Chap 28 : pdv du contrôleur de train

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   Je la fixai longuement sans savoir quoi dire ni quoi faire. Sa question tournait dans ma tête encore et encore. Elle se demandait pourquoi j'avais gardé si longtemps son ticket et elle avait raison de s'en inquiéter. 

Sa méfiance me mit mal à l'aise. Il y avait tellement de tordus dans les transports en commun. Je ne souhaitais pas qu'elle m'associe à ce genre de personnes, mais je ne voulus pas lui mentir non plus.

-Je voulais connaître votre prénom.

Elle me dévisagea en silence, suspicieuse. Comment allait-elle réagir ? Je devais avoir l'air d'un dragueur.

-Pourquoi ?

-Je vous vois tous les jours.

-Et alors ? Vous croisez pleins de gens tous les jours ?

-Oui, mais avec vous, c'est différent.

-Pourquoi ?

-Je ne sais pas pourquoi, c'est compliqué à expliquer.

-Vous allez me faire croire que vous ne savez pas?

-Souvent, je pense à vous et à votre manteau jaune. J'avais juste envie de connaître votre prénom.

-Vous pensez à moi ? Vraiment ?

-Oui. Pour moi, vous êtes la jolie dame au manteau jaune.

-On dirait que vous parlez d'un personnage de roman.

-Vous seriez une parfaite héroïne de roman, mystérieuse et envoûtante à souhait.

-Mon manteau jaune, répéta-t-elle tout haut pour elle-même.

-On ne peut pas le louper.

-Je me dis que je suis censée avoir peur de vous, mais en même temps, je vous vois tous les jours depuis des semaines. Et je ne peux m'empêcher de penser que vous êtes un gars gentil. Je me trompe ?

-J'essaie de l'être.

-C'est bien. Si tout le monde pouvait essayer, ce serait déjà un bon début.

-J'essaie, mais je fais des erreurs comme tout le monde.

-Personne n'est parfait.

Elle me sourit tout en baissant les yeux sur son livre. Elle lisait le tome 7 de cette fameuse série de livres sur les sept sœurs.

-Je vais vous laisser tranquille. Désolé de vous avoir importunée.

-Vous avez du boulot à rattraper, dit-elle en riant.

-Oui, je crois bien.

-Surtout si vous regardez le prénom de tous les voyageurs.

-Cela ne risque pas.

-Pourquoi dites-vous ça ?

-C'était seulement le vôtre que je voulais connaître.

-Une chose est sûre, vous n'êtes pas un menteur.

-J'essaie.

Elle sourit timidement puis je la laissai derrière moi à mon plus grand regret. Les autres voyageurs nous dévisageaient. Tout le monde avait écouté notre échange.

Je me mis à rougir d'un seul coup. Comment avais-je osé lui parler ? Lui dire que je voulais découvrir son prénom à elle ? Les autres filles dans ce train ne m'intéressaient pas. 

Il n'y avait qu'elle.

J'avais parlé à Céleste.

Mieux encore, j'avais parlé à Céleste et elle m'avait répondu.

Le train de nos vies ordinairesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant