On My Way

Bonus - 25 bis

Après avoir rencontré Nills, je n'ai jamais imaginé qu'il pourrait un jour m'accabler de lourdes émotions. Lui qui a toujours tout fait pour m'en éloigner au contraire. Pourtant, malgré notre superbe amitié, être à ses côtés est plus douloureux que de ne pas l'être ces derniers temps. C'est plus dur encore de savoir que je suis la seule à ressentir les choses de cette manière. Alors, je suis contente de lui tourner le dos en ignorant ses appels sourds parce que pour une fois, je prends les décisions pour moi-même. Je me fais passer en première.

Néanmoins, ça ne m'empêche pas de me sentir terriblement mal. J'ai pour habitude d'éviter le moindre conflit, peu capable de me défendre, cependant j'ai pu vider un peu ce que j'avais sur le cœur. Résultat, je me sens fébrile. Mes larmes ont séché mais mon cœur pleure toujours. À défaut d'avoir une vie familiale stable, j'aurais aimé que ma vie amicale continue de bien se dérouler. Mais, vient toujours le moment où tout dégringole et je me surprends, à chaque fois, à tomber plus bas.

Je déteste Nills. Je le déteste parce qu'en un mois, il m'a fait devenir une personne que je ne penserais jamais être un jour. Il m'a appris à me battre pour mes convictions, il m'a fait relativiser, il m'a montré que j'étais capable de sortir les griffes quand il le fallait, il m'a fait sortir de mon petit cocon de confort dans lequel je pensais être au mieux. Il m'a réappris à faire confiance et à m'ouvrir un peu plus à quelqu'un.

Surtout, il m'a démontré que moi aussi je pouvais faire partie de celles et ceux qui tombent facilement amoureux. J'étais persuadée que c'était un de ces trucs réservés aux romans à l'eau de rose que je lis en cachette. Mais non, je suis tombée amoureuse de Nills. Peut-être que c'était facile parce que c'était lui. Ce qui est triste c'est que ça n'était que dans un sens... Partout, on entend parler de la première déception amoureuse mais en évoquant toujours ceux qui ont au moins été aimés en premier lieu. Le pire, c'est de se faire briser le cœur par une personne qui n'en a même jamais voulu.

En montant dans le bus, je me promets de ne plus ressasser cette histoire car je ne veux pas être la pleureuse cliché de mes romances. Je ne veux surtout pas dépendre de quiconque. Toutefois, la bagarre entre Nills et Riley m'a rappelée qu'il y avait un grand écart entre mes décisions et la réalité. À présent, le premier m'a profondément déçu et le deuxième ne veut plus m'adresser la parole. Tout ça, à cause de mon stupide message envoyé en douce à Kaya. J'aurais dû suivre le conseil préféré de ma mère : Tourne sept fois ta langue dans ta bouche avant de dire quelque chose. Tourne sept fois ton pouce dans le vide avant de faire quelque chose. Ça m'aurait évité bien des tracas.

En descendant du bus, les pensées autour de Nills ne m'ont pas quittée. Quelle idiote, je suis ! Le cœur ballant, j'effectue le trajet que je connais sur le bout des doigts et toque à la porte d'un geste fatigué. Épuisée serait le terme adéquat tant mon corps n'a plus rien à donner. Les deux précédentes semaines ont été épouvantables si bien que dès que la porte de la maison s'ouvre sur mon père, je rends les armes. Je m'effondre en pleurs dans ses bras.

Je comprends que le vrai problème ce n'est pas Nills, ou Riley, ou tous ces satanés devoirs que je redoute de ne pas terminer à temps. Le vrai problème c'est d'être si loin de mon père alors que j'ai besoin de sa douceur au quotidien, d'être séparée de ma mère qui m'encourage et me valorise dans tout ce que je fais, de ne pas pouvoir être là quand il faudrait pour Kaeson et d'à peine connaître mon petit frère de 9 ans. Le vrai problème c'est que ma vie ne m'appartient plus depuis que j'ai 7 ans et que celle qu'on l'on dirige pour moi ne me convient absolument pas. Ça fait si longtemps que je n'ai plus eu la sensation de respirer librement. Je m'y étais sans doute habituée, si l'on peut vraiment s'habituer à ça, mais je ne tiens plus. J'étouffe.