Ce qui peut mal tourner

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Le temps d'un battement de cils et elle rouvrait les yeux. Elle voyait un sol en béton et rien d'autre – ses cheveux, comme un rideau, lui coupaient la vue. Un corps lourd la plaquait sur le ventre contre la surface froide et dure, les genoux en travers de ses bras pour lui ôter toute possibilité de se libérer. Le tranchant d'un kunai caressait sa gorge. Elle ferma les yeux, se détendit, et laissa un chakra dont elle n'avait juste ici connu que le fantôme envahir ses sens.

— Tobirama-san, murmura-t-elle d'une voix rauque.

Il l'empoigna par le col, se redressa juste le temps de la faire rouler sur le dos et se rassit sur elle, lui coupant à nouveau le souffle. Il jaugeait parfaitement la force et le poids nécessaire pour limiter son apport en oxygène sans la tuer – et le kunai contre sa carotide ne s'était pas écarté d'un millimètre.

— Tobirama-san ? gronda-t-il. Pour qui tu te...

Il se figea quand il vit son visage, vacilla puis se prit soudain la tête entre les mains, les traits tordus de douleur. Elle ne pouvait pas bouger, elle ne pouvait pas l'aider. Ce n'était pas par manque d'envie, ça, c'était certain. Elle ferma les yeux quand elle entendit un long gémissement tourmenté s'imposer entre ses lèvres. Cela dura quelques dizaines de secondes. Quand ses yeux rouge sombre se rouvrirent, une terrible réalisation les hantait.

— Hitomi. Le sceau... A échoué. J'aurais dû voir l'erreur plus tôt, j'aurais dû...

— Quelle erreur ?

— Dans la dernière partie, celle que je n'ai pas vue, tu as utilisé des glyphes que tu as trouvés dans mes carnets, pas vrai ?

Il la débarrassa de son poids et du kunai, s'asseyant à côté d'elle à hauteur de ses épaules. Elle ne se redressa pas, rendue nauséeuse par ce qu'il sous-entendait. Elle ne... faisait pas d'erreur. Pas elle.

— Ou-oui, chuchota-t-elle malgré tout.

Comme si le dire à mi-voix rendrait les conséquences moins réelles. Moins graves. Et quelles conséquences exactement ? Il... Portait la vaste robe blanche des Hokage par-dessus son armure. Pas mort. Pas encore. Pas encore.

— Tu n'as pas écrit en miroir celui du transfert. La ligature est plus naturelle dans sa position originale, mais pour transférer de l'intérieur vers l'extérieur, tu dois...

— ... l'écrire en miroir. Oh, par l'Ermite... Comment est-ce que j'ai pu faire une erreur pareille ? Comment...

Il sembla déstabilisé par la panique qui perçait dans sa voix. Il posa une main sur son épaule, comme si un simple contact pouvait la réconforter. Des larmes lui montèrent aux yeux, amères, brûlantes. Quelques instants plus tôt, il n'avait même pas possédé la conscience de son existence. Le Tobirama du miroir et celui qu'elle avait devant lui s'étaient fondus en un seul...

— Tu es épuisée. Tu es épuisée depuis des mois malgré des nuits de sommeil complètes, déchirées entre plus de devoirs que tu n'as de doigts sur les mains. Tu as fait une erreur. Une erreur terrible, certes... Mais ça arrive.

À tout autre moment, sa voix apaisante aurait eu l'effet escompté sur elle. Elle avait l'habitude d'écouter les conseils et la sagesse qu'il lui offrait, c'était devenu naturel, instinctif, rassurant – elle s'attachait toujours tellement aux gens qui, autour d'elle, disposaient du sacro-saint savoir. Elle serra les lèvres pour réprimer un sanglot paniqué, ses larmes glissant le long de ses tempes et se perdant dans ses cheveux, dans les creux de ses oreilles.

— Il y a un moyen de partir, Hitomi. Tu le sais. Ton monde, ta réalité et ton présent ne sont pas perdus pour toujours.

Elle se redressa et posa sur lui un regard dur, empli de haine et de dégoût à l'encontre d'elle-même.

Quelque chose s'achève, quelque chose commence - Partie 2 : ShippudenOù les histoires vivent. Découvrez maintenant