Prémices

3

Marcus Griwacz savait ce qu'il avait vu quelques jours auparavant. Et si les médias, aux ordres du gouvernement, refusaient de révéler clairement la vérité, lui savait. Une invasion extraterrestre avait commencé. C'était d'ailleurs confirmé par le podcaster Patrice Cordolas, qui clamait qu'ils étaient là depuis des années, infiltrés dans la population. Certes, s'ils étaient déjà là, pourquoi auraient-ils eu besoin d'envoyer des ovnis s'écraser sur Terre ? Mais cette question n'avait pas traversé l'esprit de Marcus. Aussi, conscient de son devoir envers ses congénères et des œillères que portaient les dirigeants, il avait vite pris sa décision : il devait faire son possible pour sauver l'humanité. Un soir, il avait laissé son fils à la maison et préparé son matériel. Puis il s'était dirigé vers Maroeuil, village près d'Arras qui avait été confiné il y a quelques jours. Il avait patiemment attendu que les patrouilles militaires passent. Puis, armé de sa pince monseigneur, il s'était avancé dans la nuit.

*

Le frère Pierrick faisait face à ses interlocuteurs avec sérénité. Il savait comment répondre. Il n'avait jamais senti autant d'assurance en aucune circonstance auparavant. Il avait été soumis à diverses questions auxquelles il avait répondu calmement.

— Donc, vous nous assurez que vos... amis n'ont pas d'intentions hostiles ? demanda le ministre.

— Je vous l'assure. Ils viennent en paix. Ils proposent d'aider l'humanité à évoluer.

— Dans quelle mesure ?

— Leur technologie est très avancée, et ils peuvent nous faire progresser. Ils ont vaincu toutes maladie. Ils maîtrisent le voyage interstellaire. Des sources d'énergie propres.

— Pourquoi ne sont-ils pas venus avant ?

— Ils ne nous estimaient pas prêts.

— Technologiquement ?

— Psychologiquement. L'homme n'était pas prêt à rencontrer une vie extraterrestre et à collaborer avec elle.

— Donc, ils veulent une collaboration ?

Le chef d'état-major de l'armée de terre toussota.

— Monsieur le ministre, si je puis me permettre, une civilisation avec une technologie plus avancée qui ne vient pas pour nous envahir ou nous détruire, c'est suspect.

— Ils ne réagissent pas aux mêmes stimuli que nous. Aucune hormone n'intervient dans leurs réactions. Ils sont incapables de tout sentiment. Ils sont juste pragmatiques.

— Et que leur dicte leur pragmatisme ?

— Qu'une collaboration sera plus fructueuse qu'un conflit. Conflit que l'humanité n'aurait aucune chance de gagner.

— Est-ce une menace ?

— Ils ne menacent jamais. Ce n'est qu'une constatation basée sur les écarts technologiques entre nos civilisations.

— Que veulent-ils ?

— Dans un premier temps, que les ambassades qui sont en cours de développement soient autorisées à rester sur Terre.

— Nous allons faire part de cette demande aux dirigeants du monde et nous revenons vers vous.

La séance était levée.