On My Way

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Au bout d'une demi-heure, il y a déjà trois choses que je sais à propos de Maddie. Elle n'est pas si timide ; elle évite quand même la plupart de mes regards comme si ses yeux cachaient de nombreux secrets ; elle adore mes légumes au four – ce qui me laisse penser qu'elle ne mange pas si bien chez elle car je suis un piètre cuisinier. Ou peut-être est-ce une quatrième chose à savoir d'elle : elle ment à merveille.

– T'es souvent tout seul chez toi ? s'intéresse-t-elle perchée sur une chaise haute.

Je lui fais face, de l'autre côté du comptoir de la cuisine, et j'en profite pour tenter de capter ses yeux à la moindre occasion.

– La plupart du temps, mes parents bossent à l'heure où je suis à la maison. Alors, ouais. Toi aussi ? Ça t'arrive souvent de te retrouver à la porte parce que tes parents sont pas là ?

– Eh, je te vois venir !

Elle pointe mon sourire moqueur comme si elle me jetait un sort du bout de son index. Au moins, elle me regarde enfin.

– C'est la première fois que j'oublie mes clés ! Je suis même plutôt sûre d'être partie avec ce matin... semble-t-elle réaliser. Si tel est le cas, j'espère les avoir laissées au lycée et pas les avoir égarées.

Son tourment se lit tout à coup sur son visage pâle. La peur d'avoir peut-être paumé ses clés la préoccupe plus que de raison. Je la sors rapidement de ses songes.

– En contrepartie, tu gagnes une soirée avec moi ! Tout a un prix. Surtout moi, je suis plutôt cher !

– Je crois que j'aurais tout de même souhaité conserver mes clés.

– Mayday, mayday ! m'écrié-je une main sur le cœur. Un homme est touché !

Elle éclate de rire après avoir pris soin de ne pas recracher sa gorgée d'eau. Et ça me permet de confirmer une nouvelle chose à son propos. C'est qu'elle sourit sans les yeux.

– Mais, rebondit-elle, tu me sauves alors merci.

– 11 !

– Pardon ?

– C'est la onzième fois que tu me remercies en une demi-heure. Tu penses que tu peux faire mieux en termes de discussion ?

Ma plaisanterie ne l'amuse pas. Maddie se renferme un peu au contraire et je regrette aussitôt d'être aussi brut avec elle que je le suis avec mes amis. Il y a ça aussi à savoir sur elle, son humour différent du mien que j'ai, au début, interprété à tort comme un manque total d'humour.

– Je rigolais, Lovegood ! Remercie-moi autant que tu veux, ça tient gonflé mon égo.

– Maddie.

– Alors, décidé-je d'ignorer, comme ça tu t'entends bien avec notre mystérieux Leander ? Il t'ouvre les portes de son âme noire ?

Entendre le nom de notre ami commun la ramène à nouveau près de moi.

– Pas vraiment, dit-elle les sourcils froncés. Je le considère comme un très bon ami, mais je dois t'avouer que c'est difficile de connaître ses pensées à mon égard.

– Ses pensées... Amoureuses ? sauté-je sur la perche tendue.

– Pas du tout, Nills ! Je viens de te dire qu'il était mon ami.

Je me penche vers elle, les coudes fermement posés sur le comptoir. Mes prunelles plantées dans les siennes, je chasse une de mes mèches en arrière et m'efforce de garder un air sérieux. Et persuasif.