Chap 43 : pdv du contrôleur de train

14 6 2
                                    

   Elle allait me détester pour le restant de mes jours. Et comme je ne monterais plus jamais dans un train, je ne la reverrais sûrement plus.

Pourtant, je ne pouvais pas accepter cette fatalité.

J'avais tout gâché une fois de plus.

Les larmes aux yeux, je marchai dans la gare tel un automate. Personne ne s'intéressait à moi et je n'intéressais personne non plus.

Lorsque j'avais trouvé par hasard cette tenue de contrôleur, je n'avais plus goût à la vie. Je ne m'étais pas imaginé que j'allais arriver à survivre, à relever la tête, une fois de plus grâce à cette idée saugrenue, devenir un faux contrôleur.

J'avais cherché partout Aiko. J'étais désespéré lorsque cette folle idée avait germé dans mon esprit.

J'avais été seul dans les rues de la vie à errer tel un zombie. J'avais pleuré toutes les larmes de mon corps. Quelques passants avaient eu peur de moi en me croisant dans un tel état.

Durant des heures entières, j'avais fouillé chaque ruelle, chaque recoin de la ville pour retrouver mon fidèle compagnon.

Puis, déprimé, j'étais retourné dans la gare, seul et désemparé.

Impossible pour moi de rester dans cette gare sans lui. Je ne pouvais plus continuer comme cela. J'étais sans force, incapable de retrouver cette envie de survivre.

J'avais fouillé une dernière fois la gare pour retrouver mon chien. Puis, soudain, j'avais trébuché sur quelque chose, une tenue de contrôleur de train gisant à terre.

Elle était là, à même le sol, poussiéreuse, oubliée de tous, comme je l'étais à cet instant.

Je l'avais saisie avec perplexité.

Je n'étais personne, inutile, sans valeur. Et si j'arrivais à oublier la perte insupportable de mon chien en aidant les autres, en occupant mes journées avec un métier imaginaire. Parler à des gens pour me reconstruire, pour oublier mes tourments.

Sans me poser plus de questions, j'avais enlevé mes vêtements sales et j'avais revêtu le costume du contrôleur. Il devait être cinq heures du matin. J'avais été ensuite me rafraîchir dans les toilettes publiques de la gare pour ne pas sentir trop mauvais.

Ce costume sur le dos, j'avais soudain eu l'impression d'exister, de servir à quelque chose.

Un sourire timide avait germé sur mon visage.

Je savais que ce n'était qu'une illusion, mais je ne poussai pas plus loin mes réflexions.

Soit je me rendais utile, soit je ne me relèverais pas de cette terrible nuit où j'avais perdu Aiko.

C'était une question de survie.

J'avais quitté les toilettes, le costume sur le dos, sans imaginer un seul instant que, grâce à lui, j'allais vivre quelques semaines inoubliables.

Et plus important encore, j'allais rencontrer la femme de mes rêves.

Céleste.

Le train de nos vies ordinairesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant