JEALOUSY | Carlos Sainz Jr.

5

Rachel, mars 2022.

Toute l'écurie était de retour à Monaco pour les trois jours que nous avions avant le Grand Prix d'Arabie Saoudite.

Le premier matin, tout le monde était au siège pour travailler, sauf ceux qui bossaient sur circuit. Binotto, et tous les chefs des principaux services étaient là, et nous étions en train de faire une réunion hebdomadaire.

Pour être honnête, on s'emmerdait pas mal, puisqu'ils parlaient de la voiture et de la course mais mon service n'a pas grand chose à voir avec le leur. Chez Mercedes, je n'avais pas à assisté à ces réunions là, et ça m'allait très bien.

« Maintenant, on finit avec la communication. Rachel, il faudrait que tu continues les vidéos YouTube, Tiktok, et cætera. L'année dernière, les gens avaient adoré, » il a annoncé et j'ai froncé les sourcils.
« C'est pas le travail de Gianluca, les réseaux sociaux ? Community Manager, c'est écrit dans le nom de poste, non ?, » j'ai répondu.
« Pour l'instant, c'est à la ramasse cette histoire, rien n'est sorti sur les réseaux sociaux depuis le Grand Prix. Il faudrait que ça change, » il a ajouté et je me suis retenue de souffler. Gianluca allait m'entendre râler un bon coup.

On est sortis, et je suis d'emblée allée le voir dans le bureau qu'il partageait avec Jordan.

« Gianluca, Binotto veut que les diffusions régulières sur les réseaux sociaux reprennent. Je peux savoir à quel moment tu as arrêté de le faire ?, » j'ai dit en entrant dans la pièce, mon PC sous le bras.
« Sylvia avait dit que ça ne servirait à rien de le faire régulièrement, » il a haussé les épaules.
« Et bien Sylvia a eu tort. Tu t'y remettras à partir du Grand Prix prochain s'il te plaît. C'est déjà dommage d'avoir manqué l'occasion du double podium, mais tant pis. Pour les vidéos YouTube, je t'aiderai. Et Jordan, ils t'ont donné la réponse sur le conference de presse ?, » je me suis tournée vers le plus vieux des deux.
« Oui, ils veulent Charles, il sera avec Pierre Gasly, » il a répondu.
« Ah, c'est sympa pour eux ça. Passe le message à Charles s'il te plaît. À plus, » j'ai indiqué avant de quitter la pièce.

J'étais sur le point de rentrer dans mon bureau quand une main sur mon épaule m'a faite sursauter.
Je me suis retournée pour tomber sur la personne la plus improbable possible.

« Papa ? Mais qu'est ce que tu fiches ici ? », je me suis exclamée, la main sur le cœur en signe de surprise. Je l'ai tiré dans mon bureau, et il s'est assis sur une chaise.
« J'ai demandé à voir mademoiselle Stanriver, et j'ai dit que j'avais rendez-vous, » il a affirmé comme si c'était normal en s'asseyant. Cependant, quelque chose dans sa posture m'indiquait que quelque chose n'allait pas.
« Mais pourquoi ? T'es pas censé être au bureau ?, » j'ai demandé avec toute l'incompréhension du monde dans la voix.
« Assis toi, ma chérie, » il a ordonné et je me suis exécutée, m'attendant au pire.
« Qu'est ce qu'il y a ?, » j'ai demandé impatiemment.
« C'est Mamie-» il a commencé.

Mon cœur a arrêté de battre.

Non.

« Finis pas ta phrase. Me dis pas que c'est ce que je pense, » je me levée brusquement.
« Elle est partie, ma chérie... » il a confirmé en se levant, et j'ai fondu en larmes. Il m'a prise dans ses bras mais je ne voulais pas que qui que ce soit me touche.

Pourquoi Mamie ? C'est l'humain le plus gentil que Dieu est crée, c'est pas possible. Je savais que son cancer de la gorge s'était aggravé mais je refusais la possibilité qu'elle en meurt...

« Les funérailles sont prévues dimanche, » il a ensuite affirmé et mes sanglots ont redoublé.
« C'est pas possible, on peut pas faire ça avant ?, » j'ai imploré mon père mais il a secoué la tête.
« Personne ne pourrait venir, sinon. Je suis désolé mais on ne peut pas décaler, en plus Papy a confirmé la date aux Pompes Funèbres, » il a nié et mes larmes ont redoublé.
« J'ai pas le droit de louper un Grand Prix, surtout pas le deuxième. Papa, ça pourrait pas plus mal tomber, » j'ai insisté, mais je savais que la situation ne changerait pas.
« Désolé, » il a simplement répondu et je me suis écartée de lui brusquement. J'ai envoyé une pichenette dans mon stylo, qui a volé jusqu'à l'autre bout de la pièce, me faisant d'ailleurs super mal au doigt au passage.
« Je verrai. Merci de m'avoir prévenue, » j'ai dit en me rapprochant de la porte pour l'inviter à l'emprunter.
« Je peux pas partir maintenant, je suis censé avoir rendez-vous avec toi, » mon père a rétorqué mais j'ai soufflé.
« Et bah prend la première à gauche, c'est la machine à café, mais j'ai besoin d'être seule. Je vais quand même pas aller pleurer dans les toilettes alors que j'ai un bureau, » j'ai rétorqué un peu plus violemment, et il a fini par prendre la porte.
« À dimanche, » il est sorti de la pièce.