Le Don d'Ana - Tome I - L'Apprentie Élue (En cours de rédaction)

Chapitre 65 - La sommation royale

Je n'aspire qu'à une chose... Me venger de Danaé. Et l'atelier du jour concorde parfaitement avec ce dont j'ai besoin pour le faire.

Réfléchissant à une stratégie, je regarde avec envie Irya, la douce jument à la crinière dorée, espérant qu'elle soit ma partenaire aujourd'hui. C'est elle qui reste ma préférée depuis que je suis ici et nous avons tissé une relation particulière basée sur la confiance. Alors, en attendant que mon professeur nous donne les consignes du jour, je m'approche d'elle pour la gratter entre les deux yeux en guise de salut.

Tout en caressant Irya, je lui adresse une onde puissante de bien-être et sa réponse est immédiate, la jument baisse la tête, ferme les yeux et décontracte la mâchoire, signes de parfait relâchement chez les animaux de cette espèce.

Il faut dire que c'est avec elle que j'ai obtenu les meilleurs résultats de « conditionnement ». Son esprit étant pour moi extrêmement facile à « manipuler » si je peux me permettre ce terme. Durant les séances de travail sur ce sujet, Laslaut exigeait de moi une parfaite concentration. L'exercice fait partie des plus complexes à effectuer. Il s'agit concrètement de se focaliser sur l'esprit de l'animal pour tenter d' « influencer » son état puis de réussir à l'amplifier sur une durée déterminée qui varie en fonction de la puissance du pouvoir de l'Élu. Plus ce dernier est puissant, plus le « conditionnement » fonctionnera et perdurera dans le temps.

Voilà pourquoi ces chevaux n'ont jamais vrai­ment réagi à mon mal-être quand je venais cher­cher du réconfort dans les écuries les premiers jours de mon arrivée ici. Ils étaient « conditionnés » par mon professeur pour garder une profonde quiétude à n'importe quel moment et dans n'importe quelles circonstances.

— Bonjour à tous, commence Laslaut. Dans quelques semaines vous deviendrez des Élus. Vos Dons vous demanderont une totale dévotion envers le peuple élenien et vous serez amenés à répondre à des besoins aux quatre coins du Royaume comme vous vous êtes engagés à le faire.

Je ne peux m'empêcher de relever que Danaé affiche une moue de dédain à l'évocation de ces obligations.

Par tous les Dieux, pourquoi a-t-elle choisi cette voie ?

J'ai encore du mal à comprendre comment une personne aussi peu dotée d'empathie peut avoir choisi de mettre sa vie au service de la commu­nauté.

— Parfois ces interventions devront se faire dans l'urgence, et ce notamment lorsqu'elles requièrent l'assis­tance d'un Élu au Don de Guérison.

Romuald se redresse avec fierté à l'écoute de ses paroles ce qui lui vaut un regard méprisant de la part de Danaé.

Je sens ma haine envers elle reprendre le dessus sur ma gaieté fraichement retrouvée.

Vraiment, cette fille est impossible !

Imperturbable et ignorant de ces inimitiés officieuses pourtant manifestes qui trament entre nous, Laslaut poursuit son monologue.

— Toujours est-il que le roi Théobald exige que chaque Élu apprenne à monter à cheval afin de pouvoir répondre à ces exigences dans les plus brefs délais. Aussi, votre apprentissage commence aujourd'hui.

Laslaut ne nous laisse pas le temps d'assimiler cette sommation royale qui laisse mes trois camarades muets comme des carpes et commence l'affectation des montures à chacun d'entre nous.

— Léonce, je vous confie Phileas, annonce-t-il en désignant le grand hongre à la robe gris pommelé.

—Romuald, ce sera Aténor.

Tout comme Léonce, mon ami se dirige tranquillement vers son cheval en lui présentant sa main dans un geste apaisant comme je leur ai appris à le faire de façon à ne pas brusquer l'animal.

Comme nous sommes en charge de l'entretien des écuries de façon régulière, les garçons ont l'avantage de déjà connaître les animaux et de ne plus être intimidés par leur gabarit imposant. Mais je doute que notre chère Danaé soit aussi à l'aise qu'eux et j'ai hâte de voir comment elle va s'en sortir.

Il ne reste désormais plus qu'Irya, ma petite pro­tégée et Aros, un autre gentil cheval alezan au tem­pérament un peu farceur que j'apprécie également mais je me surprends à prier intérieurement Laslaut de m'attribuer la jument couleur caramel.

— Ana, vous monterez Aros et Danaé, voici Irya.

Oh non !!!

Ma déception est telle qu'elle doit se lire sur mon visage et Danaé qui n'en a pas raté pas une miette se di­rige vers nous avec un air de triomphe. Une fois à notre hauteur, elle m'arrache pratiquement la bride des mains en me gratifiant d'un rictus condescen­dant.

Celle-là alors ! Elle ne perd rien pour attendre !