CHAPITRE 4

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  Je rentre à la maison en pétard. Il ne m'a vraiment pas adressé la parole de la journée. Même quand il m'a remis les clefs et m'a laissé seule pour la fermeture. Monsieur avait une "urgence". C'est ça, ouais. Il avait un putain de rencard. Et moi je n'ai pas le droit à un maudit numéro de téléphone ? Pour une fois que ça m'arrive, faut qu'il gâche tout et en plus fasse sa tête de mulle. C'est la première fois qu'il se comporte comme ça. On s'est toujours très bien entendu alors j'avoue que je ne comprend pas le comportement qu'il a eu. S'il a un problème avec cet homme, en quoi cela me concerne-t-il ?

C'est sûr que ce gars avait de quoi faire suer n'importe quel homme, aussi beau soit-il. Charly le séducteur a dû se sentir en danger. Il ne peut pas y avoir deux lions sur le même territoire après tout. Mais je pense qu'il s'inquiète pour rien. Je ne pense pas que ce mec va revenir de si tôt. Je ne l'ai jamais vu avant aujourd'hui et il n'a pas le profil type d'un client régulier. Il a dit "A plus tard" mais ne s'est pas pointé au moment de la fermeture. Encore un beau parleur.

Épuisée, je ne prends même pas la peine de remonter jusqu'à ma chambre. Je balance mes chaussures à travers le salon et m'affale lourdement sur le canapé, la tête enfoncée dans le coussin.

J'ai un tas de choses à faire, mais j'ai envie de m'octroyer un petit break. Le bâtiment de ce matin m'a angoissé et l'affaire avec Charly et le bel inconnu me tape sur le système. Je pense que je le mérite bien. De toute façon, je n'ai plus envie de lever le moindre orteil.

— Tu es rentrée ?

Le plancher grince sous le poids de mon père et je me redresse pour lui faire face. Il porte un vieux t-shirt et un short large qui ne dissimule pas ses kilos en trop. Ses lunettes de vues sont posés sur son piff, il vient sûrement d'arrêter de regarder son film. Il se rapproche de moi et vient s'installer sur le fauteuil d'à côté en posant son verre sur la table.

— Tu rentres de plus en plus tôt, affirme mon père.

— Normal, vu qu'ils me font commencer de plus en plus tôt, je raille. Vivement que mon responsable en tire deux mots au siège.

— Il te reste peu de temps avant de valider ton CDI, ça serait dommage de tout gâcher maintenant. Tu ne crois pas ? En plus tu es bien payée pour une fois.

— Je sais. Pourquoi penses-tu que j'y suis retourné ?

Pas que pour les beaux yeux de Charly, je l'avoue. J'y gagne assez bien ma vie et vivre chez mes parents me permet de faire d'une pierre deux coups: mettre de l'argent de côté et garder un œil sur mon père. Depuis que le Dr.Solar l'a mis en arrêt maladie, il se croit tout permis. Il en oublie que son corps ne répond plus comme avant. Imaginez le stress de devoir travailler en sachant que mon père peut faire une rechute à tout moment ? C'est quand même plus rassurant de le savoir à la maison plutôt qu'au travail sur une échelle. Quand je ne travaille pas et que je suis à la maison, il faut surtout que je fasse attention à ce qu'il ne fasse pas de connerie, du genre fumer un pétard, courir un marathon sous la pluie, boire de l'alcool...

Je louche sur sa boisson qu'il avale avec avidité devant la télé.

— Papa !!

Il sursaute et me regarde avec de grands yeux.

— Qu'est-ce que j'ai fait encore ? me demande-t-il innocemment.

— Tu crois que je n'ai pas cramé ce qu'il y a dans ton verre ?

Le liquide jaune et pétillant est déjà vidé de moitié.

— C'est du champomy.

— Ah oui ? Fais-moi sentir, je lui conseille en lui tendant la main.

DIAMOND SCHOOL TOME 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant