Chapitre 31

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Ruth s'est frotté les tempes en examinant le registre. Maxi a examiné son visage, la tête basse comme un enfant qu'on aurait grondé. Après avoir inspecté longuement les reçus, Ruth soupira bruyamment et passa une main sur son visage. 

"Je ne sais même pas par où commencer, ma dame. Ce sont tous les reçus ?" 

"O-Oui, ils le sont !" réussit-elle à répondre malgré son envie de ramper dans un trou dans le sol.

 Il plissa les yeux sur la pile de parchemins, puis referma le grand livre avec un bruit sourd. 

"Il est tard. Continuons demain", dit-il d'un ton maussade. 

"V-vous pourriez me m-montrer maintenant..." 

"Regardez l'état de ce livre de comptes. Ce n'est pas quelque chose dont on peut s'occuper en un jour." 

Maxi a entendu ses dents grincer. Il n'y avait rien d'autre à dire. Déçue, elle a hoché la tête.

 ◆◆◆◆ 

Le lendemain matin, Maxi se précipita à la bibliothèque dès son réveil. Là, elle fut accueillie par Ruth qui bâillait. 

 "Tu es en avance", a-t-il dit. 

Maxi pouvait dire à son apparence négligée qu'il avait encore dormi dans un coin de la bibliothèque. Elle a plissé les yeux. Elle s'était faufilée hors de sa chambre au lever du soleil pour éviter d'être humiliée par la langue acérée de Ruth devant les domestiques, avec à peine le temps de se laver le visage. Mais voilà que l'homme qui l'avait effrayée la nuit précédente se prélassait sans se soucier de rien. 

"Jetons d'abord un coup d'œil à la liste des achats. Nous devons annuler immédiatement les commandes inutiles." 

Ruth se leva de son coin et s'assit au bureau. Maxi s'est assise en face de lui, passant ses doigts dans ses cheveux non peignés. 

"Le m-marchand viendra c-cet après-midi. Dites-moi ce q-que je dois annuler, et j-je le ferai."

 "Très bien", dit-il, en organisant les papiers par date.

Maxi s'est accrochée à sa jupe pendant qu'il inspectait les papiers. 

"Vingt liram pour une dalle de marbre d'une kevette de long et de large... Vous avez noté la mauvaise monnaie. C'était vingt derhams, et c'est un prix peu onéreux."

Elle soupire de soulagement, mais Ruth n'a pas fini. Tapotant le bureau du bout des doigts, il soupira et continua à expliquer minutieusement. 

"Est-il vraiment nécessaire de changer le sol des deux salles en marbre ? Les dalles n'ont que quelques années. Je suppose qu'il n'y a rien que nous puissions faire maintenant puisque la construction a déjà commencé. Eh bien, le Seigneur Calypse mérite un peu de luxe, donc nous allons laisser faire." 

"M-Mais la construction de la g-grande salle n'a pas encore c-commencé... Il est encore t-temps d'annuler..." 

"Si vous le voulez bien, ma dame", répondit-il sèchement et il tourna la page. "Rien d'autre ne semble anormal. Des rampes, des balustrades pour le balcon, des cadres de fenêtres, des rideaux et des tapis, des tapisseries, des meubles, des lustres, des sculptures, une fontaine... Une fontaine ? !" 

Sa voix plate s'éleva brusquement. Maxi a tressailli comme si elle avait reçu un coup de fouet dans le dos. Il a tourné la tête, les yeux bridés. Maxi ne pouvait se résoudre à le regarder et commença à balbutier des excuses d'une voix à peine audible. 

"Le m-marchand a dit q-qu'elle serait s-splendide dans l-le jardin... 

"Savez-vous combien de temps il faut pour entretenir une fontaine ? Rien que la plomberie nécessite une construction à grande échelle ! Et la fontaine doit être faite de marbre et de cristal ! Ce maudit marchand essaie d'escroquer le domaine de Calypse !"

Sous le chêne  [TOME 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant