La lumière matinale s'infiltrant à travers les rideaux mal fermés confère à notre chambre une ambiance douce et intimiste. Sous les draps, il fait presque trop chaud, pourtant ni Marc ni moi ne semblons décidés à bouger. Allongés côte à côte, nos doigts voguant tranquillement sur les reliefs de la peau de l'autre, nous nous laissons aller à nos papouilles tendres dans un silence encore empreint de sommeil.
Depuis le début de notre séjour, sa mère s'est montrée au petit soin pour lui, lui préparant son chocolat chaud chaque matin, proposant de lui beurrer ses tartines, lui concoctant ses plats préférés – du moins, ceux qu'il préférait autrefois. Force est de constater qu'elle ne connaît pas le Marc d'aujourd'hui et ne paraît pas soucieuse de le connaître, se complaisant dans le souvenir caduc qu'elle conserve de lui. Ce simulacre d'amour est d'autant plus déstabilisant que rien dans son attitude ou dans les paroles qu'elle dispense ne vient l'étayer. Déception et tristesse ne quittent jamais son regard dès lors que Marc est dans les parages. Quant à ses interventions, elles sont soit moralisatrices soit rabaissantes comme lorsque son fils a eu le malheur de dire « ouais » au lieu de « oui ».
J'essaie de tenir bon, de ne pas interférer, tout en étant là pour Marc. Difficile de ne pas se laisser atteindre quand la personne qu'on aime est concernée, mais je me dois de rester fort, parce que, si je sombre, qui sera là pour lui ?
Ces maigres interactions mises à part, les jours se sont succédé sans aucun incident à déplorer. Le fait que Marc évite le domaine familial autant que faire se peut n'y est pas étranger, mais comment l'en blâmer ? Il a besoin de temps afin de puiser en lui le courage et l'énergie nécessaire à cette grande conversation qui ne pourra pas être repoussée indéfiniment. Je ne le comprends que trop bien à présent que j'ai pu me dresser un tableau plutôt détaillé de ses parents.
En attendant la fin des championnats et donc le retour de son père, sans qui une vraie confrontation ne peut avoir lieu, nous parcourons les alentours comme Marc me l'a promis le jour de notre arrivée. En dépit de la raison sous-jacente de notre présence dans la région, notre séjour a pris des allures de petites vacances. Nos premières en amoureux.
Nous avons d'abord visité Blois, ses vieilles rues, son incroyable escalier Denis-Papin* et son château, puis Cheverny et son exposition temporaire sur Tintin, avant de faire halte à celui de Villesavin. Après quoi, nous nous sommes éloignés un peu plus afin de découvrir Amboise et le Clos Lucé qui fut la demeure de Léonard de Vinci peu avant sa mort. Nous avons poussé jusqu'à Chenonceau avant d'être plus raisonnables le jour suivant en nous rendant à Chambord, érigé à seulement quinze minutes du domaine de l'Orée. J'ai particulièrement apprécié cette dernière visite, riche en détails historiques et dont l'architecture m'a émerveillée.
— Alors, où comptes-tu m'emmener aujourd'hui ?
— À la messe.
Effaré, je me fige et lui adresse un regard rond qui provoque son rire fluet. Plus amusé que vexé par le tour qu'il me joue, je l'attire à moi dans une étreinte d'ours qui le fait pouffer un peu plus encore.
— Ne te paie pas ma tête, jeune insolent !
— Je suis sérieux, balbutie-t-il.
Je m'oblige à me taire, le temps d'intégrer l'information. Jusqu'à il y a peu, en dehors de cette croix qui ne quitte jamais son cou, Marc n'avait jamais abordé le sujet de sa foi avec moi. Qui plus est, en deux ans de relation, il n'a pas mis les pieds dans un lieu de culte une seule fois. À ma connaissance, du moins.
— Tu vas à l'église, toi ?
Mon ton n'est pas aussi désintéressé que je l'aurais souhaité, par chance, Marc n'en fait pas cas.
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À l'encre de nos rêves
RomanceLe rêve de Marc se réalise enfin tandis que sa carrière de chanteur prend doucement son envol. Son premier album est un succès inespéré. Difficile pour lui de garder les pieds sur terre alors que tout son quotidien est bouleversé. Heureusement, il p...