Je dévale les pentes, le sourire aux lèvres en pensant à tous les instants où je ne l'avais pas.
L'air frais cogne contre mon visage et j'inspire un grand coup. Mon pantalon de ski me donne chaud et mes lunettes m'oppressent mais ce n'est pas grave. Parce qu'il est là, le sentiment de liberté que j'attendais tant. Je le sens chaque fois que le vent caresse mon visage.
Je n'ai pas revu Grayson depuis qu'il s'est enfui dans la forêt, me laissant seule dans la neige.
En parlant de lui, je trouve fascinante la façon dont l'être humain choisit ses amis, ses ennemis, l'être aimé, et dont il s'attache puis se détache de ces personnes. Parfois, tellement nous nous prenons d'affection pour quelqu'un, que cette personne nous devient indispensable et que nous avons l'impression de n'avoir plus besoin que d'elle et d'oxygène pour vivre.
C'est exactement ce que je ressentais pour Thomas.
Étrangement, chaque fois que survient l'amour, des tonnes de choses négatives gravitent autour. La dépendance, la jalousie, qu'elle provienne de vous ou d'éléments extérieurs, elle est, à trop forte dose, un poison. Après, c'est toujours douloureux de voir la personne que vous chérissez se tourner vers celle qui vous envie. Si elle choisit l'autre plutôt que vous.
J'ai toujours eu peur de ce genre d'abandon, puis, j'ai réalisé que cela ne dépendait que de moi. Que j'avais les clés en main pour réussir et qu'il fallait que je me batte pour garder les gens que j'aime.
J'ai compris que si deux phares brillent ensemble depuis des lustres et qu'un jour, l'un des deux s'éteint pour éclairer quelqu'un d'autre. C'est qu'autrefois, ils étaient reliés par cette puissance magnétique que nous appelons plus communément « l'amour » et que cette flamme a cessé de brûler. Laissant alors place à la nuit noire et au froid dans le cœur de celui qui brille toujours.
L'amour causera la perte de chaque habitants de cette planète. Pour cause, aimer quelqu'un, c'est lui donner l'opportunité de vous détruire.
***
Je descends de mes skis et je retire mes lunettes. Je tapote mes joues humides devenues brusquement froide, je ne m'étais pas rendu compte que je pleurais.
Penser à l'amour est difficile pour une personne endeuillée.
Thomas m'a toujours aidée, il était mon phare dans la nuit noire. Je ne m'en veux pas d'avoir toujours pensé que l'amour est une faiblesse, parce que ç'en est une. Le seul moyen d'atteindre quelqu'un.
— Ça fait bien trop longtemps que je n'avais pas skier, s'écrit Solène en courant vers moi. Tu te débrouilles bien !
— Tu trouves ? Ma posture reste à revoir.
— T'exagère ! Intervient Laurent dans mon dos, tout juste sorti des pistes. Les filles, Téo arrive, il va être l'heure de rentrer au chalet. Grayson doit s'ennuyer tout seul.
Laurent pose son bras sur l'épaule de Solène avant de commencer à avancer.
***
Nous marchons dans l'allée de nos chalets. Laurent et Sol viennent de rentrer dans celui des garçons, comme prévu et moi, je suis sur le point de glisser la clé de la serrure de ma maisonnette.
J'ouvre la porte d'un coup sec, provoquant un bruit strident et stoppant tous mouvements des ombres devant moi.
La vision d'horreur sous mes yeux me donne envie de vomir.
— Oh, Seigneur ! Je suis désolée ! Je m'écrit, choquée.
Les corps nus de Grayson et Jess se tournent vers moi.
Jessica est horrifiée, mais Grayson ne transmet aucune émotion, si ce n'est la petite moue satisfaite qu'on aperçoit au bout de ses lèvres.
La jeune femme attrape une couverture pour se couvrir, celle sur laquelle je dormais cette nuit.
— Esmée ! S'exclame Grayson, encore nu et sans intention aucune de se couvrir. C'est toujours un plaisir de te voir !
Les tatouages sur son torse traversent des muscles contractés, les sublimant un peu plus.
Jessica fonce brusquement dans la salle de bain, me laissant seule face à Grayson qui n'est pas résolu à se débarrasser de sa tenue d'Adam.
— Ce n'est pas très gentil de me mater devant mon plan cul ! Se moque-t-il.
— Ton « plan cul » ?
C'est la seule chose que je trouve à rétorquer. Plus choquée par la façon dont il la qualifie que son accusation sur la direction de mon regard.
— Ouais ? Tu sais ? Quelqu'un avec qui tu couches ?
— Je sais ce qu'est un plan cul, Gray.
— Surprenant venant d'une fille qui aime le même mec depuis sa naissance, m'achève-t-il.
Sérieusement ? Il m'attaque sur ce sujet alors qu'il m'a accompagné à l'enterrement ? Qu'il m'a sauvée ? Qu'il m'a soutenue ?
— Je suis tout à fait capable de ne pas m'attacher, je m'exclame comme pour me justifier.
— J'ai vu ça ! M'explique-t-il, amer, tu disais quoi, déjà ? « Toi et ton Grayson commencez sérieusement à me pomper l'air ».
— Je ne disais pas ça sérieusement.
— Tu étais on ne peut plus sérieuse.
— Et puis, à quoi bon ?! Je m'énerve, que ce soit vrai ou faux, je ne comprends pas ce que ça peut te faire !
J'en ai plus qu'assez. J'étais éprouvée, Solène me cuisinait depuis une dizaine de minutes, la journée avait été longue. Je sais qu'on peut me blâmer et que je suis fautive, mais il n'aurait jamais dû m'abandonner dans la neige.
— Je nous pensais juste plus proche que ça.
Le choc, voilà ce que je ressens une fois ces mots prononcés. Je n'arrive pas à croire que ce soit lui qui l'ait dit.
— Plus proche que ça ?
— Ouais, je pensais que... je me disais que... tu vois ?
J'aperçois une lueur traverser son regard, de la vulnérabilité.
— Non, je ne vois pas.
— Je pensais que nous étions amis.
Amis.
— Amis ?
— Amis.
— Impossible, je lui assure, tu m'as dit plus d'une fois que nous ne serons jamais amis. Tu me déteste.
— Je te détestais, les choses changent, Esmée.
— Pas à ce point.
Il soupire un instant et s'apprête à reprendre. Il ouvre la bouche puis réalise le comique de la situation. Il est nu, face à moi, en train de me convaincre qu'il veut être mon ami. C'est surréaliste. Il attrape alors une serviette ou je-ne-sais quoi et l'accroche à sa taille.
— Depuis tout ce temps, ce n'est pas toi que je détestais, m'avoue-t-il, c'est moi. Je me déteste pour ne pas avoir réussi à me maintenir loin de toi.
Il se tait et rentre dans la salle de bain. Est-ce sérieusement une façon de conclure une conversation ? Je suis désormais seule face au trou béant qu'il vient de creuser dans mon cœur.
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Like him (En Réécriture)
Romansa"Je ne peux pas croire que vous vous ressembliez à ce point." "Si jamais je t'expliquais, je te perdrais" Esmée est une jeune fille dont le quotidien a été bousculé il y a quelques années par la mystérieuse disparition de son copain. Comment réagir...