63- Un tête à tête surprenant

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La nuit couvre déjà cette zone éloignée du campus et les bruits ambiants ne font rien pour me rassurer. Je frissonne dans ce manteau trop léger, dans l'attente que Changbin arrive. Il m'avait donné rendez-vous à 19 heures mais je constate que la ponctualité n'est plus de mise maintenant que nous ne sommes plus en phase de séduction.

Alors que je commence à me dire qu'il pourrait bien aller se faire foutre, j'aperçois la silhouette que j'attendais débarquer tranquillement les mains dans les poches.

— Ryujin, prononce-t-il comme s'il était surpris de ma présence.

— Je commençais à croire que tu ne viendrais pas.

Je suis littéralement en train de danser sur mes pieds tellement le froid grignote ma peau, ce qui n'échappe pas à monsieur muscles.

— On va rentrer pour discuter, tu as l'air gelé.

— Tu penses que c'est judicieux d'avoir une conversation privée en présence de tes amis?

Connaissant l'ego des garçons, j'imagine qu'il ne souhaite pas qu'un public entende certaines de ses vérités.

— Ne t'en fais pas pour ça. Je gère mes potes.

Je suis alors celui qui me draguait il y a quelques jours dans le bâtiment en montant les escaliers. Il ne prend pas la peine de frapper à la porte et nous fait entrer dans l'appartement de Bang Christopher et Lee Felix. Sa main m'invite à avancer jusqu'au milieu de la pièce. Trop occupée à regarder le public qui m'observe tranquillement, je ne réalise pas que le verrou de la porte s'enclenche. Devant moi se trouvent les deux locataires des lieux, ainsi que Seungmin, le garçon qui vit dans la maison de Yeonjun. Je cherche à comprendre ce qu'il fait là mais mon regard est alors attiré vers celui qui se trouve au pied du lit, camouflé par les fringues en pagaille au sol. Hyunjin. Au visage qu'il renvoie, je dirais qu'il est légèrement en colère contre moi.

— Je crois qu'on va plutôt opter pour un report de notre discussion, Changbin.

Celui dont j'ai, jadis, sucé la queue fait tinter la clé dans sa main avant de la balancer à Chan. Je comprends immédiatement que je suis enfermée avec quatre mecs qui ne me veulent pas de bien et un ex énigmatique.

— Installe-toi sur le lit, mets-toi à l'aise, Ryujin, m'indique-t-il.

Je lorgne avec suspicion l'endroit qu'il indique mais ne bouge toujours pas. Mon corps est en état d'alerte, prêt à bondir sur le premier qui m'approchera.

— On n'a pas pissé dessus, si ça peut te rassurer, me lâche froidement Hyunjin.

Au moins, je sais que mon petit cadeau a eu l'effet escompté. Chan renvoie une aura hostile sans que je n'en comprenne totalement les raisons. Certaines choses m'échappent chez ces garçons, plus borderlines que je ne le suis.
Felix ne m'offre aucune attention mais manipule son téléphone ostensiblement, cachant son visage.

— J'ai appris que vous aviez rompu, lâche Chan avec une grande sérénité. Je suis désolé. J'espère que ça ne vous empêchera pas d'être en bons termes.

L'objet de sa réplique m'étonne au plus haut point. J'en viens à bafouiller de gêne.

— Je ne manquerai pas de te saluer quand je te croiserai, Changbin. Mais tu sais qu'on pouvait parler de cela tous les deux sans que ton comité de soutien ne s'en mêle.

Je suis mal à l'aise à l'idée que d'autres prennent part à cette histoire terminée. J'espère qu'ils ne plaideront pas sa cause car il n'y a aucune chance pour que nous relançions notre flamme.

— Ça ne me dérange pas de partager ce moment. Après tout, tu n'as jamais été du genre exclusive, n'est ce pas?

Comprenant qu'il lance les hostilités, je recule jusqu'à buter, le dos contre la porte, même si la fuite m'est impossible.

— J'aurais accepté sans problème les reproches si nous avions été en couple officiellement. Je suis désolée de t'avoir déçue alors que l'on ne s'était rien promis.

— Ce n'est pas le discours d'une pute? Rétorque Seungmin.

— Ouai, totalement, lui confirme Felix toujours le téléphone pointé sur moi.

Mon instinct me dit qu'il doit être en train de filmer même s'il essaie de paraître naturel pour le cacher. Je ne sais pas s'il espère publier mon humiliation sur les réseaux sociaux mais en tout cas, je ne me laisserai pas faire.

— Et dire que pendant que je me décarcassais à te trouver des acheteurs comme tu me l'avais demandé, tu passais tes soirées avec un connard, grogne Changbin.

— Quoi?!

Trop d'informations me laissent confuse. Sa phrase n'a rien de correcte.

— Je ne t'ai jamais demandé de...

— Oh que si que je m'en souviens. Tu m'as dit: il faut que je me fasse du fric, utilise ton réseau pour que je puisse négocier des devoirs à vendre.

— Mais t'es complètement malade! Faut te faire soigner. Je ne reste pas là plus longtemps. Donc ouvre cette putain de porte.

Ma main tente désespérément de faire céder la poignée. Ma prochaine idée sera de sauter du balcon mais il serait préférable de m'assurer que j'ai un point de chute douillé.
Chan claque des doigts et aussitôt, Felix baisse son téléphone en coupant l'enregistrement.

— Tu ne vas pas partir car on a maintenant une vidéo compromettante en plus d'échanges de SMS évoquant ce trafic.

— Tu peux aller te faire foutre car je n'ai jamais rien envoyé de tout cela et ça sera facile de le prouver. Et ta vidéo bidon ne comptera pas car toutes les affirmations viennent de Changbin. Désolée de te le dire mais tu es vraiment nul en chantage.

Mon adversaire se met à grogner et se lève pour reprendre l'ascendant sur moi. J'avoue que sa taille et sa musculature m'intimident grandement.

— Je parlais aussi des anciens messages. Des vrais. Ceux que j'ai récupéré.

Là, c'est la merde.

— Qu'est ce que tu me veux? Chan, je ne comprends rien à cette histoire. Et pourquoi faire ce guet-apens?

Comme si me savoir fébrile et sur mes gardes lui plaisaient, Chan me surplombe et caresse lentement ma joue du bout des doigts. Je suis consciente de retenir ma respiration de peur mais aussi qu'il me sera plus facile de réduire ses couilles en charpie avec cette proximité.

— Je vais te le dire, Petite Choi, prononce-t-il avec hargne. Après tout, on te le doit bien.

Je lui offre un visage apeuré alors que je n'ai qu'une envie, c'est de le défoncer. Mais il faut toujours garder ses cartes dans sa manche jusqu'au coup final.

Instant CrushOù les histoires vivent. Découvrez maintenant