12- Un long cauchemar

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Tout cela n'est qu'un sombre cauchemar dont j'espère me réveiller. Rien de plus. J'ai beau me pincer encore et encore, je vois toujours le regard paniqué de Chaeryeong tandis qu'elle roule vers sa résidence. Après le fiasco de cette soirée et ma probable mort annoncée si je pose un pied chez moi, nous avons décidé de fuir dans son antre.

— Je te jure qu'on aurait dit que vous vous envoyiez en l'air. Ça avait l'air trop réel.

— Et moi je te promets qu'il ne s'est rien passé. Mis à part sa chaîne qui s'est accrochée à mon soutif, lui même coincé dans ce foutu jacuzzi.

Je n'arrive toujours pas à comprendre comment j'ai pu en arriver là. Puis le visage des quatre terreurs et de mon amoureux fictif réapparaît.

— Chan a foutu la merde. Va falloir que j'ai une discussion avec lui.

— Je ne les imaginais pas aussi proches... Dit-elle pensive. Ils sont peut-être tous bi?

— Chae, c'était un montage. Mon Soobin ne s'envoie que des meufs quant à ton Yeonjun... Il n'y a que Taehyun qui est gay mais je ne suis pas sûre que les étudiants du campus étaient au courant avant ça. Je crois qu'il va me tuer...

Cela m'embête de savoir que j'ai pu le blesser car je n'ai jamais commandé un tel scénario.
Lorsque je repense au moment où j'ai croisé Yeonjun dans la chambre, je suis certaine qu'il m'en voudra pour avoir mis le doute dans la tête de ses groupies. Cependant, je ne suis pas prête à raconter à Chaeryeong ce qu'il s'est passé là-haut, ne voulant pas lui faire de mal.

— T'as raté la gifle de Lia en tout cas. Mais Soobin a aussitôt embrassé cette fille sous ses yeux. Je ne sais pas comment tu fais pour craquer pour lui.

Moi non plus.
L'amour ne se contrôle pas.

Je pense que naïvement, je dois espérer qu'un jour, il voudra se poser et peut-être que ce sera avec moi. Mais c'est bien beau de rêver, la réalité est toute autre.

Nous garons le véhicule en bas de son immeuble et nous nous ruons vers sa chambre pour un jeté de vêtements dans les règles de l'art. Coup de pied retourné pour mon jean et panier de basket pour mon t-shirt. Quant à sa robe, elle s'étale en plein milieu de la pièce. Un beau désordre appréciable.

— Et Hyunjin au fait?

— Il a pris mon numéro après que j'ai refusé de monter dans une chambre. Je pense qu'il va m'appeler demain.

Je l'espère mais n'y crois pas trop. Même si mon expérience est assez courte dans le domaine de l'amour, je sais pertinemment qu'un mec qui vous invite dans son lit lors de votre rencontre envisage une histoire à court terme.

Nous nous couchons toutes deux dans le même lit puis éteignons les lumières.

— Bilan de cette soirée, Ryu.

— Toute la fac pense que j'ai couché en direct avec un mec.

— Et ton frère veut te tuer pour la vidéo. Je crois qu'on peut dire qu'on a fait des progrès dans notre volonté de sociabilisation.

— Ma cote de popularité va exploser.

— Et moi je serai la copine de la meuf qui a tourné un porno. Cool.

— Attends-toi à me loger pendant des années, tu verras si c'est encore cool.

Son rire m'indique qu'elle ne prend rien de tout cela au sérieux mais je ne lui en veux pas. Je suis également à deux doigts d'opter pour la technique de l'autruche.
Je décide de fermer les yeux et d'imaginer que ces dernières heures n'ont jamais existé.
Mais il me faut user de plus d'une astuce pour rentrer chez moi le lendemain afin de récupérer quelques fringues et de m'enfuir chez mon amie. Une lettre m'indique que mon nouveau rendez-vous avec le Doyen aura lieu jeudi. Au point où j'en suis, je ne suis plus à un coup de pression près.

Je rase les murs pendant des jours, la casquette enfoncée sur la tête. C'est une telle gêne quand on me reconnaît que je ne mange plus à la cafétéria ni ne dors chez moi. Le plus triste dans cette histoire est que mon père ne s'en rend même pas compte. Combien de temps mettrait-il à remarquer mon absence si je venais à disparaitre ? La réponse à cette question m'effraie.

Je ne peux fuir plus longtemps le campus puisqu'aujourd'hui, j'affronte à nouveau le Doyen. Mon avenir est entre les mains d'un homme que je n'arrive pas à cerner. Alors que je marche dans la vallée de la mort, deux mains m'attrapent par la taille pour m'entraîner près des buissons.

— Hey! Je t'ai cherché pendant des jours. Ça va, Ryujin ?

Changbin me fait face, avec un visage d'ange et sa carrure de garde du corps. Je ne peux m'empêcher d'imaginer si le scénario auquel on m'associe avait été vrai. Aurait-ce été pire?

— On va dire que je survis comme je peux. Et toi?

— On s'en fiche de moi. C'est toujours plus délicat pour une meuf ce genre de situation. J'ai essayé de répéter à tous ceux que je connaissais que c'était une mésentente mais plus je nous défends et plus j'ai l'impression qu'ils pensent que je n'assume pas.

— Tu as le droit. Tu n'as pas demandé à ce qu'on t'affiche avec moi.

— Ce n'est clairement pas ça qui me gêne, Ryujin. Je m'inquiétais surtout pour toi. Je sais que ça peut paraître bizarre après ce qu'on vient de vivre mais est ce qu'on peut s'échanger nos numéros? Comme ça dès que ça ne va pas de ton côté, tu m'appelles et je te sauve.

Comme dans le jacuzzi.
Sa sollicitude me touche. Ce n'est pas la première fois que Changbin me tend la main et je rougis à cette pensée.

— Ça sera avec plaisir. Mais n'hésite pas à le faire aussi de ton côté. Si tu as besoin que je te sauve... Ou si tu veux qu'on se voit.

— Tu veux dire que j'ai l'autorisation de t'inviter chez moi pour une soirée pyjama et marshmallow ?

— Ne le dis pas deux fois, ce sont mes bonbons préférés.

Son sourire est trop irrésistible pour que mon petit coeur ne s'emballe pas comme celui d'un marathonien. Je dois dire que cela fait bien longtemps qu'un autre homme que Soobin n'a pas ébranlé ma carapace de guerrière.
Un coup d'oeil sur ma montre et je le quitte à toute vitesse pour courir vers le bâtiment administratif. Je retrouve ma secrétaire préférée et son regard hostile ainsi que la chaise à éviter. Malheureusement pour moi, celle que je choisis est abîmée sur le dossier et m'érafle le dos.

Pile à l'heure, l'homme qui peut ruiner mon avenir ouvre la porte et m'invite à rentrer. Tandis que je me pose sur cette chaise et essaie de croiser les jambes sans provoquer d'horribles grincements du mobilier, une silhouette arrive en courant et entre dans la pièce avec nous.

— Désolé du retard, Monsieur. J'ai fait au plus vite.

Instant CrushOù les histoires vivent. Découvrez maintenant