34. Marc

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Le sifflement de douleur qu'émet Liam me stoppe net dans mon élan.

Depuis que nous avons quitté le jardin au petit matin, son dos n'a eu de cesse de le faire souffrir, et ni la longue douche qu'il s'est octroyée ni mon massage n'ont réussi à le soulager.

— Je vais te prendre rendez-vous chez l'ostéo, inutile de laisser la douleur s'installer.

Même si rester allongé à même le sol n'arrange évidemment rien, ce n'est pas la première fois qu'il se plaint de son dos ces derniers temps. Malheureusement, s'il est doué pour prendre soin des autres, il n'en va pas de même quand il est concerné, si bien que depuis que nous sommes ensemble, j'ai pris pour moi la responsabilité de son bien-être.

— Je préfère quand ce sont tes mains à toi qui me font du bien.

Son sourire en coin et son regard brillant de sous-entendu me font doucement rire et succomber à l'envie de le toucher. Alors, d'une main sur le bras, je lui intime de reculer jusqu'à l'acculer contre la rampe où je lui offre un baiser un peu trop profond. Le hoquet de répulsion qui résonne dans la cage d'escalier me fait vivement sursauter tandis que je réalise avec dépit que ma mère n'a rien manqué de notre échange.

Malgré ma décision et ma détermination de tirer un trait sur notre lien filial, son regard brillant de larmes et son expression démoralisée me font l'effet d'un coup dans l'estomac.

— Bonjour Agathe.

Un sourire agréable ourlant sa bouche, Liam rejoint le rez-de-chaussée avec décontraction, agissant comme s'il n'avait pas remarqué l'air horrifié de son hôtesse qui se renfrogne un peu plus.

— Bonjour Liam. Vous avez petite mine, remarque-t-elle. Avez-vous mal dormi ?

Encore légèrement incertain quant à la manière dont je suis censé réagir, je leur emboîte le pas avec un temps de retard alors qu'ils rallient tous deux la salle à manger.

— La nuit a été courte, mais merveilleuse, assure Liam sans se défaire de son sourire aimable. Je me fais malheureusement trop vieux pour observer les étoiles, allongé à même le sol.

Relâchant le souffle que je n'avais pas conscience d'avoir retenu, je m'avance jusqu'au vaisselier afin de dresser le couvert, rassuré que mon homme dissipe tout malentendu potentiel.

Tout comme moi, ma mère se détend ostensiblement et c'est avec un sourire poli qu'elle disparaît en direction de la cuisine tandis que nous terminons de mettre la table.

— J'ai eu des nouvelles de Marie-Alice à propos, déclare-t-elle à son retour.

Le regard de Liam passe de ma mère à moi, brillant de curiosité.

— Qui est Marie-Alice ?

À l'image de ma mère, mes lèvres se pincent d'irritation, mais pas pour les mêmes raisons. Si elle est agacée par son intervention, je suis pour ma part désabusé.

— La fille d'amis de la famille, éclairé-je d'un ton morne.

— Bien plus qu'une simple amie, Marc. Souviens-toi comme vous étiez proches enfants, sourit-elle avec nostalgie. Vous étiez inséparable à tel point qu'avec ses parents nous étions persuadés que vous finiriez par vous marier.

L'expression de Liam se chiffonne lorsqu'il comprend lui aussi les intentions de ma génitrice. Je repose ma fourchette sans un mot, l'appétit et le moral en berne.

— Elle serait ravie de te revoir, poursuit ma mère avec entrain. Alors je me suis dit : pourquoi ne pas profiter de ton séjour pour l'inviter à dîner avec nous un de ces soirs ?

À l'encre de nos rêvesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant