Chapitre 24 : Ryan / Tom

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New York ~ Juillet 1975

Elle passa près de moi, me jetant un regard furtif et je sus qu'elle voulait que je la suive. Je ne bougeais pas. Mitch la scrutait toujours, jusqu'à ce qu'elle disparaisse. Il me zieutait une seconde avant de retourner à sa conversation avec Kellan et je terminais ma bière d'une gorgée. Je posais la bouteille sur le comptoir et prit la direction de la jeune femme. Je voulais comprendre. Comprendre pourquoi je me retrouvais ici et non, chez mes parents. Comprendre comment tous ces souvenirs, qui n'étaient pas les miens, investissaient mon cerveau. Comprendre pourquoi je me sentais irrésistiblement attirer par cette femme.

J'entrais dans un couloir sombre et étroit, blindé de monde attendant leur tour pour aller aux toilettes. Certains me saluèrent. Je les ignorais, trop accaparer par la silhouette fluide qui s'enfonçait plus profondément dans l'obscurité, d'une démarche gracile. Ses cheveux bougeaient en rythmes de ses pas, caressant ses épaules. Sa robe blanche faisait ressortir son teint de pêche. Je ne pouvais ignorer ses courbes qui allaient avoir ma peau. Elle était réellement la femme la plus belle qui m'avait été donné de voir. Elle me faisait penser à une nymphe, tout droit sortir d'un conte.

Elle s'arrêta près d'une porte de sortie. Nous ne pouvions aller plus loin.Je vis ses épaules monter et descendre, signe qu'elle prenait une grande inspiration, avant de se retourner pour me faire face. Elle ne me regardait, tout d'abord, pas. Fixant ses chaussures à talons, elle soupira.

- Je ne te connais pas. C'est la première fois que je te vois. Tu es l'un des meilleurs amis de Mitch. Malgré tout cela, j'ai l'impression de te devoir des excuses. Pourquoi ?

Je constatais qu'elle était aussi perdue que moi.

- Je ne te connais pas. C'est la première fois que je te vois. Tu es la petite amie de l'un de mes meilleurs amis. Malgré tout cela, j'ai l'impression que tu m'as trahie en l'embrassant, qui plus est, sous mes yeux. Pourquoi ? répliquais-je ne cherchant pas à cacher ma frustration.

Elle releva la tête. Ses yeux étaient brillants de larmes.

- J'ai longtemps cherché un homme comme lui...

Je sentis la colère bouillir dans mes veines.

- Retourne-y alors, m'énervais-je. Pourquoi tu es là, avec moi, si tu l'aimes tant que ça ?

Secouant la tête, elle se recula sous la brutalité de mon intonation.

- Je n'en sais rien. Je le devrais mais je ne peux pas. Tu es un inconnu mais je ne supporte pas que tu sois en colère contre moi. Je ne supporte pas plus de t'avoir fait de la peine...

Je préférais rester silencieux. Je ne voulais pas la blesser par mes mots trop durs. Elle n'y était pour rien. Cela lui tombait dessus autant que moi. Je pris une grande inspiration pour me calmer puis fis un pas en avant. Je tendis le bras vers elle et posais ma main sur sa joue. Sa peau était aussi douce que je l'avais imaginé.Je ne me voyais plus la retirer. Elle ferma les yeux à mon contact et souffla.

- Que dois-je faire ? se questionna-t-elle.

- Être heureuse, répondis-je tout de même.

- Je ne peux pas le quitter pour une attirance immédiate. Je tiens à lui, se sentit-elle obliger à répliquer.

Ses mots me transpercèrent inexplicablement le cœur. Lorsque j'avais pris la décision de quitter Brianna, je n'avais pas ressenti de peine, juste un écœurement d'avoir perdu toutes ces années mais à cet instant, j'avais l'impression qu'elle me broyait le cœur. Je retirais, à contrecœur, ma main.

- Retourne-y, Megan. Va le retrouver.

Les yeux suppliants, elle avança, à son tour, d'un pas, si bien que nos deux corps n'étaient séparés seulement de deux centimètres.

- Je n'y arrive pas.

- Il le faudra bien.

Nous ne bougions plus d'un pouce, les yeux dans les yeux, je luttais pour ne pas me jeter sur ses lèvres. Des lèvres qui étaient miennes. Je le sentais jusque dans mes entrailles. Elle était à moi. Je devais, cependant, la laisser à un autre homme. La rage et la tristesse m'envahissaient par vagues à cette pensée.

- Pars.

Elle secoua, lentement, la tête avant que je sente sa main agripper la mienne. Une larme coula sur sa joue.

- Qu'est-ce que je dois faire ? me demanda-t-elle.

Je n'avais clairement pas mon mot à dire dans sa décision. Je ne disais, donc, rien et la laissais prendre son temps pour choisir ce qu'elle estimait ce qui serait le mieux pour elle. Malgré tout, mon être tout entier m'intimait de lui ordonner de le quitter et de me choisir car j'étais le seul et unique pour elle.

Elle souffla profondément puis relâcha ma main. Elle avait pris sa décision et mon cœur cessa de battre durant de longues secondes. Sans la connaître, sans comprendre ce qui pousse mon âme à elle, je me sentis chuter dans une spirale de néant tant la douleur de son choix me fit mal. Elle allait le rejoindre et poursuivre sa vie avec cet homme qui faisait partie intégrante de ma vie depuis dix ans. Il n'y avait plus de Tom ou de Ryan. Nous étions plus qu'une seule personne face à une douleur étouffante.

Elle passa près de moi, posa une dernière fois, sa main sur mon épaule puis pivota légèrement vers moi afin de me regarder.

- Je t'en supplie, ne t'enfuis pas. Je n'en ai pas pour longtemps.

Je ne compris pas immédiatement le sens de sa phrase alors qu'elle partait déjà en direction de la grande salle. Lorsque les mots firent leur chemin jusqu'à mon cerveau engourdi, je sentis naître l'espoir. Elle me choisissait.Elle allait, de ce pas, assumer ses responsabilités, seule. Cela ne pouvait en être ainsi. J'étais tout autant responsable de cette situation. Je la rattrapais alors et l'obligeais à se tourner. Immobile, ébahi par cette femme, je ne pus dire à quel point je me sentais chanceux. Elle agrippa mon visage à pleine main et déposa un léger baiser sur ma joue.

- Laisse-moi régler ça et je pourrais te donner plus. Je pourrais tout te donner.

- Je viens avec toi.

Elle ne semblait pas surprise. Elle reprit son chemin, moi sur ses talons. J'allais certainement perdre un ami, ce soir. Cela m'attristait mais je ne pouvais pas laisser passer la chance qui m'était offerte. Je le savais. Je n'avais aucun doute. Megan était la femme de ma vie. Mon âme-sœur. Elle était à moi et je devais assumer mes actes.

Soudainement les mêmes tremblements que plus tôt, ceux qui m'avaient envoyé dans un monde irréel, me reprirent. Je ressentis le besoin de m'asseoir, de fermer les yeux. Cela n'était pas le moment, néanmoins. Je tentais, donc, de toutes mes forces de rester conscient et avançais droit devant, auprès de Megan. Ma vision devint floue. Je perdis la bataille. Je m'immobilisais et fermer les yeux tant la terre semblait trembler. Je me sentis aspirer puis tout se stabilisa enfin et je ne pensais qu'à une seule chose. Régler cette histoire avec Megan puis aller voir un médecin.

The quest for DestinyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant