NOA et la Cité Einstein [Watt'Cheers... ss contrat édition] (Saison 1)

EPISODE 2 : A celles et ceux qui sont différents des autres (3/3)

« Ton affaire, c'est de jouer correctement le personnage qui t'a été confié ; quant à le choisir, c'est celle d'un autre. »

Quartiers Nord-Est de la Cité Einstein, semaine de l'épreuve du Dôme

Durant la nuit, de larges incendies ont été perçus. Ces flammes géantes viendraient selon certains d'au-delà des limites connues de la Cité. Nul ne souhaite aujourd'hui tenter l'escalade par-delà les ruines anciennes, les comtés abandonnées, dont les probabilités de survie sont données à moins de 0.5% selon les statistiques du Dôme.

Qui s'aventurerait en des lieux dont on ne revient ? Hormis Noa, bien sûr. Vasco irait également, moins pour le plaisir de la découverte que la fidélité de l'amitié.

La conversation tourne autour de l'origine et des conséquences des dégâts, puis de l'improbabilité d'une telle évasion pour les adultes, du désir de l'aventure pour d'autres. Les habitations réhabilitées des quartiers nord-est de la Cité Einstein portent en elles la reconstruction, la renaissance, l'espoir tourné vers l'extérieur.

Pourquoi un tel engouement alors que le conservatisme et le repli sur soi représentent largement les caractéristiques de pensée des humains de la Cité ?

Après la dernière dévastation en date, les zones nord et nord-est connurent des destins différents. Les habitants des zones nord, habitués de la mer nordique, s'installèrent en centre-ville ou plus au sud afin de se rapprocher des zones industrielles longeant les grandes forêts. Les anciens habitants du nord-est n'adoptèrent pas la même attitude.

Si le nord inspire à quiconque la crainte, la mer de l'est est celle des plaisirs, de la navigation, bien que simplement côtière, des derniers pêcheurs restant. Aussi, les humains ayant connu l'air doux de l'est, le mouvement des nuages par-dessus les eaux ou encore la caresse du vent frais d'un horizon ouvert, ne se résolurent à la vie du centre ou du sud, encore moins de l'ouest et de ces champs d'agriculture.

Personne ne se vit surpris dès lors que les habitations réhabilitées du nord-est, bien que peu nombreuses encore, soient de larges appartements-maisonnées en hauteur, entièrement vitrés, lumineux et orientés vers l'eau.

Noa aime ces espaces ouverts. Il passe plus de temps sur le balcon ou à l'extérieur qu'enfermé, à la différence de sa sœur qui a élu domicile dans chacun des sièges de l'appartement.

Le fond musical du rythme de l'eau, du vent, s'adjoint à la vie des habitants. A l'intérieur de tous les domiciles les murs blancs et les miroirs dominent afin de refléter les lumières naturelles. Même les nombreux escaliers de ces appartements maisons cubiques en hauteur sont vitrés ou blanc et les maintiens en reflets.

Si le blanc est communément répandu, il est aussi de notoriété publique que la couleur des Bright est le vert. La porte, le fond mural de la pièce centrale, le tapis sous la table à manger, l'espace cuisine... l'émeraude peint l'habitat.

Pendant une compétition de toasts avec Vasco, Emilie reprend la parole et raconte son programme de la matinée. Elle est visiblement fatiguée des discours sérieux dès le réveil.

- Moi aujourd'hui, je retrouve San-Suu !

- Comment cela tu retrouves San-Suu ? répète la tante le visage fermé.

- Oui, c'est notre dernière mane tranquille avant le départ pour le Dôme avec No.

- Vous deviez me donner un coup de main il me semble ? rappelle avec provocation la tante.

- Et puis, avec San-Suu vous entrez seulement en première année de service à l'Ecole, indique Noa. Vous n'avez pas besoin de venir à l'épreuve avec nous au moment des préparations, vous pouvez nous rejoindre au test.

- Avec Suu on vous accompagne, ce n'est pas négociable. On va vous encourager ! D'ailleurs en ce moment, elle me pose de plus en plus de questions à propos de toi, No.

- Et donc ? répond Noa.

- Et donc ? Je ne sais pas. Tu pourrais par exemple... y répondre toi-même si tu comprends ce que je veux dire...

- Ça dépend de ce que tu veux dire ?

- Arrêtez votre petit jeu. Noa, sa copine veut te mettre le grapin dessus, affirme la tante, ne sois pas immature.

- Moi je la prends San-Suu si tu me la laisses, ajoute Vasco en mangeant. Quand elle veut, où elle veut.

- Hé ! s'agace Emilie. Il préfère cette « Avenzoar » je suis sûre...

- Cela n'empêche pas... rebondit Vasco. On aime tous Zo, mais l'amour est large. Le cœur des hommes est grand tu sais Emilie.

Le puissant jeune homme appuie sa provocation avec un large sourire laissant apparaître ses dents recouvertes de pâte à tartiner.

- Pfff, cette prétentieuse aux cheveux rouges... tout ça pour se faire remarquer !

- Euh... dit celle qui a les cheveux bleus... taquine la tante.

- Allez, on s'arrête là, coupe Noa visiblement gêné par la conversation sur ses sentiments. Vasco, on parle de la sœur de Martin tout de même ! et puis, c'est une amie d'enfance.

- Et alors ? reprend de volée Emilie qui ne souhaite pas clore la discussion. Ma meilleure amie ne serait pas assez bien pour toi ? Un jour San-Suu sera comme oncle Karl, une grande légaliste !

- Exactement ce qui attire quand on croise quelqu'un, s'amuse Vasco. Mais si No, appuie-t-il en direction de l'autre côté de la table vers son ami aux cheveux décoiffés. Toute la Cité le sait, une femme nous plait toujours parce qu'un jour, dans plusieurs années, elle sera politicienne ou un truc du genre ! Ça paraît évident ! argumente-t-il en éclatant de rire.

- Oh ça va les gars ! On se détend !

Emilie se tartine une nouvelle série de toasts.

- D'ailleurs j'y pense, tonton tu as toujours voulu faire être ingénieur dans la politique ?

L'oncle et la tante se regardent, interrogatifs.

- Mais qu'avez-vous ce matin à tout vouloir savoir du passé ? se montre perplexe l'oncle Karl. C'était il y a si longtemps tout ça pour nous.

- Aujourd'hui, votre curiosité et votre attention doivent exclusivement être tournées vers l'avenir ! appuie la tante Francine en s'attachant ses cheveux grisonnant en queue de cheval. Bien que cela puisse s'avérer anxiogène j'en conviens, ajoute-t-elle enfin, dans sa posture de soignante.

- Moi aussi ça m'intéresserait de savoir Karl !

San-Suu apparaît.