Chapitre 2 : Le Bijoutier

476 34 105
                                    

« Serre fort fort fort ! ». Sa voix, si d'ordinaire douce et peu portante, s'était tout à coup transformée. Elle s'était mise presque à crier et Tarik pouvait sentir une pointe d'ambition dans sa tonalité. Il venait de se retourner alors qu'auparavant, il faisait dos à la fosse encore vide de festivaliers.

C'était le genre d'après-midi d'été où il ne faisait pas trop chaud, mais où il était aussi toujours agréable de se rafraîchir dans des batailles d'eau. Naturellement, après le passage de L'Entourage, la scène était déjà trempée et pour l'instant, seule la pelouse avait été épargnée.

C'était sans compter sur la partie de rugby improvisée, qui se transformait peu à peu en une stratégie guerrière sur champ de bataille. Pourtant, le match avait bien commencé. En effet, depuis quelques temps, certains techniciens s'étaient rendus compte qu'elle jouait souvent au rugby avec leurs enfants. C'était une passionnée de ce sport, n'hésitant pas à contester les décisions des arbitres.

A présent, grâce à la stratégie qu'elle venait d'expliquer, sa petite équipe formait un maul pour charger les joueurs en face qui venaient de déclencher les hostilités.

Comme à son habitude, Tarik prit soin de toujours avoir un œil discret sur elle pendant qu'il était en train de peaufiner les derniers détails pour le show du soir. Même si elle avait pris une place plus que primordiale et indispensable dans sa vie, Tarik Andrieu gardait quand même toujours en lui une part d'Ademo. Qu'importe ce qu'il en disait, le rap était devenu sa vie.

Tarik ne vit pas le temps passer. Lorsqu'il détourna les yeux de la scène, il se rendit compte que la nuit était déjà tombée. Cependant, tous étaient encore dehors, dont elle qui s'était changée pour une tenue plus adaptée à ce loisir qu'elle affectionnait temps. Même avec une tenue de club sportif, il la trouvait belle. C'est ainsi qu'une idée lui vint en tête...

...

Se couper les cheveux. En revenir à ses boucles naturelles d'algérien, de kabyle. Cela faisait longtemps que Tarik y pensait, notamment la nuit quand il se réveillait en sueur.

Alors qu'elle aussi craignait la chaleur, elle préférait éteindre la climatisation la nuit pour laisser les fenêtres ouvertes. Dans ces cas-là, Tarik se levait et allait passer sa tête sous l'eau froide du robinet de la salle de bain.

Son corps devait s'habituer petit à petit car les gouttes perlant sur son front ne le réveillèrent qu'à l'aube ce matin-là. Alors, dans un élan de pulsion dont seul Tarik était capable, il se leva, alla se rafraîchir, se servit un café froid et parti en direction de la loge coiffure-maquillage en moins de quinze minutes.

Dans les festivals, Tarik savait que ces professionnels proposaient leur service assez tôt, vers huit heures, notamment en raison du nombre d'artistes et surtout à cause de la chaleur qui s'installait vite.

Tarik fut heureux de constater qu'il était le seul artiste à être réveillé à cet horaire-là et d'avoir un coiffeur - Ibrahim - aussi loquace que lui. En deux instructions, il lui indiqua la coupe courte qu'il voulait, puis fut satisfait de voir qu'en moins de vingt minutes, sa coiffure fut réalisée.

Pendant que Ibrahim alla ranger son matériel, Tarik se regarda un instant dans le miroir. Il ressemblait à son papa mais en beurre, il était plus Nabil que Tarik et semblait avoir pris dix ans. Étrangement, il se trouva beau avec sa peau bronzée, ses yeux déterminés... Puis, sa seconde pensée fut pour elle. Qu'allait-elle en penser ? Le trouvera-t-elle toujours aussi...

Tarik interrompit ses pensées quand il décida de réellement agir en se levant de sa chaise pour enfin connaître son avis. Avant cela et naturellement, il remercia Ibrahim d'une simple phrase en lui laissant un billet. Puis, il se dirigea vers les bus.

Aux noms des siens - PNLOù les histoires vivent. Découvrez maintenant