Le Don d'Ana - Tome I - L'Apprentie Élue (En cours de rédaction)

Chapitre 73 - Réflexion

Arnault s'éclipse et nous nous retrouvons de nouveau seules à attendre d'être reçues par le roi.

Malgré la tension insidieuse que je sens renaître à l'intérieur de moi à l'idée de le rencontrer en personne, je ne cherche aucun réconfort auprès de Danaé.

J'essaie plutôt d'occuper mon esprit tourmenté en tâchant de comprendre ce que je fais ici. Autant je conçois que le Don de Danaé soit indispensable à la Couronne, autant j'ai du mal à saisir en quoi le mien pourrait lui être utile.

La cavalerie royale, du peu que j'en ai vu au cours des événements officiels, m'a parue docile et parfaitement équilibrée. Le roi Théobald rencontre-t-il quelques difficultés avec des chiens ou des rapaces destinés à la chasse ? La reine Lyvia souhaite peut-être apprivoiser une perruche ou faire un élevage de cochon miniature. Ou peut-être que la princesse Mirella peine à dissuader son chat de lui ramener des proies sur sa courtepointe tous les matins...

Si tant est qu'elle ait un chat.

J'en suis rendue là. À danser d'un pied sur l'autre en imaginant un tas de scénarios plus loufoques les uns que les autres dans le but de faire redescendre la pression qui m'enserre la poitrine.

Plus sérieusement, je me demande quels autres spécimens je vais trouver entre ces murs et inévitablement, l'image du chiot potelé et maladroit du prince Amaël me revient en mémoire avec son lot de souvenirs terriblement embarrassants.

Par tous les Dieux ! J'espère que ces deux-là ne souviendront pas de moi !

Tout à coup, le regard haineux que le prince m'a lancé ce jour-là me revient en mémoire comme un coup de massue.

Comme si j'avais besoin de me remémorer tout ceci à cet instant précis !

— Danaé Layser, sa majesté va vous recevoir.

Coupée dans mes pensées négatives, je regarde ma pire ennemie franchir la double porte sculptée avant qu'un garde ne la referme derrière son passage. Je ne sais pourquoi, j'avais imaginé être appelée la première, abrégeant ainsi mes souffrances si je peux me permettre ce terme légèrement disproportionné par rapport à la situation.

Il faut dire que j'en ai connu des bien pires que celle-ci. Et de loin. D'autres plus tristes aussi.

Naturellement, l'image du corps inanimé de Plume refait surface et mon cœur se serre. Je ne l'ai nullement oublié, mais il est vrai que toute cette nouveauté, la rencontre avec Arnault, l'entretien avec le roi... Tout ceci m'a aidé à penser à autre chose pendant un court moment. La culpabilité m'envahit mais il en va ainsi, heureusement. Auquel cas, les êtres vivants se laisseraient mourir de chagrin.

Maintenant que je sais que le temps fera le reste, je vais simplement devoir m'armer de patience.

En attendant, sa perte et l'épreuve qu'elle représente me forcent à relativiser sur ce qui m'attend.

Je suis ici parce que je suis une Élue puissante et surtout parce que j'ai été choisie. Je devrais être honorée et consciente de la chance que j'ai au lieu de me comporter comme fragile petite fille apeurée.

Il est temps de grandir Ana.

J'ai à peine le temps d'apprécier cette victoire sur moi-même que je suis sollicitée à mon tour.

— Ana Tanner, Sa Majesté vous attend.