Chap 59 : pdv Idgie

8 4 0
                                    

     Je venais d'ouvrir les yeux et je fixai le plafond. Il me paraissait plus haut, plus blanc que d'habitude, peut-être parce que je n'étouffais plus, peut-être parce que le bonheur m'habitait de nouveau, progressivement.

Je venais de faire un grasse matinée. Je n'en revenais toujours pas que mon père n'était pas encore venu me réveiller pour aller courir 20 km.

En fait, il ne le faisait plus depuis notre soirée mouvementée à Liège. Il essayait de ne plus envahir mon espace vital, même si je savais que c'était très compliqué pour lui. Il devait toujours se retenir d'agir comme ceci ou cela. Parfois il retombait dans ses travers, mais il tentait de faire mieux. Il essayait tout simplement. C'était ça qui comptait vraiment.

Au départ, j'avais eu du mal à lui faire confiance, mais il avait tenu parole. J'avais pu clôturer mes comptes sur les réseaux sociaux alors que cela le rendait littéralement malade, mais il s'était abstenu de me forcer à changer d'avis.

Je ne voulais plus un seul compte, fini, stop, terminé pour un sacré moment.

Tout était passé à la trappe. Bon débarras.

Il m'avait regardé faire sans broncher. Mon regard avait croisé le sien alors que je venais de tout clôturer, il m'avait fixé intensément puis il avait souri.

Son sourire m'avait apaisé et je lui avais souri en retour, dans un silence étrange qui nous englobait et nous rapprochait lentement l'un de l'autre.

-Maman serait fière de nous, je crois, avais-je soufflé tout en séchant une larme coulant sur mon joue.

Je lui avais demandé de ne plus remplir mon agenda. J'avais donc annulé presque tous mes cours particuliers. Le seul que j'avais gardé était celui du chant.

J'avais envie de chanter en souvenir de maman, juste pour le plaisir, juste parce que j'aimais vraiment ça.

Papa avait compris mon souhait. Ses yeux humides m'avaient prouvé qu'il était ému que je réalise un peu son rêve, celui de chanter comme maman.

Petit à petit, nous avions appris à nous reparler. Lorsque je me levais le matin, j'étais heureuse de le revoir et de lui adresser la parole. Je ne me murais plus dans le silence. Je ne le détestais plus.

Je n'avais plus envie de l'éviter, de partir loin de chez moi ni de le fuir. Certes, j'étais encore méfiante et parfois sur la défensive, mais notre relation s'améliorait lentement.

J'avais envie de lui confiance comme avant et de retrouver mon papa, celui qu'il était avant le cancer de maman, celui qui m'aimait sans calculer, sans rechercher la notoriété.

Nous étions tous les deux différents, mais je savais que nous arriverions de nouveau à être heureux. Plus à trois, mais à deux. C'était possible. Je parvenais à y croire de nouveau.

Ce matin, j'avais reçu un texto. C'était William qui essayait aussi de se faire pardonner depuis nos retrouvailles à Liège. J'avais accepté de lui laisser une seconde chance. Nous avions beaucoup discuter et j'avais envie de retrouver notre connivence d'avant, de reformer notre trio de choc avec Lili, lui et moi. Il m'avait énormément manqué.

Je lus le message :

-Puis-je t'escorter jusqu'à l'école ? Lali est bien sûr la bienvenue aussi.

Je me mis à rire toute seule. Je m'empressai de lui répondre. Puis le téléphone se mit à sonner. Je décrochai aussitôt en riant :

-Will ?

-Hello Idgie.

-Normalement, le jeudi, c'est papa qui me conduit. Je vais aller lui demander.

-Cela veut dire que tu es peut-être d'accord ?

-Peut-être.

-J'espère que ton père me laissera aussi une seconde chance.

-Depuis que ce qui s'est passé, il ne te déteste plus autant qu'avant. Puis je vais bientôt avoir 18 ans, pas vrai ?

-Peut-être qu'un jour, il m'appréciera un tout petit peu.

-Je ne sais rien te garantir.

-Dommage. Mais qu'en est-il de sa fille ?

-Je peux te dire que sa fille ne déteste pas, c'est déjà pas si mal ?

-Idgie, c'est le plus beau jour de ma vie.

Le train de nos vies ordinairesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant