À l'encre de nos rêves

1. Marc

— Aïeuh ! Doucement.

— Pardon. Tu veux que j'ajoute du lubrifiant ?

Le timbre de Liam, bien que profond et grave, est doux, léger comme un murmure qui s'insinue sous ma peau, me faisant frissonner malgré moi. Ce qui ne m'empêche pas de l'assassiner du regard après avoir soulevé prudemment les paupières. Je me reprends aussitôt. Je suis le seul fautif dans cette histoire. C'était ma décision, mon choix. Tout ça parce que j'avais envie de changement, de tenter quelque chose de nouveau...

— Non, vas-y juste en douceur, ça finira bien par passer.

Sur une longue inspiration, je bascule la tête en arrière, incapable d'affronter ce que subit mon corps à cet instant précis. Un cri aigu m'échappe quand une substance froide percute ma peau par surprise, m'amenant une fois de plus à aviser la situation.

— Trop de lub tue le lub, chéri. Il n'y a même plus rien à lubrifier tellement tu m'en as tartiné. Essaie juste de – je ne sais pas – changer d'angle ?

Je plisse les yeux en constatant que les pattes-d'oie de Liam s'accentuent en dépit de ses lèvres qu'il maintient serrées pour museler son rire. Malheureusement pour lui, je le connais beaucoup trop bien pour ne pas remarquer son amusement.

— Ce n'est pas drôle !

Mon ton bougon n'y change rien, au contraire ; un léger éclat moqueur lui échappe.

— Pardon... Tu as raison, c'est pas drôle. Par contre, tu te trompes sur une chose : il n'y a jamais trop de lubrifiant.

Malgré ma situation désespérée, je ne peux m'empêcher de rire, ensorcelé par la lueur malicieuse qui fait étinceler son regard. Nom d'une corne de licorne... qu'il est beau ! Mon pouls sursaute à cette pensée. Même après tout ce temps passé ensemble, Liam a ce don de toujours faire s'emballer mon cœur et pétiller mon ventre. Évidemment, j'ai conscience que notre couple n'en est qu'à ses débuts, nous ne sommes ensemble que depuis un peu plus d'un an, mais... C'est sérieux entre nous. Je le sais. Je le sens. Pour la première fois de ma vie, je me sens réellement bien. Liam apaise cette partie de moi constamment en ébullition, ces ombres ardentes qui n'ont de cesse de ronger mon esprit et s'insinuer dans mes cauchemars.

Lorsque je réalise la direction qu'ont prise mes réflexions, je secoue la tête pour revenir à l'instant présent et au drame autrement plus tangible que nous vivons actuellement.

— Bon c'en est assez, laisse-moi faire !

— Tu es sûr ?

Son inquiétude et sa sollicitude me touchent, accentuant le sourire amoureux qui soulève mes lèvres.

— Oui, assuré-je en me redressant afin d'avoir une meilleure liberté de mouvement.

Malgré ma bonne volonté, il me faut plusieurs minutes avant d'assurer ma prise sur l'objet glissant. Une fois certain de l'avoir bien en main, je tente aussi précautionneusement que possible de le faire bouger. Les petites décharges électriques qui parcourent mes nerfs dès que je force un peu trop ont raison de ma patience et de ma tempérance.

La panique m'envahit.

Et si on ne parvenait pas à me retirer cette maudite chose ?

Dans un coin de ma tête, j'imagine sans mal notre arrivée aux urgences et l'embarras que je ressentirais tant la situation est pathétique. Tant je suis pathétique.

— Plus jamais, tu m'entends ? C'est la dernière fois que je sors de ma zone de confort.

— Tu dramatises, Joli Cœur. C'est juste un problème de taille.