une jolie salopette en jean qui, malgré qu'elle le veuille, mettait en valeur son ventre rebondi.

Ces derniers jours, Giorgiana avait eu mal aux reins et ainsi, seule l'action de rester debout et de marcher un peu la soulageait : « Je comprends enfin ce que Inès voulait dire la première fois que je l'ai rencontré. J'ai un peu mal au niveau de la ceinture abdominale qui me tire... », dit-elle en s'asseyant à moitié sur le tabouret. Tarik la croyait plus que jamais car dans la vie quotidienne, elle n'était vraiment pas le genre de femme à se plaindre.

Giorgiana était unique, pensa Tarik en s'octroyant une légère pause. Dans l'appartement raisonnait une playlist de rap, la sienne dont elle avait rassemblé toutes les époques.

« J'étais certaine que ces nuances allaient bien ressortir... Ça va ensemble, j'aime beaucoup. ». De toute façon, Giorgiana avait un don pour prévisualiser les coloris, n'importe qu'ils allaient être apposés sur un dessin ou sur un mur. « Tu te remémores lorsqu'on a acheté tous ces pots ? », sourit-elle en désignant ces derniers d'un geste de la tête.

Il était évident que Tarik s'en souvienne puisque jamais il n'aurait cru dans sa vie faire de tels achats. Sa vie actuelle ne ressemblait en rien à tout ce qu'il avait toujours vécu, même s'il ne s'en plaignait pas. Effectivement, l'appartement était rempli de trois principes qu'il considérait comme essentiels à la vie, à savoir sa passion du rap avec tous ces disques de récompense, sa femme avec ses affaires et naturellement son fils qui allait bientôt les rejoindre.

Dans le petit univers que ses parents construisaient comme un nid, un cocon, Noah trouverait sur les murs de belles photos, celles notamment de ses oncles et surtout de lui pas encore tout à fait né.

De fait, Giorgiana n'avait pas souhaité réaliser des photographies de grossesse. Elle ne trouvait pas cela utile de montrer et afficher son ventre nu, surtout en respect des femmes qui ne voulaient pas d'enfants, celles qui ne pourraient jamais en avoir ou encore celles ayant des difficultés à procréer.

A jamais, Tarik respecterait ses choix. Lui non plus ne trouvait pas forcément utile d'immortaliser à jamais cette période-là. Il préférerait toujours activer son cerveau pour se remémorer et ressentir de nouveau toutes les saveurs, émotions et sensations qui lui provoquaient un bien fou.

Cependant, restant jusqu'à la fin de ses jours un Andrieu, la mauvaise foi de Tarik le fit bougonner : « Zebi, comment veux-tu que j'oublie R ? Quelle idée de faire du shopping le jour de la Saint-Valentin ? ».

En réalité, Giorgiana et Tarik ne prêtaient aucunement attention à toutes les fêtes commerciales. Ils s'étaient simplement rendus dans les magasins de bricolage et de nurserie parce que ce jour-là était une bonne journée pour passer le dernier cap des achats finaux.

« En ce jour spécial des amoureux, j'ai le plaisir de vous annoncer que vous avez le droit à une remise de 25%. N'empêche, aucun rabais ne doit être pris à la légère, surtout quand on a la volonté d'acheter une voiture... », sourit Giorgiana en imitant d'abord l'hôtesse de caisse puis en se moquant gentiment de son mari.

« Je veux une vago de daron. ». Tarik voulait changer de véhicule pour s'offrir une belle berline. Il voulait que son fils arrive et soit présenté dans l'un des plus épurés et ainsi chers modèles. Il aimait les belles choses et ainsi, continuait à dépenser son argent dans les sapes, les lunettes, les accessoires, les chaussures sans évoquer la graille.

Giorgiana s'était mise d'accord avec Tarik pour poursuivre sa nouvelle activité dans l'événementiel. Semblable à tous les secteurs, ce dernier présentait des inconvénients mais aussi certains avantages, comme celui de pouvoir travailler à domicile. Ainsi, par son statut privilégié de côtoyer les rappeurs dont elle s'occupait, elle profiterait de cette possibilité d'au moins pour trois ans arrêter partiellement son activité. Au début, Tarik n'avait pas forcément trouvé cette idée très bonne de devenir mère au foyer très bonne. Puis, à force de réflexions et débats, elle l'avait finalement convaincu de la nécessité que leur fils soit bien éduqué afin qu'il devienne une bonne personne avec des valeurs. Grandir dans le zoo mais être bien entouré pour le faire.

Aux noms des siens - PNLOù les histoires vivent. Découvrez maintenant