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NA : Armez vous de votre meilleure playlist, je vous offre deux chapitres pour me rattraper du retard.













Filyn

15 ans, Santa Cruz

-Pffff ! M'exaspérai-je devant ma série.

Une grimace de dégoût se dessina sur mes traits lorsque vint la scène du baisers entre les deux protagonistes, ainsi que leur habituelle tirade qui suivait sur leurs sentiments et tout le tralala.

En toute honnêteté, je ne croyais pas en l'amour.

Je trouvais le concept de l'amour plutôt désespérant. En observant mes parents simuler l'intérêt qu'ils se portaient mutuellement, je devenais malade. J'exécrais l'illusion utopique qu'ils tentaient de laisser paraître en se saluant d'un signe de tête lorsqu'ils se croisaient dans les couloirs. Et, par dessus tout, le sentiment d'être voué à répéter leurs mêmes erreurs m'excédait.

J'étais persuadé qu'il n'y avait qu'un seul cercle vicieux répétitif dans les relations amoureuses, et qu'à partir du moment où viendrait mon tour... Je serais contraint d'accepter une vie monotone en compagnie d'une personne qui ne partagerait pas la même vision du monde que moi. Et puis concernant les interactions, comment passer des années de vie commune dans le silence ?

Je ne connaissais pas suffisamment la langue des signes pour entretenir des discussions complètes, et mon père refusait de me faire prendre des cours pour ne pas qu'on en vienne à me poser des questions quant à l'origine de mon atypique défaillance vocale. Avec l'âge, j'aurais pu me débrouiller pour en apprendre plus, mais en présence d'Aléan je n'en ressentais pas le besoin, et j'ai fini par me contraindre moi-même au silence.

Alors non, je ne croyais pas en l'amour. Et oui, j'avais peur de me restreindre au malheur sans pouvoir rien y faire.

Allongé sur le dos, les mains croisées sous ma tête, je fixais le plafond blanc de ma chambre en attendant qu'Aléan se décide à me rejoindre. Il mettait du temps à se préparer, mais le connaissant, il faisait tout son possible pour retarder l'éventualité. Alors après presque une heure d'attente, je mis mon épisode sur pause et rangeai mon téléphone dans la poche de mon jean avant de toquer au mur qui nous séparait.

-Ley !

Il ne répondit toujours pas au bout de la quatrième tentative. Et, désespéré par son entêtement à m'ignorer, je sortis de ma chambre pour toquer à sa porte afin de le prévenir de ma venue, avant d'ouvrir.

-Aléan, tu te fous de moi ?

Cet idiot était allongé en étoile sur le sol de sa chambre, et ses jambes étaient posées sur son lit, ce qui me fit doucement rire.

-Oui. C'est un bon motif pour m'assassiner, alors je t'en prie.

J'expulsai lentement l'oxygène par mon nez, avant de le rejoindre à même le sol en suspendant mes jambes sur son matelas. De trois quarts, je l'observais me contempler sans rien dire. On avait souvent des phases de fascination mutuelle qui s'éternisaient sans savoir pourquoi. Mais je ne pouvais pas m'empêcher de penser au fait que plus il grandissait, et plus il devenait violent.
Pas avec moi, évidemment. Mais avec tous les autres, et parfois pour aucune raison particulière.

-Tu ne veux vraiment pas y aller ? Demandai-je doucement en tournant la tête dans sa direction.

Pour seule réponse, il secoua lentement la tête de gauche à droite.

-Mais je suppose que je n'ai pas le choix...

-Si, bien sûr que si. Tu ne veux pas y aller, on n'y va pas. Point barre.

Sharpened sensesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant