𝐿𝑒𝑡𝑡𝑟𝑒

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      Je me souviens de tes cheveux lâches filant dans le vent marin. Tu tenais ton chapeau d'une main tandis que l'autre caressait les murs des maisons colorés qui tapissaient la rue. Ta robe rouge volaient dans tous les sens comme le ballet d'une flamme qu'on ne croirait jamais pouvoir s'éteindre. On avait grimpé les rues pentues de Lisbonne, nos sandales claquant les pavés noircis, nos genoux fléchis par l'effort de cette montée abrupte. Jules sautillait, Clémentine râlait, Mahé en prenait plein la vue, Katie lisait son guide et toi tu m'attendais, comme tu l'as toujours fait.

Tu me laissais allumer ma caméra, la régler au milieu des rues qui sentaient la poiscaille et l'océan. Je filmais ce décor qui m'inspirait déjà une idée de court-métrage, puis mon objectif se posait sur toi. Tu faisais osciller en tournant les flammes de ta robe. Tu te prenais pour ma star, le premier rôle de notre film, ton chapeau tenu d'une main. On riait en rattrapant les autres, déjà arrivés au sommet de la ville.

Je filmais tes cheveux, tes doigts délicats sur les plis de ta robe, ton rire cristallisé dans l'enregistrement de la vidéo, le son de nos sandales battant les pavés à l'unisson. Je te filmais comme si je savais qu'un jour tu partirais.

Lettre à ÉliseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant