25. Marc

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— J'adore ce tapis.

Le rire de Liam me chatouille le visage, y dessinant un sourire niais.

Allongés sur ce fameux tapis duveteux qui devient, sans que ce ne soit prémédité, un lieu privilégié de nos ébats, nous nous faisons face, emmitouflés sous le plaid, encore alanguis de notre bataille de polochons toute métaphorique.

Rien n'est plus agréable que la quiétude qui m'habite. Pour la première fois depuis très longtemps, je me sens bien. Étrangement, mais délicieusement bien. Je savoure la caresse des doigts de mon fiancé dans mes cheveux avec le sentiment ineffable d'être aimé, à ma place et de le mériter.

— Je t'aime.

Un temps d'arrêt. Un battement de cœur. Une seconde volée à l'éternité. Mon ventre crépite. Mes mots s'envolent sans que je ne cherche à les retenir, mon pouls se lançant à leur poursuite à tire-d'aile exacerbant la puissance de cette déclaration.

L'expression bienheureuse, Liam vient effleurer ma joue de son pouce, son regard étincelant verrouillé au mien.

— Et moi plus encore, Joli Cœur.

Le silence retombe sur nous, nous enveloppant dans un écrin de douceur, nos yeux déclamant ce que nul mot ne saurait exprimer convenablement.

Comme une clé du bonheur, mon âme se libère d'un des verrous qui m'entravent depuis de trop nombreuses années.

Aimer un homme : c'est bien, c'est beau. Sincère et tendre aussi. Juste, surtout. Notre amour ne souffre d'aucun vice, d'aucune malversation, d'aucune dépravation.

La croix qui pend à mon cou me paraît plus légère, soudain. Qu'importe ce qu'on a cherché à m'inculquer, je veux croire que ce que je ressens est approuvé de Dieu, qu'il nous a fait ainsi, avec nos similitudes et nos différences, nos attirances discordantes, tant que nos intentions sont louables et que nous ne cherchons pas à nuire à autrui.

— Acceptes-tu de m'en parler ?

Le timbre doux de Liam dissipe la sensation de perdition qui m'a envahi avant son retour. Incapable de maintenir le contact visuel, je laisse mes yeux s'égarer, puisant en moi le courage de me livrer au jeu des confidences.

— Nous avons discuté de ma famille aujourd'hui. Ce n'était pas la première fois, bien sûr, mais... Le docteur Lemoine a aiguillé la séance afin de déterminer l'origine profonde de mes traumatismes. Il semblerait qu'ils découlent tous de ma relation avec ma mère, de ce qu'elle pense de moi, de sa façon de me manipuler d'un point de vue émotionnel, du poids de ses attentes à mon égard.

Je pince les lèvres tout en expirant de dépit. En lieu et place de l'habituelle douleur, c'est la lassitude qui m'envahit.

— Je t'épargne les tenants et les aboutissants de notre conversation, mais pour résumer : il se pourrait que mes réserves sexuelles et sentimentales incarnent ma volonté inconsciente de plaire à ma mère.

Liam ne fait d'abord aucune remarque si bien que je sens l'angoisse enfler, m'obligeant à l'interroger du regard.

— Quel langage châtié, monsieur de Mauduit ! Je me demande si ton élocution ne s'améliore pas lorsque tu es stressé, raille-t-il gentiment dans le but évident de dédramatiser la situation. Tes réserves sexuelles, donc ?

Il a raison, mon langage se fait plus formel quand je perds mes repères. Comme une résurgence de mon éducation trop stricte à travers mes failles. J'exhale un rire nerveux avant de m'exhorter au calme.

C'est Liam, me houspillé-je. Je peux tout lui dire.

— Disons que mon thérapeute considère que c'est une possibilité. J'ignore pourquoi j'ai toujours répugné à...

À l'encre de nos rêvesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant