55/ « A la poursuite du diamant vert »

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Une fourgonnette lancée à pleine vitesse, percute le pick-up sur son aile droite envoyant le véhicule sur le bas-côté. Heureusement, la voiture de Ari est massive et stable comme son conducteur. Elle ne se retourne pas. Elle tressaute, passe le dénivelé et poursuit sa route à travers champs. Le néo-zélandais au volant est imperturbable. Son visage affiche à peine une ride de contrariété noyée dans les tatouages faciaux.

— Vous disiez quoi à propos de votre vie ?

— Oh ! Cazzo ! Je me suis trompée ! hurle Allegra alors que Ari vire à droite pour tenter de reprendre la route.

— Accrochez-vous ! Ça va secouer sévère ! lance alors le néo-zélandais en donnant un coup de volant sec vers la gauche cette fois.

La fourgonnette n'a pas dit son dernier mot. Elle les talonne. Et elle n'est pas seule. Une voiture à la calandre agressive s'est également lancée dans la poursuite.

— Comment ont-ils su ? Comment savent-ils où je me trouve ?

— Comme Fox, je suppose.

— Et comment il fait, lui ?

— GPS.

— Il a foutu un traceur sur moi ? Sincèrement, si je m'en sors, je vais l'étriper... crie-t-elle avec rage en fouillant dans son sac malgré les cahots et les virages.

Toute à sa recherche, elle n'anticipe pas le coup de boutoir à l'arrière qui manque de lui faire renverser le contenu de son sac à ses pieds.

— Fermez votre sac ! On va devoir sortir et courir, dit-il en prenant une route étroite et sinueuse après un virage en tête d'épingle.

— Sortir ? répète la jeune femme en observant l'extérieur. Courir...

Il s'est remis à pleuvoir, et il n'y a pas une maison à l'horizon. Comment compte faire Ari pour semer leur poursuivant si elle a un traceur sur elle ?

Ari voit-il la détresse dans son regard ? A-t-il une intuition ? Toujours est-il qu'il pose brièvement son énorme paluche sur l'épaule de la jeune femme avant de lui dire :

— Ils vont bientôt arrêter de nous suivre. Croyez-moi. Traceur ou pas traceur. Ils n'en auront pas les moyens.

Sur ces paroles, il arrête la voiture au milieu d'un épais taillis, et attrape un objet qu'Allegra n'avait pas remarqué, coincé derrière la banquette. Un fusil.

— Maintenant on court. Vous êtes prête ?

Allegra jette un œil au chemin. La fourgonnette ne va pas tarder à arriver à leur hauteur. Ari prend la main de la jeune femme et l'entraîne à sa suite dans l'enchevêtrement d'arbres et de fourrés.


Combien de temps cela dure-t-il ? Elle ne saurait dire. Ce qu'elle sait en revanche, c'est qu'elle n'est pas taillée pour ce genre d'aventure. Elle a mal partout au bout de trois minutes, est essoufflée au bout de sept, jure entre ses dents au bout de dix. La dernière fois qu'elle a couru, c'était sur un tapis de course dans un club de fitness devant un écran faisant défiler un harmonieux paysage, agrémenté d'une musique rythmée pour l'accompagner dans son effort.

Ici, pas de musique rythmée, juste les battements effrénés de son cœur affolé. Pas d'harmonieux paysage, juste une végétation dense et hostile. On se croirait dans un épisode de ces émissions nature durant lesquelles des types totalement frappadingues vont à la rencontre d'animaux ultra dangereux juste pour le plaisir. Ou dans un de ces films d'action à la noix que Sally affectionnait particulièrement lorsqu'elles étaient ado ! « À la poursuite du diamant vert » tiendrait parfaitement la comparaison.

Allegra jure devant tous les dieux auxquels elle ne croit pas, qu'elle retournera plus régulièrement s'entraîner si elle s'en sort. Juste après avoir étripé Matthew Fox, ça va sans dire ! Mais ça compte dans l'entraînement, non ?


Les tribulations d'Allegra MullerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant