2111 Base scientifique de Titan

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Durant une bataille spatiale, l'énorme masse de données à prendre en compte est une chance pour ceux qui sont de chair car en saturant le cerveau, elles empêchent la peur. 

Manuel de combat spatial du commandant Kayani

Ava et Tien se trouvaient face à face dans le grand réfectoire. Persépolis voleté autour d'eux avec nonchalance. Le lieu était calme encore, aucune section n'avait son heure de repas pour le moment. Les instants de solitude étaient rares sur la base souterraine de Phoebus, les espaces communs étant le plus souvent saturés par les Titaniens. Les chambres trop petites n'offraient pas une retraite enviable pour un misanthrope ou pour un couple d'amoureux mais tous avaient appris à s'adapter, à faire semblant de s'adapter au moins.

Tien semblait peu en souffrir, mais pour Ava, c'était un supplice. Depuis la bataille de Titan, elle n'avait plus le droit de sortir sur la surface glacée de la lune. Les pièces étroites et les longs corridors étaient maintenant son quotidien et sa prison, aussi sûrement que la chambre où ils avaient été enfermés sur Ganymède.

Restriction supplémentaire à sa liberté, les vols à bord de son chasseur bimoteur hors de l'atmosphère de Titan lui étaient comptés depuis son accident. La pilote n'avait jamais apprécié les simulateurs, même si elle en admettait l'utilité pour garder son expertise et apprendre des nouvelles données, d'autant plus que ceux-ci venaient d'être incrémentés après la terrible bataille qui venait de se dérouler autour de Saturne.

La victoire avait été nette et l'ensemble de la flotte d'invasion de Siamois avait été détruite, jonchant l'orbite de leur planète de débris métalliques que des robots de recyclage récupéraient maintenant pour alimenter les usines 3D. Des frissons parcouraient encore la pilote quand elle repensait à son combat et à ses premières victoires.

Pourtant, c'était eux qui se trouvaient enfermés et les Sélénites restaient libres comme une météorite dans l'espace !

La flotte de Siamois était imposante avec ses seize dreadnoughts et des centaines de Spectres. Tous, sur Titan, avaient conscience de leur situation désespérée : une seule erreur dans le plan de bataille et en quelques secondes cette formidable armada spatiale réduirait à rien toutes leurs bases et massacrerait l'ensemble des Titaniens. Si Siamois pouvait perdre la bataille sans perdre la guerre, eux n'avait que le choix de la victoire ou de la mort.

Heureusement ils n'étaient pas pris au dépourvu. Les huit mois qu'il avait fallu à la flotte ennemie pour parcourir la gigantesque distance entre la Lune et Saturne leur avait permis de se renforcer, multipliant les spacioports militaires sur les nombreuses lunes et rochers de la ceinture de la belle planète gazeuse.

Autour de Titan, ultime défense, des satellites lasers protégeaient sa précieuse surface, l'épaisse atmosphère de la lune empêchant de disposer les canons lasers directement sur le sol.

Enfin la flotte de Siamois arriva dans l'orbite de Saturne. L'attente avait mis les nerfs des humains à rude épreuve. Tous à leur poste de combat, ils observèrent sur leurs écrans la flotte de Siamois se diviser en de multiples flotilles. Les plans rapportés par le mécanicus Aasim Abedi montrèrent leur valeur. Ses prédictions se révélèrent exactes dans le moindre détail. Grâce à ces indications, à chaque point d'entrée dans l'orbite saturnienne, les chasseurs titaniens étaient en nombre, bien entrainés, attendant leurs proies sans crainte ni impatience, à la manière des machines en situation de guerre. Les balles, propulsées à plus de 100 kilomètres par seconde, commencèrent à fuser de part et d'autre. Face aux premières lignes de Spectres, les Hyperions formaient un cône permettant d'assurer une grande distance entre chaque chasseur et d'accroître le nombre de cibles pour les drones ennemis. Si, avec un seul canon, leur puissance de feu était bien moindre que celle des chasseurs sélénites, leur forme effilée offrait, de face, une cible difficile qui équilibrait les forces. Fidèle à leur stratégie, les Spectres foncèrent en avant pour franchir la ligne ennemie et pouvoir s'offrir des cibles plus faciles, dans un combat tournoyant ou ils avaient le plus souvent l'avantage.

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