Un bruit sourd et rythmé lui déchirait les oreilles. Elle n'arrivait pas à ouvrir les yeux, ni à bouger pour en chercher l'origine, mais elle avait envie de tressaillir à chacune des occurrences, comme un coup de tonnerre contre ses tympans. Il lui fallut des heures, immobile, sans défense, aveugle, pour comprendre qu'il s'agissait du son produit par les pulsations de son cœur. Un gémissement d'angoisse pure se forma dans sa gorge et résonna si fort à l'intérieur de son crâne qu'elle eut l'impression que sa tête se fendait en deux. Il y eut un bruit de tissu froissé qui gronda comme un orage, un contact brûlant sur son front, et elle replongea dans l'inconscience.
Il y eut plusieurs autres tentatives d'éveil, qui se terminaient toutes de la même façon. À chaque fois, elle se sentait un peu moins hypersensible, elle avait un peu moins l'impression d'entrer en combustion spontanée, mais cela ne semblait pas suffire à la personne qui s'occupait d'elle. Elle essaya parfois de communiquer, mais quiconque se chargeait de ses besoins et de sa santé l'assommait à nouveau avant qu'elle parvienne à former un mot sur ses lèvres gercées. Au moins, au bout de huit éveils, elle ne souffrait plus, même si elle se trouvait à la limite entre surstimulation et douleur.
— J'ai fermé les rideaux, dit une voix féminine à quelques mètres de distance. Tu peux ouvrir les yeux, doucement.
Elle... Elle reconnaissait cette voix. Ses paupières frémirent mais ne s'ouvrirent pas tout de suite – elle ne parvenait pas à commander son corps comme elle le voulait. Après une paire de minutes passées à tenter de faire ce que la voix lui conseillait, elle y parvint enfin. Elle voyait un plafond lisse d'une couleur claire non-identifiée dans la semi-obscurité. Il lui fallut encore un moment pour réussir à tourner la tête. Elle vit des cheveux roses attachés en queue de cheval, des épaules portées fièrement et l'arrière d'une tenue d'infirmière.
— S-Sakura ?
Elle tressaillit au son rocailleux et usé de sa propre voix. Il lui fallut un effort presque ridicule pour passer sa langue pâteuse sur ses lèvres. Sakura se retourna, le regard adouci par un mélange d'inquiétude et de compassion. C'était – c'était elle qu'elle regardait comme ça. Soudain tout lui revint, comme si son esprit cessait de la protéger de ses propres souvenirs : la souffrance sans nom au fond de la grotte, ses hurlements, l'agonie sans nom qui lui parcourait le corps sans zone d'ombre ni répit. Elle réalisa qu'elle tremblait dans son lit d'hôpital, que ses dents s'entrechoquaient dans un bruit de fin du monde – en tout cas à ses oreilles.
— Chhhh, calme-toi, Hitomi. Tout va bien, tu es en sécurité à Konoha.
Oui, elle le savait : elle reconnaissait l'odeur particulière de l'air, un peu plus fraîche qu'ailleurs à cause des Chênes d'Hashirama qui peuplaient les forêts alentours en nombres presque ridicules, l'ameublement d'une chambre de l'hôpital du village, qu'elle avait bien trop souvent visité à son goût. Pourtant le sentiment d'horreur ne se détachait pas d'elle, mordant ses membres affaiblis comme le ferait une meute de loups en chassant sa proie.
— Tu dois avoir énormément de questions, alors je vais t'expliquer tout ce qu'il s'est passé, d'accord ? D'abord, je veux juste que tu essayes de boire un peu. Ce n'est pas grave si tu t'endors pendant que je parle, je pourrai tout te répéter la prochaine fois que tu te réveilleras. Tu es d'accord avec ce programme ?
Elle réussit à acquiescer malgré la tension dans les muscles de sa nuque, qui semblaient prêts à se rompre. Un petit sourire triste dansa sur les lèvres de Sakura et elle saisit un gobelet sur la petite desserte installée près de la fenêtre. Il lui fallut quelques instants à pester contre l'emballage stérile avant de garnir le gobelet d'une paille et de présenter celle-ci aux lèvres d'Hitomi, qui but comme s'il s'agissait d'une bénédiction. Elle obéit à l'injonction de Sakura, qui lui demandait de ne pas trop s'abreuver d'un coup, malgré le soulagement que lui apportait l'eau pas tout à fait froide – nul doute que le choc de température aurait été douloureux.
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Quelque chose s'achève, quelque chose commence - Partie 2 : Shippuden
FanfictionAprès sa mort, Hitomi se réveilla dans un monde où les conflits se règlaient à torrents de feu et mers de boues envoyés à la figure d'un adversaire. Puisqu'elle n'était alors, à ce moment-là, qu'un bébé, elle décida de profiter de cette période pour...