Chapitre 2 - Carter

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Je m'ennuie ferme.

Installé dans mon bureau depuis de longues heures déjà, je contemple les gens dans la rue, trente-six étages plus bas.

Évidemment, à cette hauteur, je ne distingue pas grand-chose, mais je me plais néanmoins à m'asseoir sur le rebord de cette gigantesque baie vitrée et à regarder le monde depuis ma tour de verre.

On dit de New York que c'est une ville qui ne dort jamais et je ne peux qu'être d'accord avec ça. Je le constate au quotidien.

Quelle que soit l'heure du jour ou de la nuit à laquelle je me penche vers cette fenêtre, l'agitation en contrebas ne cesse jamais. Seul le décor change selon les saisons.

Il y a maintenant une dizaine d'années que je travaille pour Porter Industries et j'ai rapidement gravi les échelons.

J'ai commencé à Los Angeles, dont je suis originaire, mais j'ai débarqué à New York l'année suivante, trop heureux d'avoir un véritable travail et par conséquent une réelle occasion de partir loin de mon père.

Rien de tel que des milliers de kilomètres entre les gens pour régler leurs conflits, n'est-ce pas ?

En tout cas pour moi, ça a fonctionné à merveille. Enfin, disons que je ne vois plus mon père, et que donc nos différends restent sagement cachés dans le fond d'un tiroir fermé à clé.

⎯ Entrez ! dis-je en réponse aux coups soudainement frappés sur ma porte.

⎯ Carter, j'ai besoin de votre signature sur ces dossiers, me dit Helen, mon assistante, en déposant sur mon bureau une pile de papiers conséquente avec un petit sourire.

Elle et moi travaillons ensemble depuis longtemps déjà. Et si la plupart des gens ici me craignent, ce n'est absolument pas son cas.

Quand elle nécessite quelque chose, elle n'hésite pas à se manifester et j'ai rapidement appris qu'il ne valait mieux pas la contrarier.

⎯ Est-ce bien indispensable ? demandé-je en soupirant.

⎯ Vous savez bien que oui, sans quoi je ne serais pas ici, me répond-elle.

⎯ J'ai toute confiance en vous, vous pouvez signer à ma place, vous savez, c'est promis, je ne le dirais à personne.

J'ai essayé de charmer Helen un million de fois au moins, mais il semblerait qu'elle soit totalement immunisée contre mes capacités de séduction.

Je suis à peu près certain que c'est pour ça qu'on l'a nommée pour être mon assistante.

⎯ Non seulement ça n'aurait aucune valeur légale, mais en plus, je pourrais me faire virer alors... Bougez vos fesses de ce rebord de fenêtre et venez apposer les lettres magiques en bas de ces dossiers avant que je ne vienne vous chercher moi-même.

Elle sourit, mais je sais qu'elle est on ne peut plus sérieuse. Par conséquent je m'exécute immédiatement.

Helen fait partie de ces gens qu'il vaut mieux avoir avec soi que contre soi.

Il ne me faut que quelques minutes pour faire ce qu'elle est venue me demander et lorsqu'elle sort du bureau, elle arbore un sourire satisfait. Celui qu'elle fait chaque fois qu'elle réussit à me faire plier, en l'occurrence.

Je consulte l'heure sur ma montre. Il est presque dix-neuf heures.

Étant donné que je suis arrivé à l'aube, je pense qu'il est raisonnable de quitter les lieux désormais.

Honnêtement, c'est ici que je passe l'essentiel de mon temps. Je n'ai personne pour m'attendre à la maison.

J'ai deux frères dont je suis très proche, mais qui habitent chacun à un bout du pays et que je ne vois donc qu'en de trop rares occasions.

Céder à la tentationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant