2118 Flotte saturnienne, entre la Terre et Jupiter

2 0 0
                                    

Il est des moments étranges de l'histoire où il est impossible pour le spécialiste de déterminer qui a gagné une guerre pourtant finie. Ce fut le cas de la guerre contre le premier empire solaire.

Précis d'histoire de l'ère post-terrienne, Professeur Rasolomano

L'ensemble des vaisseaux encore capable de se déplacer se repliaient lentement vers Jupiter, limitant leur vitesse afin de permettre aux croiseurs endommagés, qui ne pouvaient utiliser la pleine puissance de leurs réacteurs, de suivre la flotte. Déjà les réparations avaient commencé et une intense activité s'était déployée dans la grande flotte de guerre qui revenait, avec les honneurs de la victoire, mais pourtant peu d'humains pour s'en réjouir. Mosi Sadji n'était plus, les humachines avaient perdu douze d'entre eux. Les visages étaient sombres, fermés. La flotte martienne à qui ils laissaient le champ de bataille, empêchait même de pouvoir récupérer les cadavres de leurs compagnons. A peine sortie de son chasseur Ava s'était enfermée dans sa cabine, sans même retirer sa combinaison, refusant de répondre aux sollicitations inquiètes de Tien. Francisco Gomez somnolait dans l'infirmerie alors que sa blessure cicatrisait. La fatigue de la longue navigation, le stress propre à la bataille, sa blessure et les médicaments l'avaient plongé dans un sommeil agité, malgré la housse qui le maintenait en place, en l'absence de gravité.

Seuls les deux mécanicus profitaient pleinement de cette victoire. Une certaine euphorie avait gommé les différents qui les avaient opposés pour un moment de parfaite communion. Allan ressentit comme un manque son impossibilité de déboucher une bonne bouteille de champagne, mais il se sentait vivant comme rarement, malgré les blessures qui rendaient le Nautilus peu manœuvrable. Aucun des dommages n'était important et le globe central l'abritant avait été préservé. Aasim Abedi prenait soin d'enregistrer tout ce qui pouvait l'être, comptant se repasser jusqu'à saturation les données de cet évènement qui lui assurait le contrôle définitif de la géante gazeuse.

Ava finit par ouvrir sa porte pour laisser enter Tien. Son visage était dévasté, ses yeux secs mais rouges ne laissaient pas de doute sur les larmes versées abondamment avant d'arriver à reprendre le contrôle d'elle-même.

- Tu as fait ce qu'il fallait, Ava. Cette victoire est tienne, pourquoi n'es-tu pas capable de savourer ce moment pour lequel nous travaillons dur depuis seize ans ?

Tien avait conscience de se tromper dans son approche, mais rien d'autre lui était venu à l'esprit.

- Oui, tu l'as dit, c'est ma victoire. C'est moi aussi qui suis responsable de la mort de tous ces colons sur la Lune. C'était vraiment le bon choix dis-tu. Qu'avons-nous gagné en échange de ces morts ?

- Ava, tu n'es pas responsable. Tu ne peux porter seule le poids de cette bataille. Laisse-moi t'aider, moi qui produit des instruments de morts plutôt que des poésies. Nous savions que cela allait finir comme ça. Le perdant devait tout perdre. Siamois allait détruire Jupiter et Saturne, nous les avons sauvés.

Encore une fois, Tien était mécontent de sa réponse. Il savait déjà qu'il n'arriverait pas à convaincre la pilote, mais il ne pouvait se résigner à admettre sa défaite.

- Je porte cent mille tombes en moi, Tien. Qui peut m'aider ? Laisse-moi partir maintenant, je vais prendre un de tes Dragons, nous ne devrions plus trop en avoir besoin maintenant.

- Mais où peux-tu partir ? Et moi, que fais-tu de moi ?

- L'univers est vaste, l'as-tu oublié Tien ? Quant à nous, n'avons-nous pas l'éternité ? Ce n'est pas un adieu que je te laisse, Tien, mais juste un au revoir. J'ai besoin de me rappeler qui je suis et pour ça, il me faut être seule.

Xeno-mondesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant