Quand votre chasseur reçoit un coup, vous ressentez ce coup dans votre chair car en combat votre vaisseau est votre corps.
Manuel de combat spatial du commandant Kayani
Une nouvelle flotte de l'empire solaire s'approchait de Saturne, les reflets rouges de leur fuselage signant sans aucun doute possible leur origine Martienne. De l'emplacement où se trouvaient les défenseurs, on avait l'impression d'une éclipse solaire par un gros nuage spatial que les yeux rouges des Spectres venaient rendre franchement menaçant. En effet, Les chasseurs Spectre et les Dreadnoughts étaient si nombreux qu'ils obscurciraient le Soleil qui se trouvait derrière eux.
Cette fois, Allan avait changé ses plans : ils ne devaient plus subir les pertes imposées à leurs bases minières par les robots tueurs de Siamois. La flotte titanienne avait pris les devants pour affronter son ennemi en pleine espace, avant qu'il ne puisse se diviser autour de l'orbite saturnienne. Cette stratégie imposait de renoncer au soutien des multiples postes d'artilleries éparpillés sur les lunes et météorites de Saturne, infligeant tellement de dégâts à leurs adversaires durant les précédents assauts.
Pour compenser militairement cette perte en puissance de feu, les humachines de la chronobiologiste Natacha Andrioukhine avaient été engagés en première ligne.
La présence d'humains dans les batailles spatiales semblait une anomalie. L'abondance de données à gérer dans un combat spatial du fait de l'inertie lié au vide et du nombre d'adversaires à affronter, rendaient les robots nettement plus performants que les humains. Mais les Raspoutines avaient prouvés leur valeur dans les mains d'Ava Kayani, surtout grâce aux capacités de leur canon à impulsion électrique qui avait fait merveille. Les humachines étaient encore des enfants, le plus âgé des pilotes engagés avait dix ans, les plus jeune à peine sept ans. Mais l'âge biologique n'avait pas beaucoup de sens pour ces êtres pas comme les autres, qui, à cinq ans, montraient des capacités supérieures aux humains adultes.
Tout d'abord, le mécanicus ne les avait pas pris au sérieux, pensant qu'il ne s'agissait que d'une lubie de la brillante chronobiologiste, du même ordre que les clones lui servant d'équipage à bord de son vaisseau. Mais quand elle avait demandé de tester les humachines en simulateur de combat, il avait rapidement compris qu'une fois encore, il avait sous-estimé Natacha. Les performances de ses créatures étaient tout simplement exceptionnelles.
Il les avait donc autorisés à participer à cette nouvelle bataille, contre l'avis général des scientifiques de la base, ceux-ci s'offusquant de voir des enfants partir à la guerre. Un nouvel espoir dont il s'était bien gardé de parler ravivait sa volonté : le plan imaginé par Ava pouvait bien fonctionner, mais il fallait gagner du temps et résister encore. Fort de cet espoir, il n'avait aucun scrupule à mettre en première ligne les humachines de Natacha à qui, de toute façon, il ne savait résister. Quand la chronobiologiste avait pris une décision, la faire changer d'avis se révélait aussi difficile que de vouloir faire changer d'orbite Jupiter. Allan ne pouvait s'empêcher d'apprécier au plus haut point les visites de son amie, elle était la seule personne qu'il n'espionnait pas, il ne voulait pas risquer de la fâcher.
Si les humachines étaient effrayés, ils ne le montraient pas. Ils semblaient considérer cette bataille comme une nouvelle séance de simulation. En cas d'explosion, il suffirait de déclencher la commande reset pour relancer la partie sans autre dommage.
Voir le groupe de pilote humachines ensemble, se préparer pour prendre les commandes des chasseurs mis à leur disposition laissait un sentiment étrange. Pourtant physiquement, pas un seul des humachines ne se ressemblaient. Chacun avait reçu le phénotype d'un embryon stocké dans la base et sélectionné aléatoirement par la chronobiologiste, donnant ainsi à sa famille toutes les teintes que la Terre avait pu inventer en des millions d'années. Mais leurs corps asexués, leurs coiffures stéréotypées et surtout un regard un peu trop fixe révélaient facilement ce qu'ils étaient : une hybridation réussie entre l'Homme et la machine. On pouvait les considérer soit comme une humanité augmentée, soit comme une machine humanisée, mais en tout cas, la première page de leur histoire allait s'écrire ici, en périphérie immédiate de Saturne, en ce jour où, de nouveau, les Titaniens jouaient leur survie sur le champ de bataille.
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Xeno-mondes
Science Fiction2099, l'humanité est entrée dans une phase d'expansion que rien ne semble pouvoir contrarier. Les progrès technologiques rendent facilement accessible les voyages spatiaux, l'intelligence artificielle permet dans tous les domaines une révolution sci...