Chapitre 35

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Deux ans ferme, c'est la peine de prison que j'ai gagné, en tapant dans ces foutues statues. Je viens de changer ma tenue chic contre cette combinaison orange, couvrant la plupart de mes tatouages.

Deux ans, c'est vraiment énorme pour moi. Je ne m'attendais pas à autant, mais je suis tombée sur une juge raciste selon mon avocat, et j'en suis sûre. Cette femme aux traits tirés portait un regard méprisant sur moi, et me répondait très sèchement. Visiblement, mes origines asiatiques ne lui ont pas plu. Surtout qu'elle a été tenue informée que je n'avais pas totalement la nationalité américaine. J'ai la double nationalité japonaise et américaine, que j'ai acquéri à mon arrivée en Amérique du Nord.

La juge n'a pas attendu l'avis de ses pairs pour annoncer son jugement, celui de deux ans fermes. Et je sais que tout le monde a été surpris par cette aussi longue peine de prison.

La prison est à Cocoa, ce qui fait que je reste non loin de chez moi. Et je suis vraiment anxieuse lorsque le policier m'escorte dans les couloirs sombres de la prison, les menottes autour des poignets. Mon but, c'est de sortir d'ici le plus vite possible. Je vais tâcher de me tenir à carreau. Je veux que les prisonniers me connaissent uniquement parce que je suis la maire de Cocoa Beach, et pas parce que je me bat avec tout le monde ou une autre connerie dans le genre.

Je veux revoir le plus vite possible les gros bras, qui me manquent déjà. Je vais partout avec eux, on est tout le temps ensemble. Et là, je vais vivre une nouvelle étape de ma vie loin d'eux.

Je veux aussi revoir mon cousin, Miguel, parce que je m'habitue énormément à sa présence. Depuis que je l'ai trouvé, on se parle très souvent et puis il passe la moitié de l'année chez moi, c'est un peu vide quand il n'est pas là.

Elijah m'a fait la promesse d'attendre ma sortie, qu'il serait toujours là. Je ne doute pas de lui, mais je me demande sincèrement s'il aura la patience d'attendre que je sorte de prison. J'espère que ce sera le cas, mais de toute façon, je ne pourrais rien faire d'autre pour vivre en paix avec lui. On devra sans cesse se cacher. C'est certainement fou de rêver à une possible relation... J'ai l'impression que c'est impossible, mais j'ai envie de croire que c'est possible. Deux ans, et on verra...

Le garde me fait reprendre conscience de l'endroit dans lequel je me trouve. Il a un passe en main, et me regarde fixement.

-On va passer devant les prisonniers, à ta place, je resterais en place et je fermerais ma gueule, me dit-il.

Je hoche la tête, incapable de lui répondre. C'est ce que je comptais faire dans tous les cas, je ne veux pas me faire repérer.

Il saisit mon bras, montre son pass à la caméra et nous avançons dans un nouveau couloir sombre. Les barreaux me font frissonner et je regarde tout autour de moi. Les prisonniers crient dans tous les sens, amusés par la nouvelle prisonnière. Et je suis déjà dégoûtée par le lieu dans lequel je me trouve.

Après quelques mètres parcourus, le garde ouvre une grille et me laisse entrer dans ma cellule. Celle que je vais partager pendant deux ans avec un homme me semblant très pervers.

-Bienvenue dans ton nouveau chez toi, ricane le garde. Tu vas bien lui servir à celui-là.

Il retire mes menottes et part, ne me laissant pas le temps de lui poser une question. Qu'est-ce qu'il entendait par là ? J'avance vers le lit non occupé par l'homme et m'assied dessus en laissant tomber ma tête sur le mur. Je ferme les yeux et prends une grande inspiration.

Le lit est simplement une planche, avec un matelas aussi épais que ma couette chez moi. La simple couverture est d'une matière extrêmement rêche, donnant envie de se gratter dès qu'on la touche.

-Alors ma mignonne, c'est quoi ton petit nom ? Tonne la voix masculine de mon camarade, d'un ton mielleux.

J'ouvre les yeux et pose mon regard sur lui. Son sourire en coin est répugnant, ses cheveux gris sont poisseux et sa peau est noircie à quelques endroits, me faisant savoir qu'il ne doit pas vraiment se laver ici. Je retiens un haut-le-cœur en ramenant mes jambes contre ma poitrine.

-Écoutez, dis-je doucement. On...

-Tutoie-moi, on habite ensemble maintenant. Tu vas pisser devant moi, je vais te voir à moitié à poil, alors fais pas ta timide.

Je soupire doucement, en jetant un coup d'œil au toilette miteux du coin de la chambre.

-Écoute, mon but c'est de me faire repérer le moins possible. Alors vo... tu vas faire comme si je n'existais pas.

-Ça ne marche pas comme ça avec moi. Tu vas voir l'asiatique, tu seras tellement en manque que tu vas me supplier à genoux de baiser ta petite chatte. Une belle femme toute fraîche, ça faisait longtemps que je n'en avais pas eu une ici...

Dégoûtée par ses propos, je me précipite vers le toilette et vide mon estomac. Lorsque j'ai finis, je me pose contre le mur et souffle longuement. Je sens que ça va être long ici...

Je me relève lorsque je me sens mieux et avance vers les barreaux. Une femme d'une trentaine d'années, dans la cellule face à moi me regarde. Elle désigne mon compagnon de cellule du bout du menton.

-Fais gaffe à toi, t'es avec le pire gars de la zone, lance-t-elle. Il va pourrir ici encore des années pour ses soixante-neuf viols commis sur des jeunes femmes et sur des enfants. Bon courage, ça fait six ans qu'il a pas vu une femelle en si bon état que ça.

Est-ce que le cauchemar va recommencer ? Est-ce que je suis destinée à me faire violer toute ma vie ? Moi qui avait trouvé une personne me respectant et me faisant découvrir le plaisir...

-Ne dors jamais totalement, conseil d'amie.

-Merci, murmurais-je.

Il n'y a personne pour me forcer à céder à cet homme. Mon père ne m'oblige pas à coucher avec lui. Il n'est pas Hayato. Je sais me défendre désormais, et je saurais lui dire non.

ProvocationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant