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Après plusieurs minutes à se câliner et à trouver toutes les raisons de s'enfuir tous deux à l'autre bout du monde pour ne jamais être ébranlés par ce qui nous entoure, je me lève pour aller me nettoyer aux toilettes. Je dévie ensuite vers la salle de bain où je croise une nouvelle tête qui se brosse les dents.

— Chalut, me dit le grand brun tatoué au visage rayonnant. 

— Coucou. 

Taeyhun entre dans la pièce et enlace le corps musclé à mes côtés avant de déposer un tendre baiser dans le cou de son partenaire. Je réalise que j'ai sûrement dû manquer un épisode dans la vie de celui que je considère comme mon frère. 

— Ryujin, je te présente Jungkook, mon petit ami. Kook, voici Ryujin, ma petite soeur. Tu peux l'appeler Petite Choi, c'est le surnom qu'on lui donne. 

Ce nouvel invité dans l'immense famille que nous formons crache ce qu'il a dans la bouche avant de s'essuyer puis me tend la main. Il existe des gens qui vous envoient des ondes si positives que vous savez que vous pouvez leur confier votre vie. Lui en fait partie. 

— C'est un peu grâce à cette petite tête si on s'est rencontré mais je t'assure pour la trentième fois que nous ne tournons pas de films X avec les autres.

— J'aime t'embêter avec ça, lui répond le costaud qui se délecte de ses lèvres avec douceur. 

Il me faut cinq bonnes secondes pour réaliser que je suis de trop dans cet espace et commence à reculer. 

— Tu passes la nuit ici, Jungkook ?

— Visiblement puisque Tae a fait un caprice pour que je débarque il y a quinze minutes et que je passe la nuit avec lui.

Je réalise que pendant que je découvrais le corps de Yeonjun en long et en large, le monde continuait de tourner.

— Ferme bien la porte, murmure Taehyun qui visiblement va s'envoyer en l'air dans ma salle de bain. 

J'obéis et souris à outrance, ravie qu'il ait enfin trouvé quelqu'un de bien pour lui. Taehyun a toujours joué à la perfection son rôle de grand frère avec moi. Sévère quand il le fallait mais toujours à l'écoute de mes sentiments avec un mouchoir prêt pour essuyer mes larmes. 

Avec l'envie de déguster un grand verre d'eau pour me rafraîchir les idées, je descends les escaliers sans me soucier du bruit que je fais. De toute façon, tout le monde s'envoie en l'air dans cette maison. Mais mes pieds s'immobilisent sur la dernière marche en découvrant la silhouette de mon père dans le canapé. Il regarde droit devant lui alors que la télévision est éteinte. Aujourd'hui, je peux avoir une vague idée de ce que ressent cet homme en ayant perdu l'amour de sa vie et partage sa douleur. Mais alors que je m'apprête à faire demi-tour pour le laisser tranquille, il me surprend en m'invitant à me poser à ses côtés. 

Mes pas sont hésitants et mon corps se crispe lorsque je me m'assois sur le canapé. Nous sommes à proximité mais si loin intérieurement. Je ne lui en veux pas, ou plus. J'ai appris à faire avec. Ou sans. Mais je l'aime malgré tout. L'amour n'est jamais comme ce que l'on s'imagine ou dans les contes, tout beau, frôlant la perfection. Aimer, c'est accepter d'être écorché par les erreurs de l'autre. Je suis consciente que mon père a laissé beaucoup de cicatrices dans cette famille par son abandon et ses absences mais il mérite la main que je lui tends. 
Sans prononcer un mot, je passe mes bras autour de son cou et pose ma tête contre son torse pour entendre les battements de son coeur. Mais ce sont ses larmes que je sens et le gonflement rapide de sa poitrine qui dévoile des sanglots qu'un enfant ne devrait jamais découvrir chez un parent. Mais à nouveau, j'accepte le rôle de celle qui l'aidera à se relever car nous y arriverons un jour. 

Je respire sur lui le parfum fruité de ma mère qu'il continue d'acheter, refusant d'accepter qu'elle ne rentrera pas. Il est des amours infinis que même la mort ne sépare pas. Certains trouvent la force de tourner la page après un deuil, d'autres préfèrent continuer à sentir la douleur de cette absence pour ne jamais oublier. Mais il est une chose certaine, personne n'a à juger le choix que l'on fait. 

J'aide donc mon père à se lever et à se diriger vers cette chambre qu'il fuit. Il réapprendra à vivre à nos côtés, peu importe le temps qu'il faudra mais nous serons là. Une fois certaine que tout est apaisé, je quitte ce salon silencieux non sans avoir arrosé la plante au pied de l'escalier. Chaque pas qui me mène vers l'espace nuit à l'étage se fait plus léger. Je suis consciente de la chance que j'ai d'être entourée de tous ces gens qui m'aiment et sais au fond de moi que ma mère serait fière du chemin que nous prenons. 

J'entre dans ma chambre et me glisse entre les bras de Yeonjun qui rabat le drap sur nous et me serre fort contre lui. 

Instant CrushOù les histoires vivent. Découvrez maintenant