𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟏 : 𝐋𝐞 𝐥𝐚𝐜𝐞𝐭

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Il n'hésita pas avant de s'emparer de la paire de derby sur le présentoir du dressing. Bien qu'il portât un t-shirt oversize tendu sur sa stature musculeuse, lorsqu'il enfilait un pantalon de costume, il optait toujours pour les derby. Pas de richelieu comme l'aurait fait son père, ni de sneakers comme son frère... en leur époque. Bien sûr, s'il avait porté un jeans, cela aurait été tout autre, mais cette idiote de Shelley n'avait pas jugé bon d'en ajouter à ses bagages, et il n'avait pas le temps d'acheter de tenue plus décontractée.

Les derby donc.

Il en retira les embauchoirs et s'assit sur le tabouret rembourré pour les enfiler. Pied gauche. Un nœud plat. Doublé. Un nœud Berluti. Pied droit. Un nœud plat. Doubl-... Ah ? Il contempla, perplexe, le morceau de lacet qui pendait lamentablement entre ses doigts. Il cligna le temps d'accuser le coup, inspira profondément en se redressant pour avaler la bouffée de frustration qui tiquait sous son œil droit.

« Monsieur Edge ? Monsieur Edge vous attend à la réception. » le prévint un employé qu'il n'avait pas entendu frapper. Dents serrées, il balança le bout de cuir vers l'étagère. « Merci, grinça-t-il en réponse. Vous auriez des lacets noirs pour une paire de derby quelque part ?

— Je... Je peux me renseigner, monsieur.

— Laissez tomber, j'n'ai pas le temps, se ravisa-t-il. Ce sera tout.

— Bien, monsieur. »

Il avisa les deux autres paires trônant face à lui. Des 574 noires, et... des putains ! de mocassins marrons ! qu'il abhorrait. Dernière fois qu'il ne faisait pas ses bagages lui-même ! se promit-il.

Dans un soupir, sa tête brune bascula contre le mur. Paupières closes, paumes sur ses cuisses relâchées, il observa une minute de silence à la mémoire du lacet. Lorsqu'il pu s'avouer qu'il amalgamait la colère contre le conseil d'administration à son problème dérisoire de chaussures, il se leva, ramassa veste et mallette, et quitta l'appartement de standing.

A sa sortie d'ascenseur, il repéra aisément la silhouette dégingandée de poulain de son cousin, avachi dans un fauteuil du hall. Ses jambes interminables lui servaient autant à pulvériser les records de cross qu'à faire trébucher les étourdis passant à proximité. Deux passions qu'il entretenait amoureusement.

Au-dessus de son masque chirurgical fleuri de pâquerettes (probablement dessinées de sa main), les yeux bleus semblables aux siens souriaient d'amusement avant de le repérer

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Au-dessus de son masque chirurgical fleuri de pâquerettes (probablement dessinées de sa main), les yeux bleus semblables aux siens souriaient d'amusement avant de le repérer. Lewis bondit de son siège. « T'as oublié ton masque, E-zy, dit-il en guise de salutations.

— J'suis immunisé.

— Moi, j'le sais. Mais c'est la loi ici.

— Vivement qu'on rentre, râla sourdement Ezra en fouillant les poches de sa veste de cuir. »

Il en sortit finalement un masque lavable froissé, l'accrocha derrière ses oreilles, et écarta les bras en demande sarcastique d'approbation. Le jeune homme acquiesça sans commenter la mauvaise humeur flagrante de son cousin. Il arriverait bien à le dérider. Il arrivait toujours à le dérider !

L'Étui Vide [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant