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POINT DE VUE NILLS


En sentant l'intensité de mon stress, je n'ose imaginer celui de Maddie et de sa famille. C'est un moment important pour eux, un énième. Leur attitude laisse transparaître une habitude qui me serre le cœur. Les parents vont immédiatement prendre place devant une des tables, face au compartiment de la « Cour ». Ils ont dû en passer des heures dans une salle d'audience à défendre leurs droits parentaux. Et aujourd'hui, ils doivent recommencer. J'espère que la situation des Fields-Curtis s'améliorera parce qu'il n'y a personne qui mérite plus la paix que cette famille.

Tout le monde autour de moi s'installe sans hésiter comme si chacun connaissait sa place exacte. Je suis Maddie entre les bancs de l'auditoire et m'assieds sur celui derrière elle, encore vide. À moins d'un mètre d'elle, de l'autre côté de la barre, se trouvent ses parents qui se retournent pour lui sourire. Ils ont l'air plus confiants qu'elle, ce qui a quelque chose de rassurant. À gauche de mon amie se tient son éducateur et sur sa droite, Warren séparé de sa famille d'accueil. Je ne sais pas si c'est un choix ou une obligation mais il n'a pas hésité à venir près de sa sœur. 

Je fronce tout à coup les sourcils, interpellé par une absence. Juste au moment où je me penche pour chercher Kaeson du regard, le concerné se glisse à mes côtés. Sa manière de me coller trahit son effroi. Je passe un bras autour de ses épaules dans l'espoir de lui procurer un peu du réconfort dont il a besoin. Je suis content de tenir ma promesse, d'être là - enfin quelque chose que je réussis depuis des semaines.

— Bonjour à tous, retentit une voix pincée. Si toutes les parties sont présentes, nous pouvons commencer.

Je relève la tête pour apercevoir une femme, à la coupe au carré rousse, suivie d'une autre plus jeune, s'asseoir sur la tribune élevée face à nous. Sans aucun doute la juge. Son arrivée suscite quelques chuchotis curieux. Elle ne tarde pas à reprendre :

– Je suis Madame Pears. Comme vous en avez été informés, je me charge des dossiers de M. Atteyer qui est en congé. Je m'occuperai de vous suivre pendant sa convalescence. Je suis bien informée de votre situation et de l'urgence dans laquelle vous vous trouvez. C'est pourquoi je vous demande la meilleure conciliation à tous.

Par-dessus sa paire de lunettes, elle jette un regard à la fois encourageant et menaçant à la table des parents puis celle de gauche où sont assis un homme et une femme à l'air formel. Je me permets de demander leur identité à Kaeson, mon fournisseur officiel d'informations.

— L'assistante sociale et l'enquêteur, me murmure-t-il.

— Il enquête sur vous ?

Il hoche la tête grimaçant.

— Et à côté de Papa et Maman, c'est leur avocat, m'explique-t-il. Il est pas génial si tu veux mon avis.

Je ricane alors que Maddie nous gronde d'un regard – ce qui fait alors sourire mon petit pote. Plus loin, la juge poursuit :

— M. et Mme Fields-Curtis, vous êtes parents de trois enfants de 16, 11 et 9 ans et souffrez de déficience intellectuelle depuis votre naissance.

— Madame la juge, mes clients préfèrent le terme « atteint », la corrige l'avocat avec fermeté. Ils ne souffrent en rien.

— Mes excuses. Vous vous êtes donc vus être retirés de la garde du benjamin Warren Jaxton Junior Chelsea, en 2011. Mais vous possédez toujours celles de Madilyn Hailey Mariana et Kaeson Jaxton Junior Chris qui ont alterné jusqu'à aujourd'hui entre les foyers sociaux, les familles d'accueil et le domicile. En 2013, il a été décidé un retour de M. Fields à son domicile parental afin que les enfants puissent retourner auprès de la maman. Aujourd'hui, vous réclamez la garde totale de vos enfants et la réintégration de M. Fields au foyer, c'est bien ça ?

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