- 26 -

456 53 16
                                    


— Vous ne montez pas sur la glace tant que votre test n'est pas rendu, nous prévient la coach en longeant la ligne que l'on ferme.

Nous sommes entassés les uns derrière les autres dans le grand couloir des vestiaires, attendant notre tour pour le dépistage urinaire. L'ambiance est plus détendue que je ne l'aurais imaginé. Certains mecs se sont lancés dans un concours de blague officieux certainement pour dédramatiser la situation. Comme Adam, un des premiers à passer, qui sort des toilettes avec un sourire en croissant de lune.

— Négatif, les gars, scande-t-il. J'suis pas enceinte !

J'esquisse de rire alors qu'une valve d'applaudissements s'élève et qu'il remonte le couloir en claquant dans quelques mains. Derrière lui, j'aperçois Martel qui ne se réjouit pas de les voir prendre ça à la rigolade. Après tout, il s'agit de la santé de ses joueurs et elle veut tirer l'affaire au clair, je l'ai bien compris la veille. Si la plupart de mes coéquipiers n'avaient pas arrêté depuis ce week-end, ils ne triompheraient pas autant. Mais, heureusement pour eux – et pour moi – la Ritaline ne reste détectable seulement pendant un ou deux jours. Si la prise n'est pas intensive... Tant que tous les joueurs ne seront pas ressortis avec un test négatif, je n'aurai pas l'esprit tranquille.

Quand vient mon tour, j'ignore mes tremblements et entre dans les toilettes partagées. Waouh, ils ont fait les choses bien. Un homme de l'équipe médical est assis devant les cabines individuels. La table devant laquelle il est assis est chargée de tests neufs et de multiples feuilles. Aucune triche n'est possible.

— Bonjour, commence-t-il sans lever les yeux. Nom et prénom ?

— Nills Erdfon.

Il ne relève la tête qu'au moment de regarder ma carte d'identité et de vérifier la similitude entre photographie et réalité. J'en profite pour lui tendre mon ordonnance de médicaments. D'un ton faussement détendu, j'annonce :

— Si ça peut vous sauver du temps, et préserver un peu de ma pisse, je prends de la Ritaline pour mes troubles de l'attention. Le test sera positif.

— Laissez-moi voir ça...

Ses yeux bruns circulent rapidement sur la feuille abîmée qu'il finit par me rendre d'un geste las. Puis, il me donne un petit pot transparent doté d'un numéro tout en notant quelque chose sur une des fiches. En d'autres termes, il ne croit pas à mon histoire ou n'y accorde pas son entière confiance.

— Faites tout de même le test, c'est le protocole, ponctue-t-il en me pointant la cabine du milieu.

Génial, j'ai le droit au jeu du « vise pipi » comme le nomment les mecs. Une fois que c'est fait, je rends le pot au monsieur qui y trempe une petite languette. Je comprends alors la référence d'Adam au test de grossesse. Je souris comme un con en me lavant les mains puis m'appuie contre les lavabos pour attendre confortablement le résultat. Deux barres pour négatif, une barre pour positif. Sans surprise, cinq minutes plus tard, M. Aimable me dit :

— En effet, c'est positif. Il faudrait que vous transmettiez au club un mot de votre médecin dans les plus brefs délais.

— Mon ordonnance ne vous suffit pas ? protesté-je agacé.

La perspective de revoir Dr. Bowen ne m'enchante pas. C'est tout le temps épuisant parce que ça me demande des efforts supplémentaires pour faire semblant et la convaincre de ne pas entrer dans un énième ajustement médicamenteux.

— Les fausses ordonnances sont très courantes. Si ce n'est pas le cas de la vôtre, ça ne devrait pas poser problème d'avoir une attestation de votre médecin, si ?

On My WayOù les histoires vivent. Découvrez maintenant