Qui lance un boomrang prend le risque de se le prendre dans la tête.
Proverbe Australien
La ville martienne de New Phoenix pouvait sembler abandonnée pour un visiteur qui sillonnerait ses longs corridors éclairés par des néons blafards. Pourtant, en son cœur, une activité fébrile régnait. Au niveau de son centre de contrôle se jouait actuellement la survie de la colonie martienne dans son ensemble car les multiples écrans holographiques étaient animés par la première bataille spatiale de l'humanité.
La crise avait débuté au moment de la disparition de toute organisation terrienne, rendant Mars orpheline de sa grande sœur. Comme les autres colonies, la planète rouge n'était pas faite pour vivre en autarcie. Son statut de plus grande colonie planétaire lui donnait un potentiel de survie supplémentaire, mais l'environnement hostile qui caractérisait sa surface était un fardeau.
Peu protégés des radiations spatiales, les Martiens devaient s'enterrer pour survivre, limitant les sorties selon les données des compteurs de radiation individuels qu'ils portaient tous en permanence. Les véhicules d'exploration souffraient de la fine poussière rouge qui s'infiltrait partout, de multiples pannes étaient à déplorer. La terre se révélait peu adapté aux cultures du fait de son acidité, obligeant les martiens à cultiver hors sol la plupart des aliments produits sur place, et à en importer la majeure partie directement de la Terre. Dorénavant plus aucun convoi de ravitaillement n'arrivait de la planète bleue.
Il aurait fallu mobiliser tous leurs moyens pour résoudre ce problème vital, c'était malheureusement impossible à réaliser sous la menace des vaisseaux sélénite. Depuis que le dernier message libre en provenance de la lune était arrivé, annonçant les projets de conquête de Siamois, Mars était en ébullition. Le mystérieux message lunaire ne se contentait pas de donner tous les éléments de la sanglante prise de pouvoir de Siamois (quoique « sanglant » soit un mot peu adapté à la mise sous vide de l'ensemble de la population d'une ville), il décrivait aussi les étapes suivantes de la constitution du premier empire solaire. Mars se trouvait dans la liste des cibles prioritaires.
Siamois comptait s'emparer des ressources alimentaires terrestres pour faire survivre son empire, puis prendre le contrôle de l'ensemble du système solaire en commençant par la seule colonie extraterrestre de taille à pouvoir refuser d'entrer dans l'empire. Les 300000 martiens avaient vite compris que la demande d'annexion ne viendrait pas par l'intermédiaires de diplomates de chair ou de métal, mais plutôt d'une flotte spatiale dont la construction avait commencé avant même l'avènement de l'empire.
La gestion de Mars était à la charge d'un parlement qui votait à son tour pour attribuer les postes de tribuns.
Ceux-ci étaient nommés pour trois année par le parlement martien, chacun en charge d'un domaine spécifique de la colonie. Cependant il n'y avait pas de tribun chargé des affaires militaires sur Mars, ni de vaisseaux de guerre. Connus pour leur attachement à la démocratie participative, les tribuns consultèrent l'ensemble des Martiens pour décider de la réponse à apporter à l'ultimatum de Siamois. Le résultat était, sans discussion possible, en faveur du maintien de l'autonomie de la planète rouge à tout prix, y compris celui de la guerre totale. Aussitôt les ingénieurs imaginèrent un système défensif orbital basé sur des silos de missiles multi-têtes au sol et des drones de combats spatiaux pour interdire l'orbite martienne à toute flotte lunaire. Pour compléter le dispositif, une base d'artillerie avancée fut placée à l'abri d'un cratère sur Phobus, le satellite naturel de Mars.
La constitution des défenses martiennes reposait uniquement sur l'imagination des ingénieurs, car l'humanité à cette époque n'avait aucune expérience des guerres spatiales et personne n'était capable d'évaluer le caractère dissuasif de l'ensemble, ni même d'estimer la valeur militaire de l'adversaire à affronter. Cette réorientation de l'appareil productif vers la constitution d'une flotte de défense d'une centaine d'éléments commandés à partir du sol martien coûtait cher aux habitants qui connurent les famines et les carences. La faim tua sur Mars plus encore que sur la Lune, protégée partiellement de ce fléau par les denrées récupérées sur Terre.
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Xeno-mondes
Science Fiction2099, l'humanité est entrée dans une phase d'expansion que rien ne semble pouvoir contrarier. Les progrès technologiques rendent facilement accessible les voyages spatiaux, l'intelligence artificielle permet dans tous les domaines une révolution sci...