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Daniela


J'ignore quelle nuit au juste Alessio passa sur le canapé, mais je ne dormis pas très bien pour ma part.

C'était, et de loin, la pire dispute qu'on avait eue depuis le mariage.

Lorsque, coiffée et habillée, je descendis dans le salon, je fus très déçue : il était déjà parti. C'était le même scénario que la veille et ce n'était pas dans ses habitudes. J'étais toujours la première à quitter la maison pour le boulot.

Le cœur gros, je filai attraper le métro.

Il pleuvait à ma remontée à l'air libre, quarante minutes plus tard. Des trombes d'eau.

En jurant, j'enfonçai mon bonnet sur mes cheveux et courus pour arriver le plus vite possible, histoire d'éviter le mode serpillière. Même si elles étaient ravissantes, je regrettais d'avoir mis ces bottines au talon si délicat, si fin. Les pavés étaient glissants comme une patinoire. Pas ma meilleure idée.

Lorsque j'arrivai à la SAF, à peu près sèche, Veronika se tenait devant l'ascenseur avec un homme très élégant, le cheveu poivre et sel, la barbe de trois jours, beaux yeux noirs expressifs. J'allais la saluer, mais elle semblait en pleine discussion.

─ Ta secrétaire ? fit Veronika d'un ton incrédule. Vraiment, Maxi ? Qu'est-ce que tu manques d'originalité. J'en suis désolée pour toi.

─ Alors, gagnons du temps et épargne-moi tes grands discours, Vicky.

─ Ne m'appelle pas « Vicky ». Tu sais que je déteste ça.

L'homme poussa un soupir en consultant sa montre.

─ Tu es toujours tellement en colère, Veronika. C'est lassant. Je te dis que je n'ai pas touché cette fille...

─ N'insulte pas mon intelligence, Maxim, c'est en dessous de toi.

─ Ma pauvre Vicky. C'est moi qui suis désolé pour toi. C'est déroutant...comment peut-on être aussi somptueusement belle que toi, aussi terriblement intelligente que toi, et avoir si peu confiance en soi... ?

Il disait tout cela d'un ton profondément ennuyé, comme s'il parlait de la météo. L'insulte ne laissa pas Veronika de marbre : je la vis tressaillir.

─ Tu as terminé ? aboya-t-elle, palissant.

─ Tu sais quoi ? reprit le beau mâle, l'air inspiré soudain. Rappelle-moi quand tu te seras calmée, chérie.

Il embrassa Veronika au coin des lèvres, lui fit un sourire suffisant et se dirigea vers la sortie et la pluie du dehors, son attaché-case à la main. Il ne semblait guère affecté par ce petit échange, plutôt ennuyé.

Veronika se frottait les bras en regardant fixement les portes de l'ascenseur devant elle.

Je m'approchai, gênée d'avoir été témoin d'une scène aussi gênante de sa vie privée.

─ Bonjour, dis-je doucement.

Elle me considéra, les yeux ronds, et faillit en lâcher ses dossiers.

─ Qu'est-ce que vous fichez là ? Vous avez écouté ?

─ J'ai entendu, corrigeai-je. Heu... désolée. Difficile de faire autrement.

─ C'est impoli d'écouter les conversations d'autrui, on ne vous l'a pas enseigné... ?

Cette fois, la coupe était pleine. Entre mes histoires avec Alessio et mon retard de règles de plus en plus évident – ça faisait deux jours, et j'étais terrifiée à l'idée de faire un test de grossesse alors que j'aurais plutôt voulu me réjouir ─ je n'allais pas encore tolérer la mauvaise humeur notoire de Veronika.

La Lune de Miel (HB tome 4)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant