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PDV Gabriel

Après son départ, je restai un long moment sans bouger alors que dans ma tête tout allait dans tous les sens, mon coeur aussi en vérité, en sentant la chaleur du porte-clé dans ma main. Quelle délicate attention de sa part ! Je n'en revenais pas... 

Je n'avais pas cru à son histoire comme quoi il avait trouvé ceci devant la loge, je n'étais pas si naïf. Alors ça voudrait dire que... c'était une sorte de... cadeau de sa part. J'avais du mal à l'imaginer surtout qu'il n'avait aucune raison de le faire ! Nous n'étions pas proches du tout, nous étions même des adversaires ! Et pourtant Bardella avait pris la peine de m'offrir ceci... et d'y ajouter mes initiales... Malgré moi, ce petit geste me toucha.

- Tout va bien ?

- Ah ! Stéphane oui... oui... dis-je, en prenant mes affaires. On peut y aller. 

Je mis le porte-clé dans ma poche et nous rejoignîmes le reste de l'équipe dans un restau-bar à côté de l'immeuble.  

- Tu as été super Gaby, reprit mon amoureux, en mettant sa main délicatement sur mon épaule, tandis qu'on entrait.

Il y avait pas mal de monde !  Le reste de l'équipe était attablé dans un coin et me salua avec des sourires et des flatteries. Je les remerciai et on voyait par la suite  l'ensemble des choses à faire pour la journée et le reste de la semaine. Le cocktail me fit du bien et je reprenais mes esprits, bien que mes pensées dérivèrent souvent sur le cadeau de Bardella.

Oh mais c'est pas possible ! s'exclama tout à coup Charlotte, en fixant un point lointain.

Je détournai les yeux et faillis recracher dans mon verre en voyant justement mon opposant avec son équipe, en train de converser comme nous à une table. 

- Ça fait longtemps qu'ils sont là ? m'enquis-je, prudemment.

- Sûrement, mais avec le monde, on ne les as pas vus ! répondit-elle, d'un ton blasé.

- Bah !  Ce n'est pas grave ! répliqua Stéphane en rigolant. S'ils souhaitent avoir la cause de leur prochaine défaite sous les yeux, c'est leur problème haha ! 

Malgré moi, j'épiai encore le groupe et remarquai Bardella avec une jeune fille, collée à lui. Oui, c'était sûrement sa copine... Elle était très jolie et paraissait sûre d'elle, chaleureuse. Ils étaient plutôt beaux ensemble....

Une pointe de déception transperça mon coeur à cette constatation, et je n'eus pas le loisir de m'interroger dessus car il leva les yeux vers moi, interrogateur. Je détournai les miens, et m'efforçai d'oublier sa présence. Je fis mine de m'intéresser à la discussion de mes amis, en vain. Le porte-clé dans ma poche me brûlait la peau, comme un rappel constant qu'il était là, et bien accompagné en plus. 

N'y tenant plus, je prétextai avoir besoin d'aller aux toilettes pour reprendre mes esprits.

- Tu veux que je t'accompagne ? proposa ingénument Stéphane.

- Non, t'inquiète, je reviens vite. 

Sur ce, je m'éclipsai rapidement. Arrivé aux toilettes, qui étaient plutôt grandes d'ailleurs et bien entretenues, je passai un peu d'eau derrière ma nuque pour me rafraichir et déboutonnai un bouton de ma chemise. Machinalement, je sortis le porte-clé de Bardella dans ma poche et hésitai à le jeter à la poubelle. Je luttai intérieurement, j'ignorai pourquoi j'agissais ainsi. 

C'était sûrement une technique de sa part pour me déstabiliser, compris-je soudainement. Il voulait jouer avec mes nerfs car nous avions encore des débats, des entrevues ensemble bientôt. Ce cadeau n'avait rien de sincère...

J'expirai d'amertume et me préparai à rejoindre les autres quand il entra. Il ne sembla pas surpris de m'avoir en face de lui. 

- Quelque chose ne va pas, Monsieur Attal ?  me demanda-t-il, en affichant un masque d'inquiétude.

Bien évidemment, il ne le pensait pas, il faisait semblant.

Je ne relevai même pas et m'apprêtai à sortir quand il me stoppa net en ayant m'empoignant d'une main ferme mais douce. 

 Il commençait à m'énerver dans son jeu de rôle d'hypocrite.

- Lâchez-moi Bardella, je ne vous le répéterai pas deux fois, assénai-je, d'une vois dure.

Un éclat de surprise passa dans ses iris et il semblait déconcerté par la colère qui émanait de moi. 

- Je ne comprends pas, souffla-t-il. Ai-je fait une action qui ait pu vous déplaire ?

Il me relâcha. Je me décidai donc à lui dire ce que je pensais.

- Vous êtes hypocrite. Je pensais que vous étiez une personne honnête, malgré le fait que nous soyons opposés, j'avais du respect pour vous en tant que personne. Vous avez cru que j'allai tomber dans le panneau avec votre soi-disant cadeau ? Aucune raison ne justifie ce geste à mon égard, à part celle de me déstabiliser en vue de nos prochaines rencontres ! 

- Je... 

Il semblait perdu, blessé, face à mes paroles. Je ne devais pas me laisser piéger : c'était une façade.

- Vous avez tort, ce cadeau, ce n'est pas pour vous déstabiliser ! Attendez... ajouta-t-il, en comprenant faussement mes paroles. 

Je fus tout à coup saisis par ses prunelles flamboyantes, j'en eus le souffle coupé.

- Je vous déstabilise ?... Moi ?... dit-il, un ton plus bas, avec la même moue du "mon cher Gabriel".

- Vous comprenez tout à l'envers, c'est pas possible ! Même hors des débats, c'est le même discours ! 

Je m'efforçai de reculer mais le mur me bloquait. Je devais partir, Stéphane allait se demander ce que je faisais... Cependant, la proximité de l'autre ne m'aidait pas franchement à assembler mes idées. 

- Monsieur Attal, reprit-il, d'un ton exalté. Je ne veux nullement vous tromper : ce porte-clé est certes un cadeau de ma part mais ce n'est pas un cadeau empoisonné. Je ne veux pas vous porter préjudice, j'espère vraiment que vous me croyez.

Son expression était déterminé et malgré moi, ses mots avaient une teinte de sincérité, toutefois je ne préférais pas m'y fier et restais sur mes gardes. 

- Désolé, mais je vous crois pas Bardella, et d'ailleurs reprenez-moi ce fichu porte-clé, je n'en veux pas ! Je ne veux rien de votre part !

J'étais à bout de nerfs, de nombreux sentiments m'engloutirent entièrement et je souhaitais pas mettre des mots dessus. Je savais juste que l'homme en face de moi faisait ressortir le pire en moi. D'un geste brusque, je lui tendis l'objet. Il mordit ses lèvres de frustration en s'apercevant que je ne bluffais pas. Mon coeur rata un battement.

- Ne m'obligez pas à me répéter, Attal, à un moment donné vous comprendrez pourquoi je vous ai offert ceci. Je tiens à ce que vous vous en souveniez vous-même, sinon ce serait trop facile. 

- Comment ça ? rétorquai-je, ma fureur disparaissant aussitôt. 

Il esquissa un sourire en remarquant mon changement d'humeur et se pencha vers moi. Je n'osai plus bouger. Il referma mes doigts sur son cadeau et murmura, près de mon oreille :

- Je ne vais pas vous le dire maintenant car vous m'accuserez encore de vouloir vous déstabiliser. 

Il était trop proche de moi et son parfum m'envoûta complètement. Il respira fort lui aussi puis sortit précipitamment. Mon pouls battait toute mesure et je pris quelques secondes à m'en remettre. Je sortis de cet endroit plus confus encore que je n'y étais entré. 

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Parti pris pour l'amour - Bardella X AttalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant