18. Marc

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— ... Eh, you're my Sunshine.*

Le corps transpirant, j'occupe la scène de mes pas de danse improvisés, me laissant guider uniquement par l'instinct et la musique qui résonne en moi. À travers les verres de ma paire de lunettes en forme de cœur, je vois littéralement la vie en rose. C'est du bonheur pur qui coule dans mes veines à cet instant, le sourire qui ne quitte pas mes lèvres depuis le début du concert en est la preuve absolue. Je me sens bien ici, loin de mes démons, de mes angoisses et de mes doutes. Vivant. Plus que jamais. Comme si je n'étais pas un être constitué de cellules et d'atomes, mais de notes et d'accords.

À bout de souffle, je m'octroie une petite pause, traverse la scène jusqu'à la gourde que Carla prépare toujours pour moi, et m'en envoie une longue rasade. Pendant ce temps, Clarke, Lamon et Malek occupent l'espace sonore en une sorte de duel musical instrumental qui plaît à notre public si j'en crois leurs cris d'encouragements et leurs applaudissements bruyants.

Ils ne doivent pas être loin de mille dans cette salle. C'est peu pour énormément d'artistes, mais c'est énorme pour moi qui n'en suis encore qu'à mes premiers balbutiements en tant que chanteur. Pourtant mon humeur retombe légèrement lorsque je me souviens qu'elle est là, quelque part au milieu de cette foule anonyme. Un frisson glacé remonte mon échine. Ma peau se recouvre de chair de poule, ma tenue de scène, colorée et décalée, étant suffisamment légère pour ne pas me donner plus chaud que nécessaire pendant que je performe en live.

À présent que j'ai pu prendre du recul sur les événements et refouler les traumatismes qu'elle a réveillés, je ne ressens plus que de la rancœur à son égard. C'est pourtant déjà trop. Je ne souhaite pas donner à cette inconnue en robe noire dont j'ignore jusqu'au prénom plus d'importance qu'elle ne devrait en avoir. Malheureusement, je ne sais que trop bien qu'elle continuera à hanter mes pensées et mes cauchemars pendant un long moment encore.

Il n'y a rien que je puisse y faire. Ciel a bien essayé de lui interdire l'accès à la salle, mais sans son identité, c'était impossible.

Secouant la tête pour chasser mes idées moroses, je décide de rejoindre le milieu de la scène afin d'y récupérer mon micro et de me joindre à leur battle, vocalisant des notes tantôt incroyablement aiguës tantôt graves tout en invitant le public à m'imiter. Lorsqu'ils donnent de la voix, mon micro tendu vers eux, je sens un délicieux courant électrique me parcourir. C'est incroyable. Vraiment. Jamais, même dans mes rêves les plus fous, je n'aurais pu imaginer vivre une telle chose, une telle communion avec autant de personnes en même temps. Même ainsi, il m'est impossible d'imaginer ce que Freddie Mercury a pu ressentir pendant le Live Aid de Wembley en 85 devant les quelque quatre-vingt-dix mille personnes présentes.

— Incroyable ! Bravo, les félicité-je avec un immense sourire. Je vous remercie tous du fond du cœur de participer à cette belle aventure. Merci à tous ! C'est grâce à chacun d'entre vous que je suis ici ce soir. Vous mettez de la magie dans ma vie. Merci...

Je fais signe à Clarke de commencer le morceau suivant tandis que le public me répond dans une cacophonie de hurlements incompréhensibles qui, pourtant, parle directement à mon cœur.

When the night gœs on... And the world falls down...*

Cette chanson en particulier rencontre un tel succès que Ciel souhaite en faire le troisième et dernier titre de l'album à sortir en single. Elle évoque le fait d'aller mal et de ne pas voir la lumière au bout du tunnel, un sentiment qui parle à beaucoup. Elle explique aussi de ne surtout pas baisser les bras, de relever la tête et de continuer d'avancer malgré les difficultés. Elle parle d'espoir.

À l'encre de nos rêvesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant