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Maddie, qui a passé les dernières semaines à me fuir, reste dans mes bras pendant de longues minutes. Ses mains crispées se tiennent désespérément au dos de ma veste. J'ai l'impression de sentir son cœur pulser, à un rythme soutenu, contre mon torse. Je ne sais quoi dire. Bercés par le froid automnal, on se fond au silence. Lorsqu'elle s'éloigne, elle fuit mon regard et répète des excuses étouffées.

— Tu es là depuis longtemps ? Fallait m'envoyer un message !

— Je l'ai fait...

Je réalise que je n'ai pas regardé mon téléphone depuis qu'Ayden est passé me chercher. Lovegood ne dit rien mais je devine la même déception que la précédente fois sur son visage.

— J'suis con ! J'ai p...

— C'est pas grave, c'était idiot de venir, chuchote-t-elle.

— Dis pas ça, la grondé-je d'une voix pourtant tempérée. Viens, on rentre au chaud. T'as pas de problème contre l'escalade ?

J'ai le temps de voir son expression perdue avant de lui tourner le dos. En partant sur le côté de la maison, je lui fais signe de me suivre. Je lui indique ensuite de m'attendre devant la fenêtre de ma chambre et fais déjà demi-tour pour entrer. La maison est plongée dans le noir – parfait signe que la voie est libre. Ma mère est profondément endormie et mon père n'est pas encore rentré.

Je dépose lourdement mon sac et ma crosse au coin de ma chambre, remettant à plus tard mon tri. Quand je fais glisser ma fenêtre vers le haut, je découvre une Maddie qui n'a pas bougé d'une semelle. Elle accroche ses mains rougies par le froid au rebord alors que je m'éloigne pour lui laisser de la place mais je la vois grimacer.

— Tu peux m'aider, s'il te plait ?

Un ricanement se bloque aux bords de mes lèvres afin de ne pas la froisser. Je la guide alors et la hisse d'une seule main malgré les rires qui me compressent les abdominaux et me privent de toute force. Elle parvient à poser ses pieds contre ma moquette, aussi amusée que moi.

— Prends tes aises, l'incité-je. Je vais me chercher du froid, tu veux quelque chose ? Un thé, des biscuits... Non, une pomme !

— C'est pas juste... bougonne-t-elle.

— Quoi ? Je suis un bon hôte, c'est tout.

— Non, tu te moques de moi !

Comédien, je m'arme tout de suite d'un faux air désabusé.

— Ah... Personne t'a jamais dit que c'était ma spécialité ? Genre quelqu'un comme moi. Parce que je suis plutôt sûr de te l'avoir dit, souris-je.

La lassitude et l'amusement se mêlent à ses mouvements de tête. Je quitte ma chambre les mains vide puis reviens avec une poche de glace, une compote et des sucreries mal cachées par mon père.

— On avait plus de pommes mais la compote c'est un bon compromis, me justifié-je face au regard de Maddie.

Elle est sagement assise sur ma chaise de bureau, observe les murs plutôt sobres de ma chambre, et s'arrête un moment sur mes petites étagères qui me font office de bibliothèque. À en juger son haussement de sourcils, ma collection de romans polar semble l'impressionner. Contrairement à elle, je ne me gêne pas pour m'affaler sur mon lit. Le silence plane encore plusieurs secondes. J'ai presque terminé de confectionner mon pansement glacial lorsqu'elle ose prendre la parole, tout bas :

— Tes parents ne veulent pas que tu invites des amis la nuit ?

— Ils s'en foutent mais je dois les prévenir en avance, dis-je honnête. Surtout si je veux pas que ma mère me fasse son discours de prévention sexuelle chaque fois que j'invite une fille.

On My WayOù les histoires vivent. Découvrez maintenant