Le train de nos vies ordinaires

Chap 6 : pdv du contrôleur de train

   Contrôler, je devais contrôler toutes ces personnes que je ne connaissais pas et qui se rendaient quelque part.

En réalité, je n'avais pas envie de vérifier leurs tickets. Je souhaitais les laisser aller là où ils avaient envie d'aller.

Pourquoi certains n'avaient-ils pas le droit de se rendre gratuitement là où ils devaient se rendre ? Pourquoi ceux qui possédaient de l'argent avaient la liberté de se déplacer à leur guise alors que les plus démunis étaient condamnés à réduire leurs déplacements ?

C'était injuste.

Tout le monde devrait avoir le droit d'aller à l'école, à son travail, à l'hôpital ou à un rendez-vous. Tout le monde devrait avoir le droit d'aller visiter sa famille et ses proches. Tout le monde devrait avoir le choix de visiter son pays.

Lorsque je me mettais à progresser dans le couloir du train tout en réclamant le titre de transport, je voyais parfois de l'effroi dans le regard de certains. Certes, il y avait quelques resquilleurs, de temps à autre des gens malhonnêtes, mais il y avait aussi ceux qui n'avaient plus un rond pour survivre. C'étaient ceux-là qui me faisaient mal au cœur.

Lorsque je traversais les compartiments du train et que je contemplais tous ces gens entassés dans ce même transport pour aller vers une même destination, je ne pouvais que me dire que nous étions dans un monde incohérent.

Rien n'était logique.

Que ce soit cette femme qui essayait de voyager gratuitement parce qu'elle n'avait plus d'argent pour finir le mois ou cet homme qui regardait les autres avec mépris depuis sa première classe.

Cette inégalité me rendait malade.

J'évoluais dans ce monde froid et injuste. Je devais survivre chaque jour alors que celui-ci ne faisait pas grand-chose pour m'aider à me sentir bien.